Thé et solidarité : Des Iraquiens aident leurs compatriotes réfugiés en Syrie
Thé et solidarité : Des Iraquiens aident leurs compatriotes réfugiés en Syrie
DAMAS, Syrie, 31 décembre (HCR) - Dans un taxi collectif, deux femmes se trouvaient côte à côte, l'une âgée et visiblement désespérée, l'autre plus jeune, cultivée et extravertie. Elles ne se connaissaient pas. La plus jeune d'entre elles a toutefois vite remarqué qu'elles avaient quelque chose en commun : elles étaient toutes deux des réfugiées iraquiennes, à la dérive dans la capitale syrienne.
« Je lui ai demandé ce qui n'allait pas », explique aujourd'hui Lamia*, la plus jeune, devant une tasse de thé sucré iraquien. Maysoun*, la plus âgée, « avait perdu son passeport et elle s'était rendue dans plusieurs services administratifs. Elle était très fatiguée, alors je l'ai emmenée chez moi. »
Mais Lamia ne s'est pas arrêtée là ; elle a collecté de l'argent pour aider Maysoun et sa famille et elle a même fait le nécessaire pour qu'elle se fasse opérer gratuitement de calculs rénaux. C'est grâce à son ingéniosité, sa compassion et sa générosité que Lamia a obtenu il y a un an un poste de bénévole dans l'aide sociale à Damas, dans le cadre d'un programme innovant où les exilés iraquiens aident leurs compatriotes réfugiés.
Contrairement aux camps de réfugiés traditionnels dans lesquels le HCR peut facilement fournir des services à des dizaines de milliers de réfugiés au pas de sa porte, les Iraquiens en Syrie sont dispersés dans plusieurs grandes villes. Il leur est non seulement difficile d'accéder aux bureaux du HCR - en raison du manque de transport ou d'argent ou de leur mauvaise santé - mais le HCR peut également avoir des difficultés à les trouver.
« Une chose que l'expérience avec les réfugiés iraquiens au Moyen-Orient nous a enseignée est que nous devons fournir nos services avec des moyens nouveaux », a déclaré Zahra Mirghani, chargée des services communautaires pour le HCR en Syrie. « Les responsables des services communautaires ou d'autres personnes remplissant des fonctions similaires sont devenus de plus en plus importants, car un nombre croissant de réfugiés vit en milieu urbain plutôt que dans des camps. »
C'est là que Lamia et d'autres personnes comme elle entrent en jeu. En Syrie, sous la direction de Zahra Mirghani, le HCR a mobilisé 80 bénévoles, qui sont toutes des Iraquiennes, pour rendre visite chez eux à leurs compatriotes réfugiés, pour œuvrer en tant que travailleurs sociaux, pour fournir un soutien psychologique informel et pour attirer l'attention du HCR sur les besoins des réfugiés iraquiens. Ces 80 volontaires, ainsi que 12 bénévoles du groupe de soutien, renforcent la capacité du HCR pour s'occuper des personnes âgées, des handicapés, des enfants ou des adolescents vivant seuls et des personnes confrontées à des problèmes psychosociaux.
« Dans ce travail, le plaisir vient du fait que vous pensez moins à vos propres problèmes car vous êtes entièrement tourné vers les autres », a expliqué Lamia, âgée de 40 ans et qui était professeur d'anglais avant de fuir l'Iraq.
Le fait d'être réfugié peut être frustrant, a-t-elle admis, mais « le fait d'être un bénévole dans le domaine de l'aide sociale vous donne le sentiment d'avoir un objectif. Cela vous permet d'aider vos compatriotes ainsi que votre pays et cela vous donne l'impression d'être utile. »
La gentillesse qu'elle a manifestée envers Maysoun s'est transformée en un soutien continu et renforcé envers sa famille élargie. Aujourd'hui elle rend visite à Maysoun dans la maison d'un étage en béton qu'elle partage avec la femme syrienne qui était également mariée au mari défunt de Maysoun, ainsi qu'avec plusieurs fils de cette dernière et leurs familles.
La femme syrienne a accueilli Maysoun et la famille de son fils après leur fuite d'Iraq. Maintenant Maysoun et sa belle-fille Leïla* vivent dans une pièce minuscule - meublée simplement d'un réfrigérateur, d'une armoire et d'un lit - avec les quatre enfants de Leïla âgés de moins de six ans.
Le mari de Leïla est détenu par les forces armées en Iraq. « La Croix-Rouge, Dieu les bénisse, me transmet ses lettres », a-t-elle expliqué. « Je dois attendre entre cinq et six mois pour recevoir une lettre. »
Aujourd'hui, après des mois de discussion avec Lamia au téléphone, Leïla est contente de voir en personne sa bénévole pour l'aide sociale.
« Parfois les gens ont simplement besoin de parler », a déclaré Lamia plus tard. « Leur problème est peut-être sans solution mais ils veulent en parler. Donc je me contente de les écouter. J'essaie de leur faire comprendre que quelqu'un les écoute, que quelqu'un se soucie d'eux. »
* Noms fictifs pour des raisons de protection
Par Farah Dakhlallah à Damas, Syrie