Myanmar : Le HCR contribue à l'acquisition de la citoyenneté pour les minorités privées de droits civiques
Myanmar : Le HCR contribue à l'acquisition de la citoyenneté pour les minorités privées de droits civiques
HAMEAU DE SIN OH ALEL, Myanmar, 23 juillet (UNHCR) - Cette journée est à marquer d'une pierre blanche pour Noor Hakim, qui est âgé de 19 ans. Il s'est vu délivrer une carte d'identité nationale, un document vital pour entreprendre les moindres démarches dans un pays qui attache une grande importance aux papiers officiels.
« Maintenant je peux voyager », a expliqué Noor Hakim, qui est un étudiant musulman. « Ce document peut être utile aussi pour demander la permission de se marier », a-t-il ajouté, en tenant à la main le Certificat d'enregistrement provisoire plastifié, qu'il vient de recevoir d'un fonctionnaire dans ce hameau de l'Etat du Nord Rakhine.
Fournir des papiers d'identité à un premier groupe de 35 000 Rohingyas - puis davantage à l'avenir - sera l'aboutissement de cinq ans d'effort de l'UNHCR pour limiter les effets néfastes de l'apatridie dans cette région abritant des Musulmans, connus par le monde extérieur comme les Rohingyas.
La plupart d'entre eux n'ont jamais eu de carte d'identité officielle. « Nous l'avons attendue pendant 15 ou 16 ans », dit un habitant de ce hameau. « Pour les personnes plus âgées, l'attente a été encore plus longue. » Environ 200 000 personnes dans cette région auraient besoin de papiers d'identité.
Grâce à la contribution des Etats-Unis d'un montant de 689 000 dollars, l'UNHCR fournit un soutien logistique à l'opération, ainsi qu'un photographe et des machines pour les photocopies et la plastification, afin d'éviter le processus laborieux que serait d'écrire à la main des milliers de certificats d'enregistrement provisoire. Le gouvernement a refusé l'offre de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés de produire des cartes de haute technologie à partir de dispositifs biométriques et sécuritaires parce que les cartes d'identité ordinaires fournies à ses autres citoyens n'atteignent pas ce standard technologique. Fait d'importance, l'UNHCR est parvenu à persuader les autorités du village à distribuer gratuitement les certificats d'enregistrement provisoires.
Bien que les Musulmans représentent 76 pour cent la population de l'Etat de Rakhine, le gouvernement du Myanmar ne les considère pas comme des citoyens, et préfère les définir comme « résidents de l'Etat de Rakhine. » Il rejette même la terminologie « résidents du Myanmar », parce qu'il ne veut pas suggérer qu'ils ont le droit de vivre où que ce soit dans le pays.
Le déni de citoyenneté à la minorité musulmane « a sérieusement réduit le plein exercice de leurs droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels et a conduit à diverses pratiques discriminatoires », expliquait Paulo Sergio Pinheiro, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l'homme au Myanmar, lors d'une déclaration en avril signée par cinq autres experts des Nations Unies en matière de droits de l'Homme. Il a cité de graves restrictions à la libre circulation ; diverses formes d'extorsion et d'imposition arbitraire ; la confiscation de terres et des expulsions forcées ; l'accès restreint aux soins médicaux, à la nourriture et à un logement approprié ; le travail forcé ; et des restrictions pour les mariages.
L'UNHCR est présent dans l'Etat du Nord Rakhine depuis 13 ans, agissant pour le bien-être de plus de 230 000 anciens réfugiés musulmans qui sont rentrés depuis le Bangladesh voisin à partir de 1992. A l'origine, ils avaient fui le Myanmar en 1991, et quelque 26 000 personnes sont encore hébergées dans des camps gérés par l'UNHCR au Bangladesh.
« En plus d'assister les rapatriés dans l'Etat du Nord Rakhine, nous sommes de plus en plus impliqués auprès de populations apatrides de plus en plus importantes dans le cadre du mandat de l'UNHCR pour prévenir et mettre fin à l'apatridie dans le monde », a expliqué Jean-François Durieux, le délégué de l'agence pour les réfugiés à Yangon.
« Au Myanmar, nous avons le plus important programme de l'UNHCR pour l'assistance à des personnes apatrides », a-t-il dit. « Dans ce contexte, la délivrance de certificats d'enregistrement provisoire est une étape importante vers une identité légale claire, puis par la suite l'acquisition éventuelle de la citoyenneté. »
Il est clair que ces documents officiels ouvrent des portes dans l'Etat du Nord Rakhine, où un grand nombre de règles discriminatoires écrites et orales régissent la vie des résidents musulmans.
Les Musulmans de la région doivent demander une permission écrite pour voyager hors de leurs villages, puis une deuxième pour être autorisés à passer une nuit dans un autre village.
Le mariage sans permission - et une permission est souvent refusée ou différée - peut conduire à de lourdes amendes et des condamnations à la prison et transforme les enfants de ces mariages « illégaux » en personnes apatrides et privées de droits civiques. Pour les Musulmans défavorisés de l'Etat de Rakhine, l'observation des innombrables restrictions représente des dépenses onéreuses et la plupart du temps officieuses pour chaque démarche.
Le certificat d'enregistrement provisoire - un document délivré en vertu de la loi sur la citoyenneté - aidera les Musulmans d'au moins huit villages (où les premiers certificats ont été délivrés) à se conformer aux règlements. « Nous espérons que c'est une première étape pour les résidents de la région vers une intégration dans la société du Myanmar », explique Jean-François Durieux.
« Plus ils ont de papiers pour prouver leur identité, plus cela les aidera à long terme », a ajouté Jayshree Jayanand, directeur par intérim du bureau de l'UNHCR à Maungdaw, qui a supervisé la distribution des certificats d'enregistrement provisoire dans ce hameau.
L'agence des Nations Unies pour les réfugiés progresse par ailleurs pour essayer de mettre fin à l'apatridie ici en finançant des cours de langue birmane. Cette formation donne un autre atout aux Rohingyas car la maîtrise de la langue du Myanmar est une condition préalable à la naturalisation en vertu de la loi sur la citoyenneté.
Shanuwar Begom, âgée de 18 ans et diplômée d'un cours de langues financé par l'UNHCR au Myanmar, a expliqué que « cette formation m'a beaucoup aidée car maintenant je sais lire et écrire mon prénom et mon nom de famille et je peux également lire. Elle m'aidera beaucoup dans mes démarches avec les autorités. » Elle a ajouté qu'elle est la seule des 11 personnes dans sa famille élargie à savoir lire et écrire, parce que le dialecte local des Rohingyas est une langue non écrite.
Par Kitty McKinsey, dans l'Etat du Nord Rakhine