Réduction imminente des rations alimentaires pour les réfugiés en Zambie
Réduction imminente des rations alimentaires pour les réfugiés en Zambie
LUSAKA, 23 décembre (UNHCR) - Plus de 80 000 réfugiés accueillis dans les cinq camps de réfugiés et d'autres communautés en Zambie pourraient souffrir de la malnutrition, qui entraînerait des problèmes sociaux tels que le travail des enfants et la prostitution, à moins que la générosité des donateurs internationaux ne permette d'éviter une réduction de 50 % des rations alimentaires, prévue pour janvier.
Le Programme alimentaire mondial (PAM) a averti l'UNHCR qu'il serait contraint, sans donation immédiate, de réduire de moitié les rations alimentaires des réfugiés en Zambie à partir de janvier 2006, avec un arrêt complet prévu pour mars. A ce jour, le PAM n'a reçu aucune aide pour le programme 2006 en Zambie.
Ahmed Said Farah, le délégué régional de l'UNHCR en Zambie, indique qu'une ration minimum est cruciale pour assurer aux réfugiés une vie normale et qu'une réduction alimentaire menacerait leur protection, leur nutrition et leur santé.
« Il y a aura une augmentation des maladies, de la mortalité et de la malnutrition », a indiqué A.S. Farah. « Il y aura une augmentation des problèmes sociaux, comme la prostitution et le travail des enfants, et les réfugiés pourraient devenir incontrôlables en raison de pénuries alimentaires. L'UNHCR partage les préoccupations du PAM et soutient pleinement son appel de fonds pour fournir des denrées alimentaires adéquates aux réfugiés de Zambie. »
Le délégué du PAM dans le pays, David Stevenson, lors d'une conférence pour les donateurs à Lusaka le 9 décembre dernier, a révélé qu'aucune contribution n'a été reçue pour le projet d'assistance alimentaire en 2006 et 2007 en Zambie et a indiqué que les stocks de 2005 à reporter en 2006 sont très faibles.
« Par conséquent, sans financement immédiat, le PAM devra réduire de moitié les rations alimentaires à compter du 1er janvier 2006. Et les rations feront complètement défaut en mars 2006 », a indiqué D. Stevenson. « Cette situation est critique, particulièrement durant la période de sécheresse. »
Durant la même conférence, Peter Mumba, le Secrétaire permanent des affaires intérieures, a appelé les donateurs à un financement d'urgence expliquant que la crise alimentaire, si elle n'est pas évitée, mettrait en péril la sécurité nationale.
« Le manque de nourriture peut être une source d'émeutes et d'autres incidents de sécurité parmi les réfugiés dans les camps », a-t-il expliqué. « Nous en appelons donc à nos donateurs pour nous aider encore une fois comme vous l'avez toujours fait. »
Le PAM et le gouvernement ont signé un nouveau projet d'accord pour les rations alimentaires des réfugiés le 8 décembre dernier, pour 2006 et 2007, avec un budget de 17,9 millions de dollars, dont 9,8 millions de dollars pour 2006. Le stock à transférer de 2005 à 2006 ne fait état que de 2 500 tonnes de rations alors que les besoins pour 2006 sont estimés à 18 640 tonnes, le manque s'élève donc à 8,52 millions de dollars.
Le programme concerne tous les réfugiés accueillis dans les camps, soit la moitié du nombre total de réfugiés présents en Zambie estimé à 160 000 personnes. La plupart d'entre eux sont des Angolais et des Congolais. Les autres vivent en zone urbaine ou dans des communautés ailleurs en Zambie.
La sécheresse partielle en Zambie durant la période agricole de 2004-2005 a exacerbé une situation déjà désespérée pour les réfugiés, particulièrement ceux des camps de Nangweshi, Kala et Mwange au nord et à l'ouest de la Zambie.
Dans ces camps, tous dépendent de l'assistance alimentaire pour les besoins de base. Bien que quelques réfugiés disposent d'une petite parcelle, le manque global de terres cultivables ne permet pas à la plupart de subvenir par eux-mêmes à leur alimentation.
A cause du manque de pluie, même des communautés de réfugiés pourraient avoir besoin d'assistance, comme Meheba et Mayukwayukwa où certains peuvent cultiver des terres et ont pu se passer de rations alimentaires après avoir atteint une modeste autosuffisance.
Du 6 au 12 décembre, une mission d'évaluation conjointe du PAM et de l'UNHCR à Mayukwayukwa a étudié l'impact de la sécheresse sur les cultures dans les installations pour établir si l'assistance alimentaire était requise et pour combien de temps. Elle a révélé que la production céréalière avait été effectivement insuffisante.
Les réfugiés concernés ont été contraints de trouver d'autres sources de revenus, une difficulté supplémentaire pour les handicapés qui doivent parcourir de longues distances pour trouver du travail. En outre, ils passent moins de temps dans leurs champs, ce qui pourrait également avoir un effet négatif sur la production de cette saison.
Les Zambiens manquant maintenant de céréales, il pourrait s'avérer impossible de trouver de la nourriture, même en travaillant dans les villages voisins. Si des réfugiés désespérés commencent à voler dans les champs des autres, les relations habituellement bonnes entres les réfugiés et leurs hôtes pourraient se détériorer.
Les équipes du PAM et de l'UNHCR ont présenté leur rapport le 14 décembre, indiquant qu'il était impératif de réintégrer dans le programme alimentaire, pour 3 mois au moins, les réfugiés qui ne bénéficiaient plus des rations alimentaires. Cela leur permettra d'améliorer leur récolte et leur alimentation. Ces foyers ont également besoin d'aide pour générer des revenus agricoles.
Les craintes de l'UNHCR sur l'impact des réductions alimentaires sont fondées sur l'expérience passée. Les réfugiés ont reçu des rations complètes en 2005, après des interruptions en 2004. Lorsque les rations de maïs et de légumes secs pour les réfugiés ont été réduites de moitié en novembre 2004, des émeutes de réfugiés ont éclaté à Kawambwa, ils ont attaqué des véhicules de l'UNHCR et des ONG. Plusieurs employés ont été blessés et les autres ont dû être évacués jusqu'à ce que le personnel de sécurité ait restauré l'ordre.
Les réductions de rations ont aussi entraîné les réfugiés à quitter les camps à la recherche de revenus, pour faire face à la pénurie. Quelques réfugiés ont été détenus par les autorités pour être restés hors des camps sans autorisation. De plus, les femmes et les enfants sont devenus plus vulnérables. La prostitution a augmenté, l'assiduité à l'école a chuté et la situation sanitaire et nutritionnelle des enfants a été particulièrement menacée. Si le financement ne parvient pas rapidement, une aggravation de la situation est à craindre pour 2006.
Par Kelvin Shimoh à Lusaka