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Pièces d'identité pour les réfugiés

Réunions du Comité exécutif

Pièces d'identité pour les réfugiés
EC/SCP/33

20 Juillet 1984

Introduction

1. Dans la plupart des sociétés modernes il est aujourd'hui nécessaire à la vie quotidienne de posséder une pièce d'identité. Selon les dispositions administratives en vigueur, il peut être indispensable d'apporter la preuve de son identité pour toute une série d'activités : faire enregistrer les naissances et les décès, contracter mariage, prendre un emploi, se loger, se faire admettre à l'hôpital ou obtenir des rations alimentaires, témoigner que l'on a droit à des prestations sociales, s'inscrire dans un établissement d'enseignement et demander la délivrance de documents et de permis officiels. Pour répondre à ces besoins, et aussi pour des raisons d'ordre publie, de nombreux paye ont institué un système de cartes d'identité nationales. Non seulement ces cartes permettent d'en identifier le titulaire, mais elles peuvent aussi donner la preuve de son état civil et de sa nationalité.1 En outre, dans presque tous les pays, les résidente étrangers installés légalement dans le pays reçoivent un permis de séjour, qui peut leur servir aussi de pièce d'identité.

2. Pour un réfugié, n'avoir pas de pièce d'identité peut être beaucoup plus qu'une source de désagréments. Dans presque tous les pays, l'étranger doit pouvoir prouver non seulement son identité, mais encore que sa présence dans le pays est légale. Dans certains pays, les étrangers qui n'ont pas les documents voulus peuvent être détenus, voire, expulsés sur le champ. Ces mesures sont particulièrement graves pour un réfugié qui risquerait ainsi d'être renvoyé dans son pays d'origine. Même lorsque l'absence de pièce d'identité a des conséquences moins radicales, le réfugié, pour bénéficier d'un traitement répondant aux normes internationalement reconnues, doit pouvoir témoigner vis-à-vis des représentants des pouvoirs publics, non seulement de son identité mais encore de sa condition de réfugié.

3. Etant donné les circonstances dans lesquelles ils sont parfois contraints de quitter leur pays d'origine, des réfugiés risquent peut-être davantage que d'autres étrangers de se trouver sans pièces d'identité. De plus, si d'autres étrangers peuvent s'adresser aux représentants de leur pays d'origine pour obtenir ces pièces, les réfugiés ne le peuvent pas et dépendent à cet égard des autorités du pays de refuge ou de l'assistance du HCR.

Pièces d'identité délivrées en application de la Convention de 1951

4. Depuis l'Arrangement du 5 juillet 1922, plusieurs des accords internationaux, concernant les réfugiés adoptés avant la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés, prévoyaient la délivrance aux réfugiés d'un certificat qui leur tiendrait lieu à la fois de pièce d'identité et de titre de voyage. Dans les premiers arrangements, ces documents ont été désignés par l'expression « certificats d'identité », mais ils étaient destinés avant tout à remédier à l'absence de passeport national et étaient en fait appelés communément « passeports Nansen ». Les arrangements conclus ultérieurement ont souligné chaque fois davantage le rôle important de ces documents pour faciliter les déplacements en provenance et à destination d'autres pays et, avec la Convention du 10 février 1938 est apparue l'expression « titre de voyage ».

5. Dans les accords, antérieurs, à la Convention de 1951, la délivrance de certificats d'identité ou de titres de voyage était en général limitée, à certaines exceptions près, aux réfugiés qui résidaient légalement sur le territoire des Etats contractants. Une approche un peu plus libérale, et globale a été adoptée dans la Convention de 1951, tant en ce qui concerne, les titres de voyage, prévus à l'art 28, que la question des pièces d'identité pour les réfugiés en général.

6. En vertu de l'article 28, les Etats contractants devront délivrer aux réfugiés résidant régulièrement sur leur territoire des titres de voyage, conformément à la Convention à moins que des raisons impérieuses de sécurité nationale ou d'ordre public ne s'y opposent. Les Etats sont aussi autorisés, voire encouragés, à délivrer ces documents à tout autre réfugié qui se trouve sur leur territoire et qui, autrement, n'aurait pas de titre de voyage. Malgré ces dispositions favorables de l'article 28, il n'en existe pas moins des situations où un réfugié ne peut se voir délivrer de titre de voyage conformément à la Convention. Pour que tous les réfugiés puissent obtenir une pièce d'identité, les auteurs de la Convention de 1951 ont ajouté l'article 27, ainsi conçu :

« Les Etats Contractants délivreront des pièces d'identité à tout réfugié se trouvant sur leur territoire et qui ne possède pas un titre de voyage valable. »

Ainsi, les Etats contractants doivent assurer à tout réfugié le moyen d'apporter la preuve de son identité : soit par un titre de voyage valable, comme il est prévu à l'article 28,2 soit par des pièces d'identité, conformément à l'article 27.

7. Il ressort des travaux préparatoires de la Convention de 1951 que l'objectif de l'article 27 est d'éviter à tous les réfugiés, même à ceux qui ne résident pas légalement sur le territoire d'un pays, de se trouver dans la situation très difficile où ils seraient s'ils n'avaient aucune pièce d'identité. Le représentant, de l'Organisation internationale pour les réfugiés à la Conférence de plénipotentiaires a insisté sur la nécessité de ces dispositions car « un homme sans papier est un paria, qui risque d'être arrêté pour la seule raison qu'il n'a pas de papiers. » Le représentant de la France a dit qu'en vertu de l'article 27, un réfugié en situation irrégulière doit recevoir au moins un document provisoire « qu'il peut présenter s'il est arrêté dans la rue, par exemple ».3

8. L'article 27 ne précise pas la nature des pièces d'identité qui doivent être délivrées. Il est clair qu'elles n'auront pas à conférer le droit de résidence et l'article 27 ne va même pas jusqu'à dire qu'il faut que l'intéressé soit identifié comme réfugiée L'article 27 dit simplement que tout réfugié doit pouvoir prouver son identité, et laisse l'Etat partie libre de déterminer la forme et le contenu précis à donner au document délivré.

Nécessité de la justification du statut de réfugié

9. Des pièces d'identité où ne figureraient que le nom, la date, le lieu de naissance et l'adresse du réfugié répondraient, littéralement, aux exigences de l'article 27 et lui épargneraient aussi certains des inconvénients de n'avoir pas de documents. Toutefois, aux fins de la protection internationale, il est souvent essentiel que ces pièces mentionnent également le statut de réfugié du titulaire. Il peut être d'importance vitale pour un réfugié de pouvoir justifier de son statut, notamment s'il est détenu lors d'opérations de police dirigées contre les étrangers dont la présence dans le pays est jugée illégale.

10. Outre qu'elles ont plus de valeur pour le réfugié, les pièces d'identité où leur statut est spécifié, sont également utiles aux autorités nationales chargées d'appliquer les dispositions de la Convention et du Protocole. En offrant aux autorités compétentes, en particulier au niveau local, le moyen de s'assurer sur-le-champ qu'une personne est un réfugié officiellement reconnu, ces documents facilitent là mise en oeuvre des politiques gouvernementales à l'égard des réfugiés et aident à prévenir les erreurs administratives concernant le traitement à leur appliquer.

11. L'importance qui s'attache à donner aux réfugiés le moyen d'apporter la preuve de leur statut a été reconnue par le Comité exécutif dans sa conclusion sur la détermination du statut de réfugié adoptée à sa vingt-huitième session (1977).4 Le Comité a recommandé, au nombre des exigences minimales auxquelles devraient répondre les procédures à suivre pour déterminer le statut de réfugié que si l'on reconnaît la qualité de réfugié à une personne, celle-ci devrait en être informée et recevoir un document certifiant son statut de réfugié.

Pratique des Etats touchant les pièces d'identité pour les réfugiés

12. Selon la pratique générale des Etats concernant les procédures établies pour déterminer le statut de réfugié, il est délivré aux réfugiés reconnus comme tels des documents apportant la preuve de leur identité et de leur statut. Le type de document fourni varie sensiblement et correspond en général aux documents délivrés aux ressortissant du pays ou aux étrangers résidant légalement dans le pays concerné. Quelques pays délivrent à tous les réfugiés reconnus comme tels le titre de voyage prévu par la Convention. Généralement, ces réfugiés reçoivent soit un certificat de réfugié soit une carte d'identité attestant leur statut. Souvent, ces documents témoignent aussi que le réfugié a le droit de résider et de travailler dans le pays. Plusieurs pays délivrent aux personnes a qui la qualité de réfugié a été reconnue un permis de séjour qui leur tient également lieu de pièce d'identité. Enfin, dans quelques pays où le système de la carte d'identité nationale ou du permis de séjour n'existe pas, toute personne à qui la qualité de réfugié est reconnue reçoit une lettre l'informant que sa demande d'asile et/ou de reconnaissance du statut de réfugié a été agréée.

13. Dans la plupart des Etats qui ne sont pas parties à la Convention ou au Protocole, les réfugiés n'ont aucun moyen de se faire officiellement reconnaître comme tels ou d'obtenir les pièces d'identité pour les réfugiés. En pareil cas, pour identifier les réfugiés et assurer leur protection, le HCR a parfois jugé nécessaire de délivrer un certificat attestant que le titulaire est considéré par le Haut Commissariat comme un réfugié relevant de son mandat. Bien que ces certificats délivrés en vertu du mandat du HCR soient juridiquement sans valeur dans les Etats concernés, les autorités de certains pays ont accepté d'accorder un permis de séjour aux réfugiés qui en sont détenteurs.

14. Une situation analogue se présente dans les pays qui, quoique parties à la Convention et au Protocole, continuent d'appliquer les limitations géographiques mentionnées à l'article 1.B.1) a) et à ne reconnaître les obligations qui découlent de la Convention qu'aux personnes qui sont devenues des réfugiés à la suite à événements survenus en Europe ». Dans ces pays, les certificats établis en vertu du mandat du HCR sont souvent délivrés à des réfugiés venus de régions autres que l'Europe.

Pièces d'identité pour les réfugiés faisant partie de groupes nombreux

15. Dans bien des Etats qui accueillent des groupes nombreux de réfugiés, le statut de ces personnes n'est pas déterminé à titre individuel. Dans plusieurs de ces Etats néanmoins les réfugiés hébergés dans des camps et des zones d'installation sont enregistrés et on leur délivre des pièces d'identité. En revanche, un nombre appréciable d'autres Etats confrontés à des arrivées massives de réfugiés n'ont pas jugé possible de leur délivrer clés pièces d'identité officielles quelles qu'elles soient. Il semble toutefois que, depuis quelque temps, on se rende mieux compte; de l'« importance qui, s'attache à délivrer aux réfugiés en cas d'arrivées massives, des pièces d'identités appropriées.

16. Dans le type de situations évoqué au paragraphe précédent, la délivrance de pièces d'identité aux réfugiés peut avoir lieu dans le cadre des programmes d'enregistrement. Enregistrer tous les réfugiés dans un pays et leur délivrer une pièce d'identité présente des avantages évidents, non seulement aux fins de la protection internationale, mais encore pour la planification et la mise en oeuvre des programmes; d'assistance et la promotion de solutions durables. Les autorités nationales de plusieurs pays où cette pratique n'existait pas avant ont donc entrepris, en coopération avec le HCR, appliquer des programmes d'immatriculation comprenant la délivrance de pièces d'identité. En 1983, le HCR a contribué au frais d'établissement de cartes d'identité pour les réfugiés dans plusieurs pays et, la demande de plusieurs gouvernements, a fait imprimer à leur intention environ 250 000 cartes d'identité.

17. La délivrance de pièces d'identité aux réfugiés dans certains Etats qui continuent à considérer les réfugiés et les demandeurs d'asile comme des « entrants illégaux » dont la présence dans le pays est irrégulière rose divers problèmes. En pareil cas, les réfugiés n'ont souvent aucune possibilité d'obtenir une pièce d'identité officielle, quelle qu'elle soit. Dans ces pays, des dispositions spéciales sont parfois prises au niveau local ou au niveau des camps, pour la distribution de rations par exemple; mais de très nombreux réfugiés n'ont pas de moyen légal d'apporter la preuve de leur identité.

Pièces d'identité pour les candidats au statut de réfugié

18. Pendant la période qui précède la détermination du statut de réfugié, il est évident que les demandeurs d'asile ont autant besoin de pièces d'identité appropriées que les réfugiés reconnus. Dans des conclusions antérieures, le Comité exécutif avait recommandé qu'un candidat au statut de réfugié « soit autorisé à rester dans le pays tant qu'il n'aura pas été statué sur son cas »,5 et avait réaffirmé l'importance fondamentale de l'observation du principe du non-refoulement dans le cas de personne qui risquent d'être en butte à des persécutions ... qu'elles aient ou non été officiellement reconnues comme réfugiées.6 Le risque d'expulsion ou de refoulement peut effectivement être plus grand pour le demandeur d'asile - dont le statut dans le pays n'a pas encore été régularisé et dont le droit à bénéficier du statut de réfugié n'a pas encore été déterminé - que pour un réfugié reconnu comme tel. Il s'ensuit donc que le demandeur d'asile doit recevoir des pièces d'identité appropriées afin que son droit provisoire d'être protégé contre le refoulement soit respecté et qu'il soit traité selon sa condition de réfugié

19. La plupart des Etats qui ont introduit des procédures officielles de détermination du statut de réfugié délivrent un certificat où il est spécifié que l'intéressé à demandé le statut de réfugiés. Les demandeurs d'asile peuvent utiliser ce certificat comme pièce d'identité provisoire jusqu'à ce qu'il soit statué sur leur cas.

Modèle de pièces d'identité

20. Il n'y a pas de modèle à respecter pour établir les pièces d'identité à délivrer aux réfugiés, mais elles doivent donner certaines indications pratiques si l'on veut qu'elles leur soient utiles pour prouver leur identité. Il faut que le fonctionnaire qui examine le document puisse reconnaître qu'il est authentique et que la personne qui le présente est bien celle à qui il a été délivré. Plusieurs méthodes permettent de vérifier facilement l'authenticité d'un document. Dans les spécifications prévues pour les titres de voyage établis en application de la Convention, par exemple, il est recommandé d'utiliser des formulaires imprimés sur papier spécial, pour que l'on puisse déceler immédiatement toute falsification. Des moyens moins perfectionnés, tels que l'usage d'un timbre ou d'un cachet officiel, suffisent d'ordinaire à prouver l'authenticité d'un document qui doit servir dans le pays qui le délivre.

21. Pour éviter l'usage abusif des pièces d'identité pour les réfugiés (par exemple, si elles tombent entre les mains de personnes autres que celles à qui elles sont destinées), la plupart portent maintenant une photographie incorporée et timbrée du titulaire. Si l'on ne peut utiliser cette méthode, la pièce peut porter un signe distinctif du titulaire, par exemple sa signature ou son empreinte digitale. Une lettre ou un certificat, qui n'offre aucun moyen de prouver que celui qui présente la pièce en est bien le titulaire autorisé, présente moins d'utilité pratique pour l'identification. Elle est néanmoins utile pour montrer le statut de son détenteur, à condition qu'il puisse prouver autrement son identité.

CONCLUSIONS

1. Il est important que les réfugiés possèdent des documents leur permettant d'attester leur identité. La nécessité de délivrer ces documents à tous les réfugiés est reconnue par l'article 27 de la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés.

2. Pour faire en sorte que les réfugiés noient traités selon les normes internationalement reconnues, il faut aussi que les personnes auxquelles le statut de réfugié a été reconnu se voient délivrer des documents attestant ce statut. La délivrance de ces documents a été recommandée dans la conclusion relative à la détermination du statut de réfugié que le Comité exécutif a adoptée à sa vingt-huitième session et qui est reproduite au paragraphe 53 6) du document A/32/12/Add.1.

3. Les candidats au statut de réfugié doivent recevoir un document provisoire attestant leur identité et le fait qu'ils sont autorisés à séjourner dans, le pays jusqu'à ce que l'autorité compétente ait statué sur leur demande.

4. Les pièces d'identité pour les réfugiés et les demandeurs d'asile doivent être délivrées sous une forme qui en empêche l'usage abusif et qui permette aux autorités compétentes de vérifier que l'utilisateur du document en est bien le titulaire autorisé.

5. Dans certains pays où aucune disposition ne prévoit la reconnaissance officielle du statut de réfugié, le HCR peut être appelé à certifier qu'une personne est considérées comme un réfugié relevant de son mandat.

6. La généralisation de la pratique consistant à enregistrer les réfugiés et les demandeurs d'asile lors d'arrivées massives et à leur délivrer des documents d'identité est très encourageante. Il faut espérer que les Etats qui ne l'ont pas encore fait entreprendront, le cas échéant, des programmes dans ce sens en coopération avec le HCR.


1 Dans les pays où les cartes d'identité nationales ne sont pas utilisées, on peut présenter d'autres documents pour apporter la preuve de son identité. : acte de naissance, quittances fiscales, carte de la sécurité sociale, carte de travail, etc.

2 Les dispositions de l'article 27 sont aussi respectées si le réfugié possède un titre de voyage valable autre que ceux qui sont délivrés en application de la Convention, par exemple un passeport d'étranger par un autre Etat.

3 E/AC.32/SR.38, page 24.

4 A/32/12/Add.1, par. 53(6).

5 Ibid., par. 53 6) a) vii),

6 Ibid., par. 53 4) ci.