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Exposé du Prince Sadruddin Aga Khan, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, au Conseil économique et social (ECOSOC) (39ème Session)

Discours et déclarations

Exposé du Prince Sadruddin Aga Khan, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, au Conseil économique et social (ECOSOC) (39ème Session)

1 Mai 1966

Je suis particulièrement heureux, Monsieur le Président, de me retrouver ici aujourd'hui pour présenter comme chaque année, au Conseil Economique et Social, mon rapport à l'Assemblée générale sur les activités du HCR au cours de la période écoulée, Ce rapport donnant, je crois, un aperçu assez complet et détaillé des efforts déployés dans les divers secteurs où celui-ci est appelé à intervenir, je m'attacherai, comme de coutume, à dégager de cet ensemble d'informations et de faits ce qui me paraît le plus marquant.

La tâche première de cet office est, faut-il le rappeler, la protection des réfugiés. C'est pour remédier au handicap particulier qui affecte le réfugié dans sa vie quotidienne et qui résulte pour lui de l'absence d'une protection nationale effective, que l'Assemblée générale a confié en effet au HCR, il y aura bientôt quinze ans, le soin d'obtenir des gouvernements qu'ils octroient aux réfugiés un Statut leur assurant des conditions de vie décente et leur permettant de s'acheminer aussi vite que possible vers l'acquisition d'une nouvelle nationalité, si tant est qu'ils n'aient, dans l'intervalle, opté, en toute liberté, pour le rapatriement. L'expérience ayant prouvé toutefois, que la protection ne pouvait toujours, à elle seule, résoudre tous les problèmes, et qu'il pouvait en certains cas s'avérer nécessaire et équitable d'aider les pays d'accueil à surmonter les difficultés d'ordre social et financier résultant de l'afflux des réfugiés sur leur territoire et de l'attitude libérale adoptée par eux en ce qui concerne l'octroi de l'asile, l'Assemblée autorisa le HCR, quelques années plus tard, à recueillir des contributions volontaires pour aider à la. solution de ces problèmes. C'est sur cette base, et en tenant compte notamment de la responsabilité primordiale qui incombe en l'espèce aux pays d'accueil, que prit corps une forme d'action hautement diversifiée, reposant essentiellement sur l'esprit de solidarité internationale et sur le mécanisme destiné à le mettre en oeuvre. Ce mécanisme, dont le Haut Commissariat est l'un des éléments moteurs mais qui fait appel à bien d'autres concours, dont notamment celui des gouvernements des organisations internationales et des nombreuses agences bénévoles qui se dévouent à la cause des réfugiés, le HCR s'applique depuis lors à le maintenir constamment en état d'agir, lui fournissant pour cela le cadre, le support et le climat d'humaine compréhension dont il a besoin.

Envisagée de la. sorte, l'oeuvre de coopération internationale pour les réfugiés dépasse très largement, il va sans dire, l'aide limitée que peut lui-même fournir le HCR. Aussi bien son programme d'assistance, loin d'être une fin en soi, n'est-il qu'un moyen au service de la protection entendue au sens le plus large du terme, c'est-à-dire au service d'une tâche qui, le rapatriement volontaire mis à part, consiste avant tout à faciliter l'intégration des réfugiés dans les pays d'asile ou leur émigration à destination d'un autre pays où ils aient la possibilité de se réinstaller.

Les problèmes de réfugiés étant en constante évolution, tout comme les événements dont ils ne sont que le reflet amer, l'action du HCR doit évidemment s'adapter constamment aux exigences d'une réalité mouvante, avec laquelle il lui faut garder le contact. Il est significatif et réconfortant à cet. égard, Monsieur le Président, de constater que, placé soudain en face des multiples et angoissants problèmes suscités par les quelques centaines de milliers de déracinés qui ont surgi plus spécialement en Afrique, le HCR a pu cependant mener de front l'achèvement de l'oeuvre monumentale entreprise pour les « anciens » réfugiés européens et la mise sur pied du nouveau programme courant d'assistance. C'est ce programme courant, qui occupe maintenant l'avant-scène, dont il s'est appliqué, en 1964, à consolider les assises, en même temps que celui-ci gagnait rapidement en ampleur du fait de l'apparition de problèmes nouveaux et imprévus. Tout autant que les procédures ou les méthodes employées pour aider les gouvernements à résoudre ces problèmes, c'est le. concept même du programme courant qui a subi donc, avec succès semble-t-il, la rude épreuve des faits au cours de l'année qui vient de s'écouler, Il y a. sans nul doute, été aidé par les résolutions antérieures de l'Assemblée générale - je songe plus spécialement à la résolution 1673 (XVI) du 18 décembre 1961 - qui ont permis au HCR de faire usage, dans l'action de masse répondant aux données particulières de la situation intéressant les nouveaux groupes de réfugiés, de la procédure très souple des bons offices, réservée jusqu'alors à des réfugiés ne relevant pas du mandat du Haut Commissaire.

Si l'on considère les divers problèmes qui ont retenu l'attention du Haut Commissariat au cours de la. période écoulée, il est clair que le problème des réfugiés du Rwanda a, et de loin, dominé tous les autres, tant par ses dimensions que par sa complexité et par les rebondissements dont il a été l'objet en raison des événements dont certains des pays d'accueil de ces réfugiés ont été le théâtre, les troubles qui ont marqué la vie intérieure de la République démocratique du Congo ne pouvaient manquer notamment d'affecter les réfugiés qui avaient trouvé asile dans ce pays. La mise en oeuvre des plans élaborés pour l'établissement de ces réfugiés a dû donc être au moins partiellement suspendue dans les régions du Kivu plus directement touchées par ces événements. Ceux-ci ont amené d'autre part le gouvernement de la République démocratique du Congo à prendre à l'encontre des réfugiés du Rwanda une mesure d'expulsion qui, si elle n'a pratiquement pas été mise à exécution, n'en a pas moins gravement perturbé la masse de ces réfugiés en soulignant et en aggravant encore la précarité de leur situation. Nous espérons que cette mesure ne tardera pas à être rapportée et qu'ainsi pourra reprendre la mise en oeuvre normale du programme établi, avec l'accord et le concours du Gouvernement et en liaison avec le Bureau International du Travail, pour l'établissement sur place de ces réfugiés.

Au Burundi d'autre part, où l'installation de plus de 35.000 réfugiés s'avérait difficile en raison des dimensions et des ressources limitées du pays, des dispositions avaient été prises, à la demande instante du gouvernement, pour assurer le transfert de 10.000 d'entre eux en Tanzanie. Grâce à la généreuse compréhension du gouvernement, tanzanien, un plan d'installation dans la région de Mwesi avait été mis sur pied, la Fédération luthérienne mondiale se chargeant de sa mise en oeuvre. Lorsque le moment fut venu toutefois de procéder au transfert des intéressés, il apparut que leurs chefs tribaux étaient opposés à ce mouvement. Tous les préparatifs effectués en Tanzanie avec le concours généreux et efficace de l'organisation tanzanienne d'aide aux réfugiés, affiliée à la Fédération luthérienne mondiale eussent ainsi été vains si les autorités tanzaniennes n'avaient consenti à accueillir, aux lieu et place de ces réfugiés, un groupe de 3.000 autres réfugiés de même original mais en provenance du Congo. A la suite des événements dont j'ai parlé il y a un instant et du malaise qui en est résulté entre les autorités de la province du Kivu et les réfugiés du Rwanda, il s'est avéré indispensable en. effet, en vue de détendre quelque peu. la situation dans cette région, d'éloigner une partie des réfugiés qui s'y trouvaient, facilitant par là-même l'installation de ceux qui sont appelés à y rester. Les circonstances interdisant le franchissement par terre des frontières voisines, un pont aérien put, non sans quelques difficultés, être mis en place, et le dernier des 3.000 réfugiés en question est arrivé maintenant à destination.

Au Burundi donc, de nouveaux plans durent être mis sur pied pour faciliter l'installation des réfugiés ainsi demeurés sur place et de ceux qui, fuyant le Congo et ses troubles, étaient venus les rejoindre. Ces plans prévoient l'implantation de 25.000 réfugiés dans la région de Mugera. Etablis après consultation des experts des diverses organisations internationales compétentes, ils seront mis en oeuvre sous la haute, direction d'un organisme gouvernemental, le « Fonds Roi Mwanbutsa IV » et avec le concours opérationnel de l'Association internationale de développement rural outre-mer, une organisation belge sans but lucratif.

Quant au programme de développement rural mis sur pied antérieurement avec le Bureau international du Travail, les progrès en sont satisfaisants. Les équipes communes comprenant des réfugiés et des membres de la population locale sont maintenant au travail, défrichant et mettant an valeur des terres jusqu'alors incultes et procédant aux divers travaux d'équipement communautaire des centres d'établissement.

Les réfugiés du Rwanda au Congo et au Burundi n'ont certes pas été les seuls à bénéficier de l'attention du Haut Commissariat au cours des mois écoulés. Ainsi qu'on a pu s'en rendre compte à la lecture du rapport, d'autres gouvernements, confrontés à la leur tour avec des problèmes du même ordre, ont été amenés à faire également appel à son aide. Je citerai seulement, pour mémoire, l'Ouganda qui héberge quelque 50.000 réfugiés du Rwanda en plus de quelques milliers de réfugiés du Soudan et d'environ 30.000 réfugiés du Congo ; la Tanzanie ou 10.000 réfugiés de Mozambique s'ajoutent aux 15.000 Rwandais ; le Sénégal avec 50,000 réfugiés de Guinée portugaise ; la République Centrafricaine avec également quelques centaines de réfugiés du Soudan et du Congo.

Dans le même temps, bien sûr, notre Office continuait de vouer un constant intérêt à la situation des réfugiés européens, dont il s'agit notamment d'éviter l'accumulation dans des camps, cependant que se poursuivait, au prix d'efforts sans cesse renouvelés pour en terminer dans les délais prévus et vaincre d'ultimes difficultés apparues plus spécialement en Grèce, la mise en oeuvre du dernier grand programme consacré à ceux que, par opposition aux nouveaux arrivants, nous avons appelés les « anciens » réfugiés, Mais le rapport que vous avez sous les yeux, Monsieur le Président, donne sur chacun de ces problèmes et sur l'action engagée pour y remédier des indications suffisamment précises pour qua je n'aie pas a m'y appesantir de nouveau ici même.

Si je me suis attardé quelque peu donc sur les problèmes particuliers posés par les réfugiés du Rwanda en République démocratique au Congo et au Burundi, c'est à coup sûr en raison de leur importance, de leur acuité et de leurs incidences sur l'ensemble du programme, en même temps qua pour rendre compte au Conseil de certains de leurs développements les plus récents. Mais c'est aussi parce qu'ils fournissent un exemple particulièrement frappant de la complexité et de la mobilité des problèmes de réfugiés, tels qu'ils se posent aujourd'hui en diverses régions du continent africain. C'est enfin, Monsieur le Président, parce qu'on trouve là une excellente illustration des objectifs assignés à notre action et des méthodes employées pour les atteindre. Le premier de ces objectifs est évidemment d'encourager les pays africains dans la politique libérale et généreuse qu'ils ont dès l'abord adoptée, en dépit des innombrables difficultés qui sont les leurs, sur le plan de l'asile. Quant à l'orientation de notre action, elle est commandée par le genre de solution que les pays africains eux-mêmes entendent ou sont en mesure d'apporter aux problèmes qui les confrontent. En fait, cette solution réside d'une manière générale dans l'intégration sur place et plus précisément dans l'installation des réfugiés dans l'agriculture. Ainsi s'explique, avec le fait que nous nous trouvons la dans des pays en voie de développement, que le Haut Commissariat ait, dans le cadre des efforts qu'il déploie pour aider les gouvernements à mettre en place des programmes d'établissement rural pour les réfugiés, été amené à faire appel, beaucoup plus que par le passé, à la collaboration des organisations spécialisées des Nations Unies qui se trouvent à pied d'oeuvre, et dont l'action est orientée vers le progrès économique et social des pays intéressés. Ce sont, d'une manière habituelle, le Bureau de l'Assistance technique, l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture et le Bureau international du Travail, ainsi qu'éventuellement l'Organisation des Nations Unies pour la Science et la Culture et l'Organisation mondiale de la Santé. L'aide considérable reçue du Programme alimentaire mondial qui concourt ainsi, de manière substantielle et directe, à l'oeuvre d'assistance du HCR, mérite en outre une mention toute particulière.

Indépendamment des avis demandés aux. experts des organisations et de la collaboration que ceux-ci peuvent apporter à l'élaboration des programmes destinés aux réfugiés, il est fait en sorte que ces derniers puissent éventuellement s'inscrire dans le cadre plus général des plans intéressant l'ensemble de la population des régions où se trouvent les réfugiés. Ainsi s'instaure tout naturellement, aux divers échelons, une coordination de plus en plus poussée, coordination qui, faut-il le souligner Monsieur le Président, est tout à fait dans l'ordre des préoccupations du Conseil économique et social.

Le Haut Commissariat, ai-je besoin de le rappeler, est tenu par certains impératifs qui tiennent à la nature même de sa tâche. C'est ainsi que le facteur temps est pour lui essentiel lorsqu'il s'agit de permettre à des milliers et des milliers de déracinés de survivre et de subvenir au plus tôt à leurs propres besoins. Mais cela étant, et s'il est entendu que son action, tout comme sa compétence, est limitée aux. seuls réfugiés et à leurs problèmes, cela ne signifie pas qu'il puisse fermer les yeux sur les réalités qui les entourent. Lorsque le sort des réfugiés apparaît intimement lié à celui des populations locales comme cela est le cas fréquemment en Afrique, il se préoccupe donc tout naturellement de savoir ce quo deviendront les réfugiés après que les mesures plus ou moins sommaires, destinées à leur fournir un outil de travail et des ressources limitées mais immédiates, auront porté leurs fruits. Et c'est là où, de nouveau, il se tourne vers les instances spécialisées des Nations Unies en leur demandant, le cas échéant, d'aider les gouvernements a poursuivre l'oeuvre amorcée par lui, de telle sorte que l'intégration des réfugiés puisse être complétée et consolidée et que les réfugiés eux-mêmes, loin de demeurer un fardeau pour le pays d'accueil, puissent participer au progrès de son économie, enrichir et accroître utilement son potentiel humain. Telles sont les préoccupations qui inspirent notamment les programmes dont j'ai parlé et qui ont été élaborés avec l'aide du Bureau international du Travail et de la FAO pour le développement rural des régions du Congo et du Burundi où se trouvent la plupart des réfugiés qu'il s'agit d'y implanter. En passant ainsi, dès qu'il est possible, le flambeau à telle ou telle autre organisation qualifiée pour parfaire l'oeuvre à laquelle il a été associée, le Haut Commissariat se tient strictement dans la ligne de sa politique constante, telle qu'elle lui est dictée par son mandat et par les directives qu'il reçoit du Comité exécutif du Programme. Quant au programme lui-même, qui est l'instrument principal de cette politique, il garde le caractère strictement complémentaire et le rôle de stimulant, d'élément catalyseur qui, par la force des choses, doit demeurer le sien. L'importance des contributions d'appoint dont il est fait mention dans son rapport et qui viennent s'ajouter à l'effort financier du HCR, illustre parfaitement cet aspect complémentaire du programme. Celui-ci apparaît plus évident encore si l'on tient compte en outre de l'aide parfois considérable fournie en application d'accords bilatéraux, comme c'est le cas pour l'aide alimentaire en provenance des Etats-Unis, sans parler, bien entendu, de la collaboration fondamentale qu'apportent en toutes circonstances et dans tous les domaines les agences bénévoles à l'oeuvre internationale pour les réfugiés.

Quelque effort que déploie cependant le HCR pour susciter les concours les plus divers, l'accroissement des besoins résultant de la multiplication des problèmes ou de l'ampleur croissante prise par certains d'entre eux ont entraîné en 1965 une nouvelle augmentation de l'objectif budgétaire du programme courant d'assistance. Fixé tout d'abord à 3.200.000 dollars il a dû être ainsi porté récemment par le Comité exécutif à 3.500.000 dollars. Cet accroissement des besoins n'est pas sans poser un problème financier très sérieux sur lequel j'aimerais, Monsieur le Président, attirer l'attention des gouvernements ici représentés. S'ils peuvent être assurés que nous faisons en sorte de limiter au maximum l'effort financier qui leur est demandé, il me paraît légitime de leur demander, en contrepartie, de porter leurs contributions au niveau. nécessaire pour assurer le financement intégral de ce programme minimum, tel qu'il a été préalablement approuvé par le Comité exécutif. Sans doute est-il réconfortant de noter à cet égard que le nombre des pays contribuant au financement du programme s'est très sensiblement accru puisqu'il est passé de 35 en 1963 à 52 en 1964, chiffre dont on espère qu'il sera porté à la soixantaine d'ici la fin de la présente année. Mais on ne saurait se dissimuler que nombreuses sont, parmi ces nouvelles contributions, celles qui ne peuvent guère revêtir qu'un caractère symbolique. Aussi importe-t-il que les pays en mesure d'apporter au programme l'appui substantiel sans lequel il ne pourrait subsister, consentent à l'effort supplémentaire que requièrent les circonstances présentes.

J'ai parlé uniquement jusqu'à présent, Monsieur le Président, de ce qui constitue à proprement parler la fonction sociale du HCR et qui repose, en partie au moins, sur l'aide financière qu'il est en mesure d'accorder aux réfugiés et aux gouvernements des pays d'accueil. Mais, le Conseil ne l'ignore pas, cette aide n'a, dès l'origine, été conçue que comme un adjuvant de la protection, dont j'ai rappelé déjà qu'elle était la fonction première du HCR. C'est de la protection qu'en vérité procède l'assistance, même s'il est opportun de l'en distinguer afin d'y voir mieux clair dans des activités qui s'inscrivent tantôt dans le domaine juridique, tantôt dans le domaine social. Mais c'est assez dire quo le HCR ne saurait, sans se renier lui-même, oublier si peu que ce soit la mission qui lui a été confiée à cet égard, et qui constitue sa principale raison d'être. Aussi bien ne cesse-t-il d'y accorder tous ses soins, de suivre pas à pas l'évolution du droit concernant les réfugiés, intervenant ici, revendiquant là, suggérant ailleurs les changements et les améliorations qui lui paraissent à la fois nécessaires et compatibles avec les données générales de la situation, telle qu'elle se présente dans les différents pays où vivent les réfugiés relevant de son mandat. Il m'est agréable, à cet égard, de signaler l'adhésion récente de deux nouveaux pays, le Libéria et le Pérou, à la Convention de 1951 qui, s'appliquant aujourd'hui à 47 pays, est la véritable charte du réfugié. Nous venons en outre d'être avisés, et je suis heureux de pouvoir donner la primeur de cette nouvelle au Conseil, que la République démocratique du Congo a également décidé d'adhérer à la Convention. Sans doute quelques retouches pourraient-elles être utilement apportées à cette Convention en vue de confirmer notamment son caractère d'universalité grâce à l'élimination de la date limite, du 1er janvier 1951 qui fait obstacle à son application immédiate et automatique aux nouveaux groupes de réfugiés. C'est là une question sur laquelle s'est penché un colloque de juristes éminents, venus d'horizons très divers, et qui, réuni en avril dernier à Bellagio, a formulé à cet égard des recommandations qui faciliteront, j'en suis sûr, la recherche des moyens propres à adapter au mieux les textes aux réalités changeantes.

Le Conseil je l'espère ne m'en voudra pas, Monsieur le Président, si, dans ce bref exposé, j'ai sacrifié quelque peu aux aspects les plus préoccupants, les plus actuels de cette réalité quotidienne. Après l'Europe, c'est l'Afrique on effet qui est aujourd'hui le principal théâtre de ces événements qui, de manière hélas quasi-endémique, donnent naissance ici ou là aux problèmes de réfugiés. C'est vers elle donc que se tournent plus particulièrement nos regards ; c'est elle que nous aimerions pouvoir faire bénéficier des enseignements tirés de nos expériences passées. Parmi ces enseignements, il en est un auquel nous sommes plus particulièrement attachés : c'est l'évidente, l'absolue nécessité de traiter les problèmes de réfugiés en dehors de toute préoccupation politique, et, comme le dit le mandat, du HCR, sur un plan purement humanitaire. Aussi notre satisfaction est-elle grande lorsque nous voyons aujourd'hui l'Organisation de l'unité africaine avec laquelle nous avons maintenant des contacts suivis, se préoccuper de formuler certaines règles ayant trait aux incidences des problèmes de réfugiés sur les rapports entre Etats africains. Le souci exprimé à cette occasion d'éviter que ces problèmes ne constituent une source de conflits ou de frictions entre les pays rencontre, est-il besoin de le dire, les efforts déployés depuis longtemps déjà par le HCR.

C'est là en effet l'une des préoccupations que nous avons constamment présente à l'esprit lorsque, à la demande des pays d'accueil, nous recherchons avec eux les moyens de les aider à résoudre au mieux, et au plus tôt, les problèmes de réfugiés auxquels ils ont à faire face.