Un camp de réfugiés au Kenya accueille le premier festival cinématographique de jeunes réfugiés en Afrique de l'est
Un camp de réfugiés au Kenya accueille le premier festival cinématographique de jeunes réfugiés en Afrique de l'est
KAKUMA, Kenya, 7 décembre (UNHCR) - Il y a encore du chemin à faire pour rejoindre Cannes, Venise ou Sundance, mais le festival cinématographique qui s'est tenu récemment au nord-ouest du Kenya a été un grand événement pour de nombreux réfugiés.
Ici, pas de luxueuses limousines pour accompagner des stars pomponnées aux premières, ni de séances photo où l'on se bouscule, ni starlettes en robe du soir. En revanche, à la fin du mois dernier, plus de cent personnes se sont rendues à pied ou en cyclopousse au cinéma de fortune, sous un toit de tôle, pour assister au Festival cinématographique de la jeunesse de Kakuma.
Une toile noire cachait la lumière d'un soleil rayonnant sur le camp de réfugiés, alors que le public, majoritairement jeune, était assis sur des bancs en bois. Cela ne diminuait en rien le plaisir de regarder l'action se déroulant sur le grand écran - après tout, il ne faut pas une salle climatisée pour apprécier les films.
Les organisateurs du festival d'un jour, Film Aid International et Cinereach, espèrent que cela pourra devenir une manifestation annuelle. Au programme de cette édition figuraient vingt courts-métrages réalisés par de jeunes réfugiés. « C'est la première fois que ce festival cinématographique se tient dans un camp de réfugiés en Afrique de l'est », a déclaré Charles Otieno de Film Aid, un organisme qui est l'un des partenaires d'exécution de l'UNHCR à Kakuma.
Ce sont des jeunes réfugiés du camp - accueillant quelque 90 000 réfugiés provenant de dix pays en Afrique - qui ont eu l'idée du festival. Ils voulaient filmer leurs histoires et les partager avec les membres de leurs communautés.
Charles Otieno a indiqué que leur intérêt a été éveillé lorsqu'ils ont participé à un projet de club vidéo, ayant pour but de rétablir la confiance et restaurer leur estime de soi, et parallèlement leur permettant d'exprimer ce qu'ils ressentent. Le club, lancé en 2002, apprend à de jeunes réfugiés l'utilisation basique d'une caméra et l'acquisition de compétences en montage. Il les encourage à raconter leurs expériences vécues par la vidéo. Quelque 350 jeunes gens ont participé à ces cours.
« Nous sommes tous originaires de différents pays, nous parlons des langues différentes et nous avons tous vécu différentes guerres. Par le film nous unissons nos voix et nous pouvons tous exprimer nos idées, nos sentiments et nos ambitions », a dit Idi Nuru, âgé de 20 ans, un membre du club. « C'est pourquoi le festival du film était important pour nous, car nous pouvons montrer notre travail aux autres », a-t-il ajouté.
Tous les films diffusés lors de l'inauguration du Festival de la jeunesse de Kakuma ont été écrits, réalisés, tournés et montés par des membres du club. Interprétés par d'autres résidents du camp, ils incluaient notamment des histoires d'amour, un récit édifiant sur la lutte contre le VIH /SIDA, un documentaire sur le rapatriement volontaire et un film sur la polygamie et les abus sur les enfants.
Tout comme les grands festivals de film, des prix ont été remis dans différentes catégories. Les lauréats des prix de la meilleure image et du meilleur scénario ont reçu des certificats de l'organisation Film Aid International basée aux Etats-Unis, qui a aussi promis des manuels scolaires sur le sujet de leur choix pour chaque membre des productions gagnantes. Le meilleur acteur et la meilleure actrice, le meilleur réalisateur et le meilleur directeur de la photo ont reçu des certificats, des caméras et des films.
Les compétences acquises au vidéo club pourrait aussi prouver son utilité lorsque les réfugiés auront finalement rejoint leurs pays d'origine ravagés. Quelque 80 pour cent des résidents du camp sont originaires du Sud-Soudan, où sont déjà rentrés des dizaines de milliers de réfugiés depuis la signature des accords de paix en janvier l'année dernière entre le Gouvernement soudanais et les rebelles de l'Armée populaire de libération du Soudan (APLS).
Le Sud-Soudan aura besoin de personnes ayant des compétences particulières pour aider la région à se relever après des années de conflit. Les élèves du vidéo club ici seront avantagés dès le départ. « Je veux devenir un journaliste lorsque je retournerai chez moi au Sud-Soudan », a indiqué Aliandro Lotok, âgé de 21 ans, ajoutant : « Les compétences que j'ai acquises dans le tournage et le montage me permettront de raconter au monde entier ce que vit mon peuple. »
Par David Mwagiru à Kakuma, Kenya