Fermer sites icon close
Search form

Recherchez un site de pays.

Profil du pays

Site web du pays

Des populations indigènes colombiennes se réfugient en Equateur pour échapper à la violence

Articles et reportages

Des populations indigènes colombiennes se réfugient en Equateur pour échapper à la violence

Des membres de la communauté indigène colombienne Awa fuient leurs habitations pour échapper à une nouvelle vague de violence dans le département méridional de Nariño. Certains d'entre eux traversent la frontière pour se réfugier en Equateur.
23 Novembre 2006 Egalement disponible ici :
Des membres de la communauté Awa ont cherché refuge dans le village de Lita, au nord de l'Equateur, mais pensent avec nostalgie à leur maison.

LITA, Equateur, 23 novembre (UNHCR) - Plusieurs jours après son arrivée à Lita, un village dans les montagnes du nord de l'Equateur, Doris * est toujours traumatisée. Fin octobre, cette jeune fille, appartenant à la communauté indigène colombienne Awa, se trouvait à l'école lorsqu'elle a entendu des coups de feu venant de l'extérieur. « On a dû se cacher sous les tables pendant trois heures avant de pouvoir quitter l'école et nous enfuir », raconte-t-elle. « En partant, nous avons vu des hélicoptères en train de tirer au sol. » Ils ont alors décidé qu'il était temps de partir.

C'était la troisième fois cette année que les communautés Awa vivant dans le département de Nariño, au sud de la Colombie, se trouvaient prises au piège dans les combats entre l'armée et un groupe armé irrégulier. On estime que 1 700 personnes se sont trouvées bloquées lors des affrontements. Certains ont fui vers d'autres régions de Colombie, quelques-uns - comme Doris - ont traversé la frontière avec l'Equateur et sont venus à Lita, un village où de nombreux Colombiens awa se sont réfugiés ces dernières années en fuyant la violence.

Léon est arrivé récemment lui aussi. Il est venu à Lita fin octobre, avec sa femme et ses deux plus jeunes enfants. Léon avait déjà quitté sa maison une première fois en juillet, et pour échapper aux conflits il s'était réfugié dans une ville voisine, en Colombie. Mais cette fois-ci il avait trop peur pour rester dans le pays. « C'est la guerre là-bas », dit-il, « et le pire est que c'est une guerre où des Colombiens tuent d'autres Colombiens. »

La situation humanitaire s'est nettement dégradée ces derniers mois à Nariño, un des départements les plus isolés et les moins développés de Colombie. Les combats entre l'armée et les groupes armés irréguliers sont fréquents ; de plus, de nouveaux groupes armés sont en train d'émerger dans des zones récemment abandonnées par les bandes paramilitaires démobilisées. Cette situation provoque des vagues successives de déplacements forcés à grande échelle.

La culture de la coca, le produit de base de la cocaïne, a aggravé le cycle de la violence en provoquant davantage de guerres territoriales. Les civils se trouvent souvent piégés au milieu de ces conflits.

« La situation est impossible », a indiqué Léon. « Que peuvent faire les gens quand on leur ordonne de cultiver des semences contre leur gré ? Ils savent qu'ils ont intérêt à obéir, le seul autre choix est de partir. »

A Lita, Léon et sa famille sont hébergés chez une autre famille awa dont les membres sont arrivés en Equateur il y a quatre ans et ont obtenu le statut de réfugié. Huit personnes s'entassent dans une hutte en bois de 30 mètres carré. Sans emploi et sans argent, Léon avoue être inquiet pour l'avenir. Mais sa plus grande crainte concerne ses deux fils aînés, qui sont toujours en Colombie et qui ne pourront pas partir.

« Personne ne peut rentrer ou sortir », explique-t-il. « Les gens sont bloqués. Nous n'avons rien pris avec nous pour éviter d'éveiller les soupçons. Nous avons juste dit que nous allions au marché pour acheter de la nourriture et ils nous ont laissé passer. C'était quelques jours avant le début des combats. »

Il est difficile de savoir exactement combien de personnes ont traversé la frontière ces dernières semaines. L'UNHCR a renforcé sa présence à la frontière, où 85 nouveaux cas ont été enregistrés en octobre et 15 durant la première semaine de novembre. Mais, comme ailleurs en Equateur, le nombre de ceux qui s'enregistrent ne représente sans doute que la partie émergée de l'iceberg.

« La région est semi-tropicale et éloignée, le terrain est montagneux et de nombreux endroits ne sont pas accessibles en voiture », explique Hanne Meike Grol, chef du bureau local de terrain de l'UNHCR à Ibarra, situé à environ 100 kilomètres. « De plus, les gens ont très peur et nombre d'entre eux préfèrent rester cachés dans les montagnes. Nous comptons sur un réseau de réfugiés et de locaux pour nous informer et expliquer aux nouveaux arrivants leurs droits, mais parfois les gens attendent des semaines ou davantage avant de s'enregistrer. »

José et sa famille ont marché pendant trois jours dans les montagnes pour atteindre Lita. Comme Léon, il a quitté Nariño juste quelques jours avant le début des combats. Il avait entendu des informations selon lesquelles des groupes irréguliers armés essayaient de recruter des combattants parmi les communautés indigènes. « J'ai trois fils adolescents et j'avais tellement peur pour eux. Je savais que nous devions partir », a-t-il expliqué.

Dans les rues de Lita, les habitants regardent les nouveaux arrivants avec curiosité. La plupart font preuve de compassion et essaient de comprendre ce qu'ont vécu ces personnes et ce qu'elles ont fui. Ils semblent surpris et mal à l'aise en entendant le récit des violences qui se déroulent si près d'eux et détruisent tant de vies humaines.

Par Xavier Orellana à Lita, Equateur

* Noms fictifs