Le responsable du HCR António Guterres demande la fin des combats au Nord-Kivu
Le responsable du HCR António Guterres demande la fin des combats au Nord-Kivu
GOMA, République démocratique du Congo, 17 décembre (UNHCR) - Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, António Guterres, a demandé la fin des combats dans la partie orientale de la République démocratique du Congo (RDC) et s'est engagé à ce que les conditions de vie pour des dizaines de milliers de personnes déplacées dans les camps s'améliorent. António Guterres, qui terminait dimanche une visite de trois jours dans la province du Nord-Kivu, déchirée par les violences, a déclaré que la véritable solution aux déplacements de masse se trouve dans une paix durable.
On estime que, depuis août 2007, près de 170 000 personnes ont été forcées de quitter leurs foyers dans le Nord-Kivu du fait des combats entre les troupes gouvernementales et les rebelles alliés du général dissident de l'armée, Laurent Nkunda. Un grand nombre de personnes ont trouvé un abri dans les camps proches de la capitale de la province, Goma, ainsi qu'à environ 70 kilomètres plus au nord, près de la ville de Rutshuru. Le Haut Commissaire pour les réfugiés s'est rendu dans ces deux sites.
« Nous, l'UNHCR et ses partenaires, ferons tout notre possible pour améliorer les conditions de vie dans ces camps. Mais nous ne voulons pas qu'ils deviennent pour vous une résidence permanente. Vivre dans des camps n'est jamais une bonne chose », a dit António Guterres en s'adressant aux centaines de déplacés qui s'étaient réunis samedi dans un centre communautaire improvisé à Kisasa, l'un des nombreux camps près ou autour de Rutshuru.
Vendredi, des centaines de déplacés se pressaient le long des routes détrempées par les pluies pour accueillir le plus haut responsable des Nations Unies pour les réfugiés lors de son premier jour de visite à Buhimba, un camp de déplacés installé par l'UNHCR aux alentours de Goma. Buhimba est l'un des cinq sites de déplacés accueillant plus de 40 000 personnes près de Goma.
« Nous savons combien vous avez souffert. Certains membres de vos familles ont été tués, vos maisons incendiées, vous avez perdu vos récoltes », a déclaré António Guterres, en parlant aux déplacés qui s'étaient réunis dans un centre social de fortune, à côté du camp où se trouvent quelque 10 000 personnes.
« Je suis convaincu que votre souhait le plus grand est de retrouver la paix et la possibilité de rentrer dans vos foyers. Mais pour que la paix revienne dans le Nord-Kivu, les affrontements doivent s'arrêter », a souligné le Haut Commissaire, en ajoutant qu'il s'était entretenu avec le gouverneur du Nord-Kivu et avec les casques bleus des Nations Unies à Goma. « Nous sommes tous d'accord, les combats doivent s'arrêter. »
L'an passé, le conflit, dû à la fois au renforcement des effectifs militaires et à l'insécurité généralisée dans le Nord-Kivu, a été la cause d'un déplacement massif de population, soit environ 400 000 personnes, ce qui constitue la pire crise de déplacement depuis la fin de la guerre civile en 2003. Au total, on estime le nombre d'individus déplacés au sein de la province à 800 000, parmi lesquels figurent les personnes déplacées par les conflits antérieurs.
Durant ses trois jours de visite dans les sites accueillant des déplacés près de Goma, de nombreuses personnes déplacées ont fait part à António Guterres des souffrances que des hommes armés leur ont fait subir dans leurs villages ainsi que des difficiles conditions de vie dans les camps, où ils disent manquer de nourriture, d'eau ou de bâches en plastique pour protéger leurs abris de fortune.
Il n'y a ni maternité pour les femmes enceintes, ni école pour les enfants et aucun moyen de gagner sa vie, ont-ils dit, ajoutant que des hommes armés erraient librement dans les camps et harcelaient les déplacés. « Nous avons fui depuis différents villages et nous nous sommes retrouvés ici [à Buhimba]. Mais nous craignons de retrouver ici la personne que nous avons fuie », s'est lamenté un homme âgé, en faisant référence à Laurent Nkunda. « Où devons-nous encore aller pour trouver la sécurité ? Tout cela se finira-t-il un jour ? »
Lors d'une conférence de presse à Goma dimanche matin, António Guterres a indiqué qu'il était inacceptable que des hommes armés rentrent dans les camps de déplacés et il a appelé toutes les parties à respecter le caractère civil de ces sites.
Au camp de Buhimba, une femme d'âge moyen a supplié António Guterres d'aider les déplacés à rentrer chez eux. « Intercédez pour nous auprès de nos dirigeants pour qu'ils se rendent compte de nos souffrances. Nous sommes fatigués, nous sommes fatigués - Nous vous supplions, aidez-nous à rentrer chez nous », a-t-elle imploré.
Dans le centre social bondé de Buhimba, un jeune homme a raconté comment il a fui dans la forêt, avec d'autres, pour échapper au recrutement forcé pratiqué par les rebelles. « La vie au camp n'est que souffrance », a-t-il ajouté.
A Kisasa, un camp accueillant quelque 5 000 déplacés à Rutshuru, une femme borgne s'est avancée et a pris le micro. « Je ne suis pas née avec un seul oeil. Mais, une nuit, les rebelles nous ont attaqués, ils nous ont attachés et nous ont battus. Ils m'ont percé un oeil et ils m'ont violée », a-t-elle raconté à António Guterres, choqué.
Le responsable de l'UNHCR s'est ensuite rendu dans d'autres sites accueillant des déplacés, notamment l'école primaire de Rutshuru. Les déplacés entassent dans un coin leurs possessions chaque matin, pour que les élèves puissent suivre les leçons dans leur salle de classe ; la nuit, ces salles deviennent à nouveau des dortoirs. Les cuisines communes occupent la cour de l'école. D'autres déplacés vivent dans le stade de la ville, ils dorment dans les gradins et font la cuisine sur le terrain de jeu.
António Guterres est retourné à Kinshasa, la capitale congolaise, dimanche après-midi. Il y rencontrera le Président de la RDC, Joseph Kabila, ainsi que des ministres lundi, avant de revenir à Genève dans le courant de l'après-midi.
Par Millicent Mutuli à Goma, République démocratique du Congo