Burundi : Le gouvernement ne respecte pas ses obligations en matière de droit international
Burundi : Le gouvernement ne respecte pas ses obligations en matière de droit international
Quelque 5 000 demandeurs d'asile rwandais au Burundi ont été renvoyés au Rwanda ces deux derniers jours (dimanche et lundi), laissant le centre de transit de Songore dans le nord du Burundi totalement vide. L'UNHCR n'a pas eu accès au centre de transit lors des départs lundi et ne peut donc pas confirmer qu'il s'agissait de départs volontaires.
L'UNHCR regrette vivement que, malgré ses appels réitérés à la modération et son engagement à collaborer au plus haut niveau avec les deux pays pour trouver une solution en accord avec les lois internationales, les autorités burundaises et rwandaises aient continué à procéder au rapatriement de toutes ces personnes dont l'accès lui a été refusé.
L'accès à des populations se trouvant dans une telle situation fait partie intégrante du mandat de l'UNHCR. Sans cela, nous ne pouvons pas remplir notre mission de protection. Nous refuser l'accès du camp de transit de Songore tandis que se déroulait l'opération de retour nous a empêchés d'avoir un contact direct avec les demandeurs d'asile pour vérifier si leur retour était réellement volontaire et en connaissance de fait. En outre, les autres agences des Nations Unies et les ONG n'ont pas non plus été autorisées à suivre in situ le déroulement de l'opération depuis lundi matin.
Les circonstances dans lesquelles les opérations ont été conduites, ainsi que les événements de ces dernières semaines, amènent à la conclusion que les demandeurs d'asile n'ont pas eu d'autre choix que celui du retour. Par conséquent, l'UNHCR ne peut considérer ces retours comme volontaires. Cela constituerait donc une violation du principe de non-refoulement clairement énoncé dans la Convention sur les réfugiés de 1951, signée tant par le Rwanda que par le Burundi.
Le rapatriement depuis Songore a commencé dimanche, après une annonce conjointe du Burundi et du Rwanda selon laquelle les deux pays considéraient désormais leurs demandeurs d'asile respectifs comme des « immigrants clandestins ou en situation irrégulière », bien qu'aucun examen individuel de demande d'asile n'a pu être effectuée. Les équipes de l'UNHCR étaient à Songore dimanche, lorsque quelque 800 personnes sont parties à bord de camions rwandais. Elles n'ont été témoins d'aucun acte de violence à l'encontre des demandeurs d'asile ce jour là.
Cependant, à son arrivée lundi matin, l'équipe de l'UNHCR s'est vue refuser l'accès au centre et n'a pu suivre l'évolution de la situation que depuis l'extérieur du camp. Elle a toutefois pu constater de visu que tout au long de la journée, des camions arrivaient au centre puis en repartaient, remplis de demandeurs d'asile. Certains d'entre eux auraient sauté de camions en marche tandis qu'ils roulaient vers la frontière rwandaise. En fin d'après-midi, les autorités ont déclaré que 4 787 Rwandais avaient quitté Songore à destination du Rwanda. Une information venue du Rwanda ce matin indique que les rapatriés ont été amenés dans la ville de Butaré. La plupart auraient passé la nuit dans un stade, alors que d'autres auraient été hébergés dans des baraquements militaires. Ils ont été ramenés dans leurs villages ce matin.
Les demandeurs d'asile rwandais ont commencé à arriver au Burundi en mars de cette année, pour, selon leurs dires, se mettre à l'abri de menaces suite à la mise en place des tribunaux locaux « gacaca » chargés de juger les auteurs du génocide de 1994 au Rwanda. L'UNHCR a maintes fois réitéré ses appels aux autorités burundaises afin que ces personnes soient transférées vers un lieu plus sûr, loin de la frontière, et a proposé de collaborer avec les plus hautes instances des deux pays pour trouver une solution satisfaisant toutes les parties concernées.
L'UNHCR est également très inquiet quand au sort de quelque 7 000 réfugiés burundais au Rwanda. à la suite des accords de ce week-end entre les deux Etats, ils pourraient eux aussi être désormais considérés comme « immigrants clandestins ou illégaux » risquant à leur tour d'être renvoyés dans leur pays contre leur gré. Nous demandons donc au Rwanda de ne pas opter pour une telle initiative et de faire en sorte que les réfugiés soient traités avec équité en vertu des termes de la Convention de 1951 sur les réfugiés et de la Convention de l'OUA de 1969 sur les réfugiés en Afrique.