Des parents face à une dilemme cruel : leur survie et l'éducation de leurs enfants
Des parents face à une dilemme cruel : leur survie et l'éducation de leurs enfants
Camp de DJABAL, Tchad - Avec quatre enfants en âge d'être scolarisé, Zacharia Abakar Adam est pleinement conscient de l'importance de l'éducation. Il est également Président de l'APE (Association des Parents d'élèves) au camp de Djabal, à l'est du Tchad.
« L'éducation des enfants présents dans le camp est notre priorité principale », dit-il, notant qu'au cours des quatre dernières années d'exil, des parents, des instituteurs, des agences internationales et le Ministère tchadien de l'éducation ont fait tout leur possible pour que ces jeunes réfugiés puissent avoir accès à l'école primaire, au prix d'une lutte acharnée.
Les parents sont souvent pris dans un dilemme cruel sur la question d'envoyer ou non leurs enfants à l'école. « C'est toujours un sacrifice pour les parents de le faire. Pratiquement tout le monde dans le camp se bat pour avoir une vie décente », indique Zacharia, ce qui veut dire que les considérations économiques arrivent au premier plan. « Plusieurs parents emmènent leurs enfants pour qu'ils les aident à cultiver les champs. »
Durant la saison sèche, quelques-uns emmènent leurs enfants dans la ville de Goz Beida pour travailler dans des usines de vêtements, des briqueteries ou des restaurants afin de compléter le revenu de la famille. Quelques jeunes filles ont ainsi été embauchées en ville comme domestiques dans des familles tchadiennes. Même à la maison, elles sont accaparées par les corvées quotidiennes telles que la collecte de l'eau et le ramassage du bois, la préparation des repas, et la prise en charge de leurs plus jeunes frères et soeurs et des personnes âgées. De ce fait plusieurs enfants vont en classe de façon irrégulière.
Bien que l'école soit gratuite dans les camps de réfugiés, les parents n'ont pas les moyens d'acheter des uniformes à leurs enfants. « Les mères trouvent que c'est difficile d'acheter un uniforme scolaire pour leurs enfants », explique Zacharias. Un uniforme scolaire coûte 3 000 francs CFA (un peu plus de 6 dollars), mais la plupart des familles ont, en moyenne, cinq à six enfants en âge d'être scolarisés. Une famille peut dépenser jusqu'à 18 000 CFA (37 dollars) pour l'éducation de ses enfants.
Pourtant, Zacharia insiste sur l'obligation pour chaque parent d'éduquer ses enfants : « Au Darfour, il y avait peu d'infrastructures pour que les enfants puissent aller à l'école, et la plupart des parents étaient illettrés. Maintenant, les enfants savent lire et écrire. »
Mais il reste encore beaucoup à faire : « A la fin de l'école primaire, il n'y a pas de possibilité pour les élèves de continuer leurs études dans une école secondaire », se plaint-il, notant qu'il y a très peu de motivation de la part des élèves pour rester à l'école primaire alors qu'ils savent qu'ils ne poursuivront pas leurs études. L'UNHCR recherche des solutions pour que l'éducation secondaire existe dans le camp, notamment via la formation à distance par radio.
Comme d'autres parents, Zacharia ne voit pas aucune possibilité de rentrer au Darfour en ce moment. « Les assassinats et les enlèvements se poursuivent », dit-il. « Alors, il est préférable pour mes enfants qu'ils poursuivent leur éducation ici tant que la paix n'est pas revenue au Darfour. »