Une véritable odyssée pour un réfugié de l'Iraq de Saddam avant de trouver un nouveau foyer
Une véritable odyssée pour un réfugié de l'Iraq de Saddam avant de trouver un nouveau foyer
PORT OF SPAIN, Trinité-et-Tobago, 23 mai (UNHCR) - L'exil de Mustafa Jaffar a commencé il y a six ans à partir du nord de l'Iraq. Il va prendre fin cette semaine lorsque Mustafa quittera la petite nation caraïbe de Trinité-et-Tobago pour un nouveau foyer et une nouvelle vie en Nouvelle-Zélande.
L'histoire de Mustafa, comme celle de tant d'autres réfugiés, a commencé dans la peur. Né à Najaf dans une famille en vue appartenant à la communauté chiite, Mustafa s'est rendu compte depuis son plus jeune âge de l'attention indésirable du régime de Saddam Hussein. Son beau-frère a été pendu à cause de son appartenance à un parti religieux interdit. Lorsqu'il avait 15 ans, Mustafa et sa famille ont été emprisonnés et interrogés à propos des activités soi-disant anti-gouvernementales d'un de ses frères. Il fut régulièrement battu par ses geôliers pendant quatre jours.
Sa famille a été emprisonnée pendant l'invasion du Koweït par les forces iraquiennes. Six mois plus tard, suite à l'expulsion des Iraquiens par les forces de la coalition, ils ont été à nouveau arrêtés et accusés d'avoir pris part à une insurrection manquée après la défaite de Saddam. Le père et le frère de Mustafa ont disparu depuis lors.
En ayant des liens familiaux et avec un groupe religieux considérés alors comme suspects par le gouvernement, Mustafa savait qu'il ne trouverait la sécurité qu'en allant hors de la portée de Saddam Hussein.
Son voyage a débuté lorsqu'il avait 18 ans, il est d'abord parti dans la région kurde du nord de l'Iraq. Il a ensuite essayé d'entrer illégalement en Iran et en Turquie, chacune des tentatives se soldant par une expulsion. Quand les représentants du gouvernement du nord de l'Iraq ont commencé à menacer de l'envoyer dans le sud toujours sous contrôle du parti baas de Saddam, il a cherché refuge dans des pays plus lointains.
De retour en Turquie, il a rencontré un passeur qui, pour la somme de 10 000 euros, lui a promis qu'il rejoindrait les Etats-Unis ou un pays européen et qu'il pourrait y demander l'asile. Il a reçu un faux passeport et un billet pour le Venezuela où il recevrait soi-disant un passeport d'un pays de l'Union européenne.
« Nous avons été emmenés en sécurité dans une maison », a indiqué Mustafa. « Je ne parlais pas un mot d'anglais. La personne chez qui nous logions parlait arabe, elle m'a dit que cela prendrait du temps pour trouver un passeport et que je devrais être patient. Finalement, nous avons dû prendre l'avion pour Trinité-et-Tobago. »
A Trinité, Mustafa a été accueilli dans la capitale, Port of Spain. Deux semaines ont passé sans qu'il obtienne de réponse au sujet de ses documents d'identité. Seul dans un pays inconnu et bientôt sans argent, il décide de chercher de l'aide. Il s'est alors rendu au centre d'information des Nations Unies de la ville, qui l'a envoyé vers l'agent de liaison honoraire de l'UNHCR à Trinité. Cette entité a cherché de l'aide à son tour auprès du bureau régional pour les Etats-Unis et les Caraïbes, situé à Washington DC.
« Le cas de Mustapha illustre à la fois l'inutilité - et somme toute la nécessité - du système d'agent honoraire de liaison de l'UNHCR sur place dans les Caraïbes, où nous ne disposons d'aucun bureau. Il démontre aussi le besoin d'améliorer la protection des réfugiés dans la région des Caraïbes », a indiqué Janice Marshall, chargée de protection au niveau régional pour les Caraïbes, au sujet du séjour de Mustafa à Trinité. « Le Gouvernement de Trinité-et-Tobago souhaite recevoir et protéger des personnes comme Mustafa, mais ne dispose concrètement d'aucune législation ou politique sur place pour assurer leur accès à une procédure de demande d'asile, ou aux droits dont peuvent bénéficier les réfugiés selon les lois internationales. »
Mustapha est arrivé à Trinité un mois avant que le pays ne devienne signataire de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés. En 2002, après avoir minutieusement examiné son cas, l'agence des Nations Unies pour les réfugiés l'a reconnu comme réfugié, car il ne peut rentrer dans son pays par crainte de persécution. La décision a été communiquée au Gouvernement de Trinité, qui a donné son accord pour prolonger son statut de réfugié.
En l'absence d'une législation à Trinité prévoyant le traitement et les droits accordés aux réfugiés, Mustafa n'a pu obtenir ni un permis de travail, ni des documents d'identité et n'a pas pu chercher une nouvelle maison. Il a fait une dépression et en 2005, il s'est rendu à Londres en avion, où il a été mis en détention par les services de l'immigration. Comme il avait déjà été reconnu comme réfugié à Trinité, il a été renvoyé dans ce pays.
« Ce fut la période la pire pour moi », a-t-il indiqué. « Je me suis senti perdu et épuisé. Mais l'UNHCR a continué de m'aider et a fait naître l'espoir d'une éventuelle réinstallation. »
Au début du mois de mai, cet espoir s'est réalisé lorsque le Gouvernement de Nouvelle-Zélande lui a accordé le droit de résidence. Après trois ans, Mustafa pourra demander la citoyenneté et obtenir un passeport.
Actuellement, il prépare son départ vers Auckland. Mustafa est hébergé, grâce à l'agent de liaison honoraire de l'UNHCR à Trinité, au sein d'une communauté chrétienne, où des prêtres, des religieuses et des laïcs sont devenus ses plus proches amis et l'ont soutenu, en dépit de leurs croyances différentes.
« Les habitants de Trinité m'ont ouvert leur maison et je leur en suis très reconnaissant », a indiqué Mustafa. « Si je peux obtenir un passeport, j'espère pouvoir revenir un jour pour les revoir. Pour la première fois depuis plusieurs années, je vois l'avenir avec optimisme. »
Par Tim Irwin