"Nous sommes en pleine crise" ; Augmentation alarmante des décès infantiles à Dadaab
"Nous sommes en pleine crise" ; Augmentation alarmante des décès infantiles à Dadaab
DADAAB, Kenya, 11 juillet (HCR) - L'Afrique de l'Est connaît la pire sécheresse jamais vue depuis 60 ans et qui frappe de vastes étendues. Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés António Guterres a passé la journée de dimanche au sein du complexe tentaculaire de Dadaab, comptant trois camps de réfugiés, pour se rendre compte de la situation désespérée de milliers de Somaliens y arrivant désormais chaque semaine.
Accompagné de journalistes, António Guterres s'est rendu dans les camps de Dagahaley, Hagadera et Ifo composant le complexe de Dadaab. Il s'est entretenu avec de nouveaux arrivants, a visité des centres d'enregistrement, des dispensaires et des points de distribution de nourriture. Il a par ailleurs écouté les témoignages de travailleurs humanitaires sur le lourd tribut que la sécheresse fait payer aux nouveaux arrivants somaliens, tout spécialement les jeunes enfants.
Lors d'une conférence à laquelle ont assisté António Guterres et les journalistes, les travailleurs humanitaires ont été clairs dans leur évaluation de la situation. « Nous sommes en pleine crise », a déclaré Allison Oman, chargée au HCR des questions de nutrition et de sécurité alimentaire au niveau régional. « Nous avons besoin de mettre en oeuvre des mesures extraordinaires pour leur venir en aide. »
La situation alarmante à Dadaab est relative au nombre croissant des arrivées depuis la Somalie ainsi qu'au taux élevé de décès, en particulier parmi les jeunes enfants. Concernant les enfants en-dessous de cinq ans, les taux ont respectivement multiplié de 3,2 et 3,8 pour les décès infantiles dans les camps d'Ifo et d'Hagadera en comparaison des chiffres de 2010. Dans le camp de Dagahaley, l'augmentation est de six fois le taux de l'année dernière.
Les familles arrivent à Dadaab dans un état d'épuisement à la limite de la survie. Les travailleurs humanitaires sont confrontés à une course contre la montre pour identifier les personnes ayant besoin de soins urgents. Tous les nouveaux réfugiés sont enregistrés et reçoivent de la nourriture. Cependant il est parfois trop tard pour enrayer la dégradation de l'état de santé de certains parmi eux. Les infections des voies respiratoires inférieures, telles que la bronchite ou la pneumonie, sont la principale cause des décès, suivies de la malnutrition et de la diarrhée.
António Guterres a écouté une réfugiée témoigner de sa fuite depuis la Somalie durant laquelle elle a dû marcher pendant des semaines. Trois de ses enfants ont trouvé la mort durant ce trajet. « J'ai cru devenir folle après le décès de trois de mes enfants », lui a expliqué Musleema Aden. « J'ai perdu mes enfants à différentes périodes du voyage. »
Ces dernières semaines, Dadaab - et les camps de Dollo Ado en Ethiopie voisine - a dû faire face à un afflux sans précédent de personnes fuyant la sécheresse en Somalie dont les effets sont encore amplifiés par le conflit. A l'intérieur de la Somalie, les mauvaises récoltes et la quasi-absence d'aide génèrent un quadruplement des prix. Selon le HCR, la plupart des personnes attendent le dernier moment pour fuir, ce qui explique leur état de santé dégradé.
Dadaab hébergeait déjà plus de 300 000 personnes avant la crise. Le complexe voit aujourd'hui sa population approcher des 400 000. Les réfugiés arrivent en masse dans les zones déjà surpeuplées des principaux camps, où les travailleurs humanitaires font leur possible pour les aider. Dimanche, António Guterres a évoqué le besoin pour les agences humanitaires de livrer de l'aide à l'intérieur même de la Somalie où leur accès est actuellement très limité.
« J'estime que la Somalie est le théâtre de l'une des pires tragédies humanitaires au monde », a-t-il indiqué aux journalistes. « C'est pourquoi nous devons faire notre possible pour pouvoir livrer une assistance humanitaire massive à l'intérieur même de la Somalie. »
Par Adrian Edwards à Dadaab, Kenya