Note sur la sûreté du personnel du HCR
Note sur la sûreté du personnel du HCR
EC/48/SC/CRP.31
Description : 12ème réunion
NOTE SUR LA SURETE DU PERSONNEL DU HCR
I. INTRODUCTION
1. Le Haut Commissaire et le Haut Commissariat dans son ensemble continuent d'accorder la plus haute priorité à la sûreté et la sécurité du personnel de l'institution. Les assassinats, les arrestations, les détentions illégales et, dernièrement, les enlèvements de membres du personnel continuent de susciter de graves inquiétudes. L'an dernier, le Haut Commissaire a joué un rôle de premier plan dans l'action menée pour répondre au problème de la sécurité et de la sûreté du personnel. Ces initiatives ont débouché sur des mesures adoptées par la réunion de haut niveau du Comité consultatif pour les questions administratives (CCQA) qui s'est tenue le 9 février 1998, la réunion spéciale interorganisations sur la sécurité qui s'est tenue du 17 au 19 mars 1998 et le Comité administratif de coordination (CAC), qui s'est également réuni en mars 1998.
2. En souscrivant aux rapports de la réunion de haut niveau du CCQA et de la réunion spéciale interorganisations sur la sécurité, le CAC a rappelé l'importance qu'il attachait à la question de la sûreté et de la sécurité du personnel, et réaffirmé une nouvelle fois sa volonté d'améliorer la sécurité des membres du personnel du système des Nations Unies.
3. Le CAC a recommandé des mesures d'une vaste portée, dont l'application améliorera sensiblement la sécurité et la sûreté du personnel sur le terrain. Elles feront également la preuve que l'Organisation entend bien assurer que son personnel travaille dans les meilleures conditions de sécurité possible.
II. SECURITE ET SURETE DES REPRESENTANTS
4. A ses cinquante et unième et cinquante-deuxième sessions, l'Assemblée générale a adopté un certain nombre de résolutions (51/227, 52/126 et 52/167) concernant la nécessité de respecter les privilèges et immunités des représentants officiels de l'Organisation des Nations Unies ainsi que des institutions spécialisées et des organisations apparentées, la protection du personnel des Nations Unies, et la sûreté et la sécurité du personnel humanitaire.
5. L'enlèvement du représentant du HCR à Vladikavkaz, Vincent Cochetel, le 29 janvier 1998, a marqué une nouvelle détérioration importante des conditions de sécurité et de sûreté dans lesquelles le personnel sur le terrain travaille fréquemment. L'enlèvement a mis en évidence une fois de plus les risques encourus par le personnel humanitaire, qui continue de s'efforcer d'accomplir sa tâche, jusque et y compris dans les conditions les plus difficiles. Plus de 100 jours se sont écoulés depuis l'enlèvement, et à la date du 25 mai M. Cochetel était toujours retenu par ses ravisseurs, malgré des interventions au plus haut niveau gouvernemental. Divers efforts continuent d'être déployés pour obtenir sa libération, mais ils n'ont pas encore abouti à l'heure où est rédigée la présente note.
6. En adoptant les résolutions 52/126 et 52/167 sans procéder à un vote, l'Assemblée générale a clairement montré qu'elle se souciait vivement de la sécurité et de la sûreté du personnel humanitaire. Ce faisant, elle a demandé à tous les gouvernements et à toutes les parties dans les pays dans lesquels opère du personnel humanitaire de prendre toutes les mesures possibles pour faire en sorte que la vie et le bien-être de ce personnel soient respectés et protégés.
7. Un certain nombre d'instruments juridiques garantissent la sécurité et la sûreté des représentants du système des Nations Unies, notamment la Charte des Nations Unies (art. 100 et 105), la Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies, la Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, les Accords types d'assistance de base du PNUD et la Convention sur la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé. La sécurité et la sûreté du personnel restent néanmoins menacées dans bien des zones d'opérations du HCR.
8. Lorsqu'on passe en revue les pays où l'on estime que le personnel est tout particulièrement exposé, et que l'on tente d'analyser les raisons de cette insécurité, on peut se demander si les autorités locales sont informées des diverses protections juridiques dans le cadre duquel le personnel des Nations Unies travaille. Dans certains pays, il serait à l'évidence utile de disposer d'un programme d'information sur les protections juridiques qui soit d'une utilisation aisée. Des séminaires destinés aux hauts fonctionnaires et aux responsables de la police et de l'armée, sur le plan national et local, pourraient certainement être organisés, qui rappelleraient l'importance que le Haut Commissariat attache à la sûreté et à la sécurité de son personnel.
9. Dans un certain nombre de zones d'opérations du HCR les conditions sont telles que les principes du droit ne sont pas appliqués, ou le sont d'une façon qui augmente les dangers auxquels le personnel humanitaire est exposé dans ses activités. Dans ce contexte, le personnel est soumis en permanence à des conditions éprouvantes et le risque de troubles en chaîne dus au stress est très élevé.
10. Les dispositions prises à l'échelle du système pour assurer la sécurité et la sûreté du personnel sur le terrain, telles qu'elles ont été élaborées par le Bureau du Coordonnateur des Nations Unies pour les mesures de sécurité et qu'elles sont exposées dans le Manuel de la sécurité sur le terrain, sont très complètes. En particulier, la formule d'un Représentant officiel (RO) et d'une Equipe de gestion de la sécurité (EGS), oeuvrant ensemble à l'amélioration de la sécurité du personnel, s'est révélée très efficace, non seulement dans les périodes de crise mais aussi dans la gestion quotidienne des plans de sécurité par pays. Dans l'idéal, ils devraient participer à l'élaboration de ces plans.
11. Les dispositions qui ont été prises à l'échelle du système prévoient un Administrateur chargé de la sécurité sur le terrain/Conseiller pour la sécurité sur le terrain, dont les fonctions sont également précisées dans le Manuel de la sécurité sur le terrain. L'Administrateur chargé de la sécurité sur le terrain est responsable, dans le lieu d'affectation, de tous les arrangements matériels concernant le dispositif de prévention et d'intervention en cas de crise, et il rend directement compte au RO. En outre, il est tenu d'établir et de développer d'excellents contacts non seulement avec l'armée et la police nationale, mais aussi avec les responsables des autorités civiles locales. L'expérience a montré que dans les lieux d'affectation où les contacts étaient bons, la sécurité et la sûreté du personnel étaient sensiblement renforcées.
12. Le système onusien prévoit également des Conseillers pour la sécurité sur le terrain. Là où il n'y a pas de poste à temps complet d'administrateur chargé de la sécurité, et pour fournir au Ro et aux autres personnes concernées des conseils « à chaud », le Coordonnateur des Nations Unies pour les mesures de sécurité peut désigner des conseillers compétents en matière de sécurité sur le terrain. Les Conseillers se rendent également dans les bureaux extérieurs, dans le cadre de missions organisées par le Coordonnateur des Nations Unies pour les mesures de sécurité ou à la demande du RO, pour évaluer les besoins de sécurité ou fournir un appui le cas échéant.
13. La question de la sécurité et la sûreté du personnel local est de plus en plus préoccupante. Dans les zones d'opérations où la nature de l'urgence oblige à fournir une assistance durant une longue période, les membres du personnel local des bureaux de l'ONU sont parfois les seules personnes, parmi la population environnante, à toucher une rémunération aussi régulière. De ce fait, les employés locaux et leurs familles peuvent être plus facilement victimes d'actes de délinquance. Cela étant, ceux qui occupent des postes très qualifiés ou névralgiques courent en plus le risque d'être sollicités par des personnes plus haut placées dans la communauté locale, par exemple pour exercer des activités de renseignement. Le personnel de protection et de réadaptation, tout comme celui chargé de l'administration, des finances ou des ressources humaines, peut ainsi se voir demander des renseignements ou des emplois. L'expérience récente a montré que ceux qui occupaient un poste très qualifié ou névralgique n'étaient pas les seuls susceptibles d'être exposés. Du fait qu'ils sont parfois témoins d'incidents qui peuvent embarrasser les responsables locaux, les chauffeurs peuvent, eux aussi, devenir l'objet d'une attention dont ils se passeraient bien. Les membres du personnel local qui sont arrêtés courent de grands dangers, et rien ne devrait être épargné pour tenter d'entrer en contact avec eux le plus rapidement possible. Cela imposera parfois de prendre des initiatives au plan local et national, voire à l'échelle de l'ensemble du système des Nations Unies.
III. MESURES DEJA PRISES OU A PRENDRE POUR AMELIORER LA SITUATION DU PERSONNEL EN MATIERE DE SECURITE
14. Le HCR a unilatéralement mis en place deux outils de formation visant à améliorer la sécurité des membres du personnel. Le premier était un cours de formation des formateurs d'une semaine, auquel ont participé tous les CSPT du HCR et qui les a formés à dispenser la formation du système onusien en matière d'information sur la sécurité. On estime qu'en donnant cette qualification aux CSPT on augmente sensiblement les possibilités de formation du personnel humanitaire dans les lieux d'affectation les plus exposés, en particulier ceux où le HCR a dépêché des CSPT (la région des Grands Lacs en Afrique, l'ex-Yougoslavie et l'Europe de l'Est).
15. En outre, le Haut Commissaire a donné pour instruction que d'ici la fin de 1998 tous les délégués actuels et futurs et autres hauts fonctionnaires reçoivent une formation sur la façon de gérer la sécurité du personnel à l'extérieur des grandes villes. Ce programme de formation, qui se déroule sur deux jours et couvre les principaux aspects de la gestion de la sécurité, est destiné aux responsables de haut niveau qui encadrent du personnel dans des régions isolées. L'un des cours du programme a déjà été organisé à Mexico, et deux autres sont prévus pour la mi-juin à Dubaï et à Bangkok.
16. Outre les deux nouveaux programmes de formation susmentionnés, le HCR continue d'organiser un stage de formation d'une demi-journée sur les questions de sécurité, destiné à tous les membres du personnel nouvellement recrutés, et il élargit actuellement cette formation aux membres des Equipes d'intervention d'urgence (EIU). La formation qui leur est dispensée à l'heure actuelle comprend des exposés et des discussions, ainsi qu'une demi-journée d'exercice de simulation de terrain. Lorsque c'est possible, les membres d'une EIU qui doivent accomplir une mission bénéficient également, juste avant leur départ, d'une séance d'information sur la sécurité dans le pays où ils se rendent.
17. De surcroît, depuis le 1er janvier 1998, le personnel local du HCR est, lui aussi, couvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre par l'assurance contre les actes de malveillance. Cette extension de couverture a été adoptée par le système commun des Nations Unies le 1er avril 1998, comme suite à la recommandation que le CAC avait adoptée à sa réunion du 26 mars à Genève.
18. En ce qui concerne l'ensemble du système des Nations Unies, le CAC a recommandé un certain nombre d'améliorations de la sécurité du personnel qui sont actuellement étudiées ou mises en oeuvre par le HCR. On trouvera ci-après un résumé de ces mesures.
A. Exécution au sein de chaque organisation d'un poste/chapitre budgétaire unique pour financer les dépenses de sécurité
19. Les membres du personnel chargés de la gestion des ressources humaines, de la sécurité et des finances recherchent actuellement la façon la plus efficace de mettre en oeuvre cette recommandation.
B. Formation à la sécurité, de caractère obligatoire, pour l'ensemble du personnel des lieux d'affectation particulièrement exposés
20. Le HCR considère que ses deux programmes spécifiques évoqués plus haut sont complémentaires à cette recommandation concernant la formation en matière de sécurité, qui sera mise en oeuvre par le Bureau du Coordonnateur des Nations Unies pour les mesures de sécurité. Ledit Bureau met actuellement en place des équipes de formateurs qui seront affectés dans tous les lieux particulièrement exposés. Les différentes organisations participeront au financement, qui sera calculé à partir des statistiques de personnel du CAC portant sur les effectifs de ces lieux d'affectation.
C. Création d'un groupe de travail qui devrait examiner les capacités opérationnelles des Administrateurs chargés de la sécurité sur le terrain
21. Ce groupe de travail devrait se réunir à New York à la fin de mai 1998, sous la présidence du Coordonnateur des Nations Unies pour les mesures de sécurité. Le HCR, qui a une vaste expérience en matière de sécurité du personnel sur le terrain, devrait apporter une contribution importante aux travaux du groupe de travail.
D. Etablissement de normes opérationnelles minima en matière de sécurité
22. Cette recommandation du CAC doit être appliquée sans plus attendre, en particulier par les institutions qui travaillent en première ligne - UNICEF, PAM et HCR - en étroite consultation avec le Bureau du Coordonnateur des Nations Unies pour les mesures de sécurité. L'expérience sur le terrain a montré qu'il existait une multitude de points de vue sur la définition à donner aux normes en question, eu égard à la nécessité de faire face aux problèmes posés par les contingents de réfugiés qui, bien souvent, ont été abandonnés de tous sauf des organisations humanitaires. Toutes les instances concernées devront faire preuve de beaucoup de doigté pour concilier la nécessité d'affronter les problèmes et celle de réduire au minimum les risques encourus, notamment dans les régions où l'ordre public est troublé, et pour faire accepter cet équilibre à l'ensemble des acteurs de la scène humanitaire.
E. Mise en place de mesures visant à assurer la sécurité du personnel recruté localement
23. Le HCR souscrit pleinement aux orientations actuelles qui sont exposées dans le Manuel de la sécurité sur le terrain, s'agissant de la sécurité du personnel recruté localement. Le Haut Commissariat continue d'appliquer des mesures initiées il y a plusieurs années pour intégrer le personnel national dans des systèmes de surveillance, développer des activités de gestion de la sécurité et identifier des points de concentration et de transfert. Des dispositions ont été également prises pour assurer que les mesures d'assistance financière destinées au personnel recruté localement soient rapidement et pleinement appliquées, dans le cas où des difficultés soudaines imposent une suspension des programmes et/ou l'évacuation ou le transfert du personnel.
F. Création d'un fonds d'affectation spéciale pour la sécurité par le Bureau du Coordonnateur des Nations Unies pour les mesures de sécurité
24. Malgré la bonne volonté et la concordance de vues de tous les intéressés, l'application des mesures de sécurité du personnel qui revêtent un caractère d'urgence continue de pâtir de la pénurie chronique de crédits rapidement disponibles. L'aval donné par le CAC à la création d'un fonds d'affectation spéciale pour la sécurité visant à compléter les mécanismes de financement existants dans ce domaine vient à point nommé. Le HCR contribuera à l'entreprise en veillant à ce que les Etats membres soient informés de l'existence de ce fonds et de la nécessité de leurs contributions.
IV. ARRESTATION ET DETENTION DE REPRESENTANTS
25. Dans un certain nombre de zones d'opérations, la pratique qui consiste à arrêter et à détenir des membres du personnel se perpétue. Il est parfois impossible de communiquer avec ces personnes pendant des périodes plus ou moins longues. Dans un cas précis, il n'est toujours pas possible de rendre visite à l'intéressé bien qu'il soit détenu depuis le 18 avril 1998 sans être inculpé. En fait, le HCR a été informé le 25 avril 1998 que l'employé en question avait été blanchi de « toute allégation » et serait mis en liberté prochainement. A ce jour, malgré les assurances données à plusieurs reprises concernant sa libération imminente et des interventions au plus haut niveau, il est toujours en détention.
26. Le CAC a examiné les aspects juridiques de la sûreté du personnel et a porté la question devant les conseillers juridiques du système des Nations Unies. Ces derniers se sont réunis à Washington en janvier 1998. Le CAC a fait siennes les conclusions auxquelles ils sont parvenus et les a priés de continuer à examiner le lien entre sûreté des membres du personnel et protection juridique au titre des différents instruments relatifs aux privilèges et immunités.
V. SECURITE ET SURETE DU PERSONNEL DANS LE FUTUR
27. Lorsqu'on examine les conditions de sécurité et de sûreté dans les zones d'opérations du HCR, en particulier dans les zones très exposées comme celles où est appliquée la politique d'assurance contre les actes de malveillance, il n'y a apparemment guère de raisons d'espérer une amélioration rapide de la situation sur le terrain.
28. Dans un grand nombre de lieux, le personnel des organisations humanitaires travaille dans des circonstances et des conditions dans lesquelles les responsables de l'armée ou de la police hésiteraient à déployer des effectifs. Le courage dont les membres du personnel humanitaire font preuve sans relâche n'est plus à démontrer. Ils n'abandonnent que très rarement leur poste, et uniquement lorsque les conditions sur le terrain sont devenues absolument intolérables. Si l'on veut garantir dans toute la mesure du possible la sécurité de ces personnes courageuses, il faut utiliser pleinement et sans attendre tous les moyens susceptibles d'y contribuer : allocation de fonds, application des instruments juridiques, activités de formation, mise à disposition de tous les équipements nécessaires, activités de sensibilisation à tous les niveaux, mise au point et application de techniques de maîtrise des tensions, augmentation des niveaux d'effectifs, amélioration de la coopération interorganisations, etc.
29. Le Bureau du Coordonnateur des Nations Unies pour les mesures de sécurité a toujours fait montre des qualités d'encadrement et de professionnalisme nécessaires pour gérer les nombreuses crises qui ont éclaté dans le passé. Il convient de saluer son taux de réussite, qui est exceptionnel. Le HCR considère qu'il est capital de renforcer son rôle pour assurer dans le futur la sécurité et la sûreté du personnel des Nations Unies. Les compétences et la capacité de coordination dudit Bureau, l'utilisation optimale des moyens mentionnés précédemment et la mise au point d'un ensemble de normes opérationnelles minima en matière de sécurité devraient permettre de gérer efficacement les risques inhérents à l'octroi d'une aide humanitaire.