Les menaces d'expulsion pesant sur les réfugiés du Darfour s'éloignent mais la sécurité au Tchad reste un sujet de préoccupation
Les menaces d'expulsion pesant sur les réfugiés du Darfour s'éloignent mais la sécurité au Tchad reste un sujet de préoccupation
ABECHE, Tchad, 18 avril (UNHCR) - Bien qu'ils soient encore inquiets du récent soulèvement politique et des combats survenus au Tchad, les réfugiés soudanais originaires de la région troublée du Darfour ont poussé, lundi, un soupir de soulagement, après que le Président Idriss Déby Itno ait donné l'assurance au Haut Commissaire António Guterres que le Tchad n'avait pas l'intention de les renvoyer de force vers leur pays violent et dangereux.
Lors d'une conversation téléphonique avec le Haut Commissaire dimanche soir, le Président Déby a fait part de son inquiétude quant à la difficulté d'assurer la sécurité des 220 000 réfugiés et des organisations humanitaires qui leur viennent en aide. Outre ces réfugiés, quelque 40 000 déplacés internes vivent dans l'est du Tchad.
« L'UNHCR presse la communauté internationale et ses diverses organisations de faire tout ce qui est possible afin d'établir d'urgence la paix et la sécurité au Darfour, qui sont essentielles pour la stabilité de l'ensemble de la région », a indiqué António Guterres lors d'un communiqué lundi. « Il est aussi primordial de préserver la sécurité des réfugiés et des personnes déplacées au Darfour et au Tchad, ainsi que dans d'autres pays de la région. »
Des préoccupations sécuritaires ont poussé l'UNHCR et ses partenaires, ainsi que d'autres organisations des Nations Unies, à évacuer du Tchad leur personnel non essentiel. Pour le moment, quelque 35 des 280 employés nationaux et internationaux que compte l'UNHCR dans le pays ont été transférés par voie aérienne jusqu'à Yaoundé, au Cameroun grâce à deux vols organisés par les Nations Unies - l'un depuis la capitale et l'autre depuis Abéché, dans l'est.
« Nous essayons maintenant de trouver un équilibre entre le maintien des services de base dans les camps pour les réfugiés, qui se sentent ainsi rassurés par notre présence, et les mesures de précaution pour la sécurité de nos employés. Ce processus est en cours ; aucun autre vol d'évacuation n'est envisagé dans l'immédiat », a indiqué Jennifer Pagonis, porte-parole de l'UNHCR, aux journalistes à Genève.
Selon nos informations, la situation dans les 12 camps de réfugiés de l'est du Tchad serait calme, les activités se déroulant quasi normalement en dépit du fait que l'équipe à été réduite d'environ un tiers une semaine auparavant, suite à son évacuation. Les réfugiés eux-mêmes prennent une large part aux nombreuses activités quotidiennes dans les camps, en particulier l'enseignement. Il n'y a pas de problème de distribution d'eau ou de nourriture. Le personnel de l'UNHCR fait tout ce qui est possible pour tenir les réfugiés informés des développements les concernant et les a invités à discuter de leurs préoccupations.
Les informations selon lesquelles les milices janjawid originaires de la région soudanaise du Darfour seraient proches du camp de réfugiés de Goz Amer sont préoccupantes. Ce camp, situé à 95 kilomètres de la frontière soudanaise, accueille plus de 17 000 réfugiés du Darfour. Le 10 avril, il a été brièvement occupé par un important groupe rebelle armé du Tchad. Un gendarme tchadien affecté à la sécurité du camp a été tué et deux autres gendarmes ont été blessés. Quelque 117 employés humanitaires, incluant du personnel de l'UNHCR, ont dû passer la nuit au camp. Ils n'ont pas été blessés et ont réussi à partir le lendemain.
« Il y a le feu au Darfour et il y a aussi le feu au Tchad », a déclaré samedi un Oumda (un chef traditionnel) du camp de réfugiés de Goz Amer, « et nous nous trouvons entre ces deux feux. Nous sommes exposés à tous les dangers. Les gendarmes chargés de la sécurité du camp ne pourront pas nous protéger efficacement en cas d'attaques de janjawids. Les janjawids pourraient à tout moment entrer dans le camp et procéder à l'enlèvement de certains représentants de réfugiés ».
Un autre sujet d'inquiétude évoqué par les réfugiés et par la population locale concerne le début imminent de la saison des semences. Si l'insécurité empêchait la plantation des cultures vivrières à la saison des pluies qui débute en juin, les conséquences seraient catastrophiques.
On compte environ 220 000 réfugiés présents dans l'est du Tchad. Ils sont originaires de la région soudanaise du Darfour déchirée par le conflit. L'UNHCR et ses partenaires les assistent ainsi que les populations locales qui les accueillent en améliorant leurs conditions de vie. Ils leur fournissent notamment de l'eau et des abris et leur donnent accès à des soins de santé et à l'éducation. Il y a aussi quelque 40 000 personnes déplacées internes dans l'est du Tchad.
Par Matthew Conway à Abéché, et William Spindler à Genève