Le HCR appelle à combler trois lacunes dans la lutte contre la violence sexuelle
Le HCR appelle à combler trois lacunes dans la lutte contre la violence sexuelle
LONDRES, Royaume-Uni, 13 juin (HCR) - Le Haut Commissaire des Nations Unies, pour les réfugiés, António Guterres, a appelé la communauté internationale à faire davantage pour mettre fin à la violence sexuelle dans les conflits par un changement de culture à l'échelle mondiale, par la fin de l'impunité et par un meilleur soutien aux victimes.
En s'adressant aux délégués participant à un sommet mondial de quatre jours pour mettre fin à la violence sexuelle dans les conflits, António Guterres a souligné jeudi les progrès réalisés ces six derniers mois, depuis qu'un appel à l'action afin de prévenir et d'agir a été lancé à Londres en novembre dernier.
Selon lui, les bonnes pratiques, dont l'initiative « Safe from the Start » dirigée par les États-Unis, progressent sur plusieurs fronts : suivi de la violence sexuelle et à l'encontre des femmes, traitement des victimes, nouvelles politiques, réponse opérationnelle accrue. Toutefois, le Haut Commissaire a souligné la nécessité de surtout s'attaquer à ce qu'il a appelé les « trois grandes lacunes ».
« Dans les gouvernements, les forces armées, l'appareil judiciaire et les organisations internationales, la culture est essentiellement mâle. C'est un obstacle qui empêche de comprendre exactement l'ampleur et la profondeur de la souffrance et qui doit être surmonté », a-t-il déclaré. « Ce problème est très grave et il ne se limite pas aux pays en développement. Nous voyons combien il est difficile de contrer la violence familiale dans les pays industrialisés. »
La deuxième lacune, selon António Guterres, est la culture de l'impunité pour les viols et autres violences sexuelles dans les zones de conflit. Les auteurs sont rarement arrêtés, poursuivis et punis. L'absence de soutien efficace et en temps voulu pour les survivantes et leurs familles constitue la troisième lacune importante, a-t-il déclaré au « Sommet mondial pour mettre fin aux violences sexuelles dans les conflits », dont les co-hôtes étaient Angelina Jolie, Emissaire du HCR, et le Ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague.
« Le manque de capacité est particulièrement grave en ce qui concerne le soutien psychosocial. C'est une immense lacune et des investissements massifs sont requis pour y répondre », a déclaré le Haut Commissaire, ajoutant que le sommet avait été une rare occasion de faire connaître au monde le caractère dramatique de ces lacunes.
La troisième journée de la réunion de Londres a réuni des représentants des gouvernements de 123 pays qui ont pris connaissance directement de la nature et de l'impact de la violence sexuelle dans les conflits, se sont penchés sur les recommandations d'experts et ont pu discuter des perspectives et des défis nationaux que représente la mise en oeuvre, dans leur pays, de la Déclaration d'engagement à mettre fin aux violences sexuelles dans les conflits, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies.
Angelina Jolie, Emissaire du HCR, a réitéré devant une salle bondée au Centre des congrès Excel de Londres pourquoi cette initiative est importante. « Nous sommes ici pour toutes les survivantes oubliées et cachées qui vivent dans la honte ou qui ont été abandonnées, et pour les enfants du viol », a-t-elle déclaré. « Nous voulons que le monde entier connaisse leurs histoires et comprenne que cette injustice ne peut pas être tolérée, et que les pleurs et la compassion ne sont pas assez. »
Angelina Jolie a appelé les délégués des gouvernements à passer de la condamnation à l'action en changeant et en améliorant les lois, en incluant la prévention de la violence sexuelle dans les programmes de formation de leurs forces armées et de leur police. Il leur faut également soutenir et appliquer un nouveau protocole international sur la documentation et l'étude de la violence sexuelle dans les conflits. Elle les a également invités à financer les efforts des Nations Unies et les projets des ONG qui travaillent avec les rescapées pour leur prodiguer une guérison émotionnelle et les aider à obtenir soutien et justice.
Mercredi, Volker Türk, Directeur au HCR de la Division pour la protection, a également évoqué le problème de l'impunité en soulignant la responsabilité des États dans les poursuites judiciaires contre ces crimes et la nécessité d'inclure les rescapées dans l'élaboration de mesures et de politiques visant à prévenir la violence sexuelle et à intervenir.
« Nous devons mieux suivre la réponse mondiale envers la protection des femmes et des filles dans les situations d'urgence. Nous devons réunir et écouter les survivantes », a déclaré Volker Türk, Directeur au HCR pour la protection internationale, aux délégués lors la deuxième journée du sommet. « Les réfugiées que j'ai rencontrées dans de nombreuses situations d'urgence ont parlé de la violence sexuelle et elles ont proposé des solutions », a-t-il ajouté.
La prévention et l'action face à la violence sexuelle et à l'encontre des femmes sont une responsabilité essentielle du HCR en matière de protection, et ces activités sauvent des vies. Cependant, c'est une forme de violence peu déclarée et souvent cachée, en particulier dans le contexte des déplacements forcés. La violence sexuelle et à l'encontre des femmes représente l'un des secteurs d'intervention les plus difficiles pour le HCR, et elle nécessite une coordination et une collaboration entre un large éventail d'acteurs.
« Nous constatons sans cesse que les risques de violence sexuelle et sexiste augmentent lorsque surviennent des conflits et des catastrophes », a déclaré M. Türk. Afin de contrer la violence sexuelle et sexiste dès le début des situations d'urgence, dans le cadre du projet « Safe from the Start », le HCR appuie le déploiement de fonctionnaires de haut niveau en charge de la protection. Ils ont pour mission la prévention et les réponses en cas de violence sexuelle et sexiste dans les opérations d'urgence, ainsi que combler les lacunes immédiates dans l'expertise technique. Volker Türk a également souligné la nécessité d'une formation cohérente sur la violence sexuelle et sexiste, qui sera obligatoire pour le personnel du HCR.
Par Andrej Mahecic à Londres, Royaume-Uni