António Guterres ouvre le dialogue international sur l'asile et la migration
António Guterres ouvre le dialogue international sur l'asile et la migration
Mardi 11 décembre 2007
GENEVE - Le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés António Guterres a ouvert, mardi, une réunion de deux jours avec les représentants de quelque 70 pays, dans le but de mieux garantir la protection des réfugiés qui se déplacent aujourd'hui aux côtés de millions de migrants dans le monde.
Avant l'ouverture de cette réunion au Palais des Nations Unies à Genève, António Guterres a demandé une minute de silence pour rendre hommage aux victimes des deux attentats à la bombe survenus mardi matin à Alger et qui ont causé la mort de dizaines de personnes, dont un employé de l'UNHCR. L'une des explosions s'est déroulée dans une rue, en face des bureaux de l'UNHCR et des bureaux principaux des Nations Unies à Alger (voir le communiqué de presse distinct, intitulé « Le Haut Commissaire de l'UNHCR António Guterres condamne les attentats d'Alger »).
« Les 10 millions de réfugiés que compte aujourd'hui le monde ne constituent qu'un modeste pourcentage des 200 millions ou davantage de personnes qui vivent à l'extérieur de leur propre pays », a déclaré António Guterres aux représentants réunis dans le cadre du premier d'une série de Dialogues du Haut Commissaire sur les défis de la protection. « Mais de plus en plus, ces réfugiés se trouvent pris dans des mouvements mixtes, avec les mêmes destinations, les mêmes itinéraires et les mêmes moyens de transport que les migrants. »
L'un des principaux défis est de s'assurer que les réfugiés contraints de fuir la violence et les persécutions puissent trouver la protection internationale à laquelle ils ont droit, alors que, dans le monde entier, les gouvernements luttent face aux mouvements migratoires qui s'amplifient le long de leurs frontières, a indiqué António Guterres. Les gouvernements doivent être en mesure de faire la distinction entre les personnes forcées à fuir et celles qui choisissent de se déplacer pour des raisons économiques, ou autres.
« Nous voulons garantir que ces personnes qui ont besoin d'une protection ont accès aux territoires d'autres Etats et sont en mesure de voir leur demande d'asile examinée dans le cadre de procédures justes et efficaces », a ajouté António Guterres. « Nous voulons nous assurer que les contrôles aux frontières sont effectués dans le respect des préoccupations en matière de protection et des droits des réfugiés. »
Evoquant les dizaines de milliers de boat people qui risquent leur vie chaque année en Méditerranée, dans le golfe d'Aden, dans les Caraïbes et au large des côtes de l'Afrique de l'Ouest, António Guterres a indiqué que l'UNHCR et ses partenaires souhaitaient promouvoir des mesures qui sauveront la vie des gens en détresse en haute mer et assureront leur débarquement sûr et rapide. Ce commentaire intervenait après la noyade, au cours du week-end, d'au moins 51 personnes dans les eaux agitées séparant la Turquie et la Grèce, un nombre de décès qui vient s'ajouter aux centaines de personnes qui ont déjà péri cette année en tentant de rejoindre l'Union européenne.
« Nous voulons que des mesures soient prises pour réprimer les trafiquants et veiller à ce que les victimes de ces crimes soient efficacement protégées », a indiqué le Haut Commissaire.
António Guterres a déclaré que le « Dialogue sur les défis de protection », organisé cette semaine par l'UNHCR, était la première d'une série de réunions du même genre visant à mettre à la disposition des gouvernements un forum ouvert et relativement informel, dans le cadre duquel ils pourront traiter de certaines des questions liées à l'asile et aux réfugiés auxquelles doit faire face le monde aujourd'hui. Plusieurs de ces défis s'inscrivent dans le cadre bien plus vaste des migrations internationales.
« La mobilité humaine s'accroît tant au plan de l'échelle que de la portée et de la complexité », a-t-il déclaré. « De nouveaux modes de déplacement se font jour, y compris une migration forcée, qui ne relèvent pas du droit international des réfugiés. Les Etats se déclarent partout préoccupés de l'impact de ces développements sur leur économie, leur sécurité et la cohésion de leur société. »
Selon le Haut Commissaire, le débat sur la mobilité et la migration n'est malheureusement pas toujours rationnel. Il a d'ailleurs relevé que « l'opportunisme électoral, le populisme et la presse à sensations se conjuguent pour empoisonner le débat sur cette question, encourageant la crainte, l'intolérance et le rejet. »
Tout en soulignant que l'UNHCR n'est pas une agence de la migration et n'a pas l'intention d'élargir son mandat, António Guterres a noté que les migrations ont néanmoins de « lourdes conséquences » sur la capacité de son agence à exercer son mandat en faveur des réfugiés.
« En créant un environnement mondial où les droits des migrants sont respectés, nous créerons également un environnement où l'UNHCR pourra exercer de façon plus efficace son mandat de protection des réfugiés et de solutions à leur sort », a-t-il dit.
« Nous devons reconnaître que dans la phase actuelle et très dynamique du processus de mondialisation, la migration est inévitable. Il est probablement illusoire de penser que les biens, les capitaux, les services et les informations peuvent circuler de plus en plus librement à travers les frontières nationales sans accroître simultanément l'échelle et la portée de la mobilité humaine. »
António Guterres a rappelé que la question de la protection des réfugiés et de la migration internationale n'est pas simplement une question de mouvements du sud vers le nord de la planète. La majorité des réfugiés du monde se trouvent dans les pays en développement et certains des mouvements migratoires les plus importants ont lieu dans l'hémisphère sud.
La migration internationale ne peut être efficacement gérée par les seuls contrôles aux frontières ou politiques de migration, a-t-il dit. Une démarche plus cohérente, plus globale et mieux intégrée est nécessaire, ainsi qu'une attention particulière à l'établissement de programmes de coopération au développement mieux coordonnés et ciblés, axés sur la réduction de la pauvreté, la création d'emplois, le renforcement des services publics et communautaires. Des efforts plus importants sont aussi nécessaires pour relever les défis de la prévention et de la résolution des conflits et de l'établissement de la paix. Le commerce international doit devenir un véritable instrument de développement. De nouvelles initiatives sont également nécessaires pour alléger les conséquences du changement climatique et permettre aux communautés de s'adapter aux modifications subies par leur environnement.
« J'encourage les Etats à reconnaître la nécessité d'établir un équilibre entre les contrôles efficaces aux frontières et la fourniture de possibilités supplémentaires de migration légale », a expliqué António Guterres. « Dans un environnement où prévaut la migration irrégulière, les trafiquants et passeurs ne peuvent que prospérer. La migration irrégulière ne peut être jugulée que si les candidats au départ peuvent espérer le faire de façon sûre et légale. »