Le HCR appelle à un soutien accru aux solutions durables pour les personnes rapatriées et les réfugiés au Burundi
Le HCR appelle à un soutien accru aux solutions durables pour les personnes rapatriées et les réfugiés au Burundi
« Depuis mon retour, j’ai un toit sur la tête grâce au soutien du HCR mais sans terre à cultiver, j’ai du mal à trouver tous les jours de quoi me nourrir, ainsi que mes enfants et mes petits-enfants qui vivent avec moi », explique Helena Ntakirabutimana. À 72 ans, cette mère de 12 enfants a passé une bonne partie de sa vie en exil en Tanzanie.
C’est en 1972 qu’elle cherche refuge pour la première fois en Tanzanie. Après un retour au Burundi en 2008, elle est contrainte de fuir une nouvelle fois en 2015. De retour au Burundi depuis 2020 elle est désormais installée sur la colline de Musenyi dans la province de Makamba, à environ 150km au sud de Bujumbura. Depuis son retour, trouver de quoi nourrir sa famille relève du miracle.
Malgré la solidarité affichée par ses voisins qui partagent volontiers leurs maigres ressources, les difficultés d’accès à des opportunités économiques est l’un des obstacles majeurs qui entravent la réintégration durable pour Helena et plus largement les familles qui sont de plus en plus nombreuses à regagner le Burundi ces dernières années.
Face à ces difficultés, difficile pour les enfants d’Helena restés en Tanzanie d’envisager dans l’immédiat de rejoindre leur mère. « Une petite parcelle de terrain à cultiver ou un petit capital pour démarrer un petit commerce, c’est ce dont j’ai le plus besoin actuellement », déclare-t-elle.
L’accès à des terres cultivables, l’intégration au sein des coopératives agricoles ou encore la disponibilité de ressources financières pour démarrer des activités génératrices de revenus figurent parmi les besoins évoqués à la fois par les personnes récemment rapatriées au Burundi et celles qui ont regagné le pays plus tôt au cours de ces dernières années.
Accompagné de sa femme et de ses trois enfants, Ramadhani Chongera, 40 ans, regagne son pays après avoir trouvé refuge en 2015 en Tanzanie. Ravi d’être de retour après de longues années, il ne cache cependant pas son appréhension quant à la disponibilité d’opportunités économiques qui lui permettront de subvenir aux besoins de sa famille.
« Nous revenons les mains vides mais avec l’espoir de pouvoir disposer d’un toit et d’opportunités économiques qui nous permettront de nous reconstruire dans notre pays », confie-t-il. « Avoir la possibilité de travailler pour gagner notre pain facilitera sans aucun doute notre réintégration et nous permettra de nous sentir comme des burundais ordinaires. »
Lors d’une visite de trois jours au Burundi qui s’est achevée mercredi dernier, La Haut Commissaire adjointe des Nations Unies pour les réfugiés, Kelly T. Clements, a rencontré Helena Ntakirabutimana à son domicile. Elle s’est également entretenue avec d’autres familles qui ont regagné le Burundi trois jours plus tôt, eux-aussi en provenance de Tanzanie. Ces derniers ont décrit les besoins pressants auxquels ils sont actuellement confrontés.
Le Burundi accueille actuellement plus de 87 000 réfugiés et demandeurs d’asile dont la majorité proviennent de la République démocratique du Congo (RDC). Situé dans l’est du pays, le camp de réfugiés de Nyankanda accueille à lui seul environ 12 000 réfugiés congolais. Ces derniers travaillent main dans la main avec des membre des communautés d’accueil autour d’activités aussi variées que la broderie, la boulangerie-pâtisserie, la pisciculture ou encore la menuiserie.
Pascaline Sango Ngena, 49 ans, a rejoint le camp de Nyankanda en 2019 avec ses 6 enfants. Elle a été contrainte de fuir les violences dans le village de Kafulo dans la province du Sud-Kivu, en RDC. Survivante de violences sexuelles, le souvenir de l’attaque armée dont elle a été victime à son domicile et au cours de laquelle elle a failli perdre la vie est encore vivace.
Les défis auxquels elle doit faire face au quotidien pour subvenir aux besoins de sa famille n'entament en rien sa détermination à se rendre utile à la communauté au sein du camp. Reconnaissante pour l’accueil et l’hospitalité du Burundi, elle s’implique dans plusieurs projets qui profitent à la fois aux réfugiés congolais et aux communautés hôtes.
Elle est notamment à l’initiative de la coopérative Salama Africa qui rassemble des femmes réfugiées et celles issues des communautés voisines du camp. « Nous plantons des arbres pour reverdir notre environnement et réduire l’impact de la déforestation aux alentours du camp », confie-t-elle. « Les arbres plantés fournissent également des fruits qui contribuent à améliorer la nutrition des enfants », ajoute-t-elle.
Pascaline contribue également à l’encadrement de femmes réfugiées rassemblées autour d’une coopérative de broderie soutenu par l’Union Européenne. Les recettes issues de la vente des tissus ainsi brodés sont reparties entre les membres. Des ressources plus que bienvenues pour ces femmes qui pour certaines doivent s’occuper seules de leurs familles. « En attendant que la situation sécuritaire s’améliore et que nous puissions envisager un retour chez nous, nous faisons de notre mieux pour vivre harmonieusement avec les communautés qui nous accueillent généreusement », souligne Pascaline.
Au cours d’une visite dans le camp de Nyankanda, Kelly T. Clements s’est dit impressionnée par le dynamisme et la collaboration fructueuse entre les réfugiés et les communautés hôtes. « Les réfugiés congolais font preuve d’une grande créativité. Leur collaboration avec les communautés d’accueil est tout à fait exemplaire », a-t-elle souligné. « Un accès étendu aux marchés et à d'autres services augmenterait leur potentiel et accroitrait leur capacité à redonner à leurs communautés d'accueil », a-t-elle renchéri.
- Voir aussi : Les réfugiés burundais cultivent leurs liens avec leurs hôtes congolais grâce à l’agriculture
Mais les moyens manquent pour répondre efficacement aux besoins des Burundais rapatriés et des réfugiés généreusement accueillis dans le pays. Sur un total de 80,5 millions de dollars nécessaires pour le financement de ses activités en 2022, le HCR n'a réuni à ce jour qu'un peu plus d’un tiers (33%).
La cheffe adjointe du HCR a appelé les donateurs à accroitre leur soutien aux solutions. « Nous avons besoin d’un soutien étendu pour permettre à toutes ces familles de se reconstruire durablement. Cela passe notamment par un accès aux services de base tels que l’école pour les enfants. Il est également capital d’assurer un plus grand accès à des opportunités économiques », a-t-elle souligné.
Le HCR et ses partenaires souhaitent mobiliser 107,3 millions de dollars pour soutenir la réintégration d'environ 240 000 réfugiés burundais de retour de la République démocratique du Congo, du Rwanda, de la Tanzanie et de l'Ouganda. Ces fonds permettront également de répondre aux besoins de plus de 95 000 personnes dans les zones d’accueil des réfugiés.