Ne laissez pas la pandémie de Covid-19 ruiner l'éducation des réfugiés
Ne laissez pas la pandémie de Covid-19 ruiner l'éducation des réfugiés
Dans une transmission vidéo à l'Assemblée générale des Nations Unies qui se réunit virtuellement pour la première fois, Mo Salah, la star du football égyptien, et le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés Filippo Grandi ont exhorté la communauté internationale à faire en sorte que la pandémie de Covid-19 ne prive pas des millions de jeunes réfugiés de l'accès à l'éducation.
« Nous devons nous assurer que tous les jeunes, y compris les réfugiés, reçoivent une éducation », a déclaré Mohamed Salah, ambassadeur du programme du réseau Instant Network Schools (INS) de la Fondation Vodafone et du HCR qui fournit des outils et des services en ligne dans les camps de réfugiés. « Il est temps de nous assurer que les élèves réfugiés ne soient pas laissés pour compte »
Mary Maker, qui a fui un conflit armé dans son enfance, ainsi que quatre jeunes réfugiés en Afrique de l'Est ont soutenu plusieurs appels présentés cette semaine par Mohamed Salah et Filippo Grandi en rappelant l'espoir que l'éducation représente pour des millions d'autres réfugiés.
« L'éducation et une planche de salut pour tous les enfants. »
Selon un rapport publié ce mois par le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, le taux de scolarisation au primaire des enfants réfugiés était l'an dernier de 77%. Seuls 31% des jeunes en âge de fréquenter l’école secondaire y étaient effectivement inscrits, ce qui représentait une augmentation de 2% par rapport à l'année précédente. Enfin, 3% des réfugiés étaient inscrits à l'université ou dans d’autres établissements d'enseignement supérieur.
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La pandémie de Covid-19 s'est révélée la crise la plus dommageable de l'histoire récente en interrompant l'éducation de 1,6 milliard d'élèves, dont jusqu'à 7 millions de réfugiés.
« L’éducation est une planche de salut pour tous les enfants et surtout pour ceux qui ont été forcés de fuir la violence et la persécution », a déclaré Filippo Grandi. « La pandémie de Covid-19 rend malheureusement l’accès à l’éducation encore plus difficile, notamment pour les enfants réfugiés qui étaient déjà deux fois plus susceptibles d’être déscolarisés que les enfants non réfugiés. »
Alors que les élèves retournent à l'école dans de nombreuses régions du monde cet automne, le Fonds Malala s'appuie sur des données du HCR pour tirer la sonnette d'alarme et montrer que près de la moitié des filles réfugiées en âge de poursuivre des études secondaires dans des pays en développement (où vit la majorité des réfugiés) à travers le monde risquent de ne jamais retourner à l'école. En modélisant d'anciennes épidémies et d'autres informations, le rapport montre que l'affaiblissement des économies contraint de nombreux enfants, surtout des filles, à abandonner leurs études pour ramener de l'argent à leurs familles. Le rapport constate également que les filles de 12 à 17 ans assument des tâches ménagères supplémentaires, sont davantage à risque d'exploitation sexuelle et connaissent des taux plus élevés de grossesse précoce après une pandémie.
Mary Maker, une ancienne réfugiée sud-soudanaise qui enseigne dans le camp de réfugiés de Kakuma au Kenya, étudie aujourd'hui aux États-Unis et compte désormais parmi les sympathisants du HCR. Ayant connu les « souffrances insupportables » d'une enfance passée dans un camp de réfugiés, elle a rappelé que le Covid-19 menace de réduire à néant les progrès de la scolarisation des enfants réfugiés, notamment des filles.
« Les femmes se trouvent dans des espaces de vulnérabilité où elles sont confrontées à la violence sexiste. Elles vivent dans des espaces où elles ont le sentiment que la pauvreté a littéralement pris le contrôle de leur existence et qu'il est nécessaire qu'elles sortent de là », a déclaré Mary Maker au micro de Femi Oke, pour l’émission The Stream d’Al Jazeera. « Les filles doivent faire le choix de sauver leurs parents en épousant des hommes qu’elles ne connaissent souvent pas ou d'attendre et de subir la pauvreté. »
Durant la même interview, Filippo Grandi s'est fait l'écho des préoccupations de Mary Maker.
« J'étais au Liban il y a quelques jours, un pays où une personne sur quatre est réfugiée », dit-il. « Des parents m'ont dit, les larmes aux yeux, qu'ils ne pouvaient plus envoyer leurs enfants à l'école parce qu'ils devaient les envoyer travailler. »
Filippo Grandi a exhorté la communauté internationale à inclure les réfugiés et les autres personnes déplacées dans les réponses socio-économiques, sanitaires et autres au Covid-19.
« Les jeunes filles doivent faire le choix de sauver leurs parents en épousant des hommes qu’elles ne connaissent souvent pas ou d'attendre et de subir la pauvreté. »
À travers le monde, de jeunes réfugiés mettent au point des méthodes novatrices pour continuer d'étudier malgré la pandémie. Au camp de réfugiés de Dadaab au Kenya, une enseignante réfugiée somalienne diffuse ses cours à la radio. En Bolivie, le HCR et ses partenaires ont mis en place une salle de classe mobile qui permet d'amener l'enseignement aux enfants vénézuéliens vivant dans des foyers de réfugiés. Au camp de réfugiés d'Inke en République démocratique du Congo, les enseignants dispensent leurs cours en plein air en s'assurant de maintenir une distance de sécurité par rapport à leurs élèves.
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Durant leur conférence en ligne, Filippo Grandi et Mohamed Salah ont souligné que les technologies (tablettes, ordinateurs portables, postes de rechargement et Wifi) avaient permis aux réfugiés de rester connectés à leurs enseignants, à leurs camarades de classe et aux outils pédagogiques. Dans un appel vidéo enregistré, ils ont exhorté les dirigeants mondiaux à les soutenir pour s'assurer de l'accès de tous à l'éducation, sur un pied d'égalité, rappelant ainsi le quatrième des 17 objectifs de développement durable (ODD) adoptés par les États membres des Nations Unies en 2015, dans un effort concerté pour ralentir ou enrayer le changement climatique, mettre fin à la pauvreté et éliminer l'inégalité d'ici 2030.
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Accompagné de quatre étudiants réfugiés originaires du Kenya, du Soudan du Sud et de la Tanzanie, Mohamed Salah a enregistré un discours qui a été diffusé à l'ouverture de la Zone d'action des ODD, une conférence virtuelle de deux jours destinée à susciter une « décennie d'action » en vue de la concrétisation des objectifs du développement durable.
« Le camp de réfugiés de Kakuma compte de nombreux talents, de futurs médecins, de futurs chercheurs. La seule façon de connaître ces talents, c'est de les soutenir », a déclaré Luel, un réfugié sud-soudanais de 18 ans qui est passionné de biologie et rêve de devenir médecin.
Fatna, une réfugiée soudanaise de 20 ans qui vit au camp d'Ajuong Thok, à Jamjang au Soudan du Sud, se souvient qu'elle devait écrire dans la terre quand elle a commencé sa scolarité dans le camp. Aujourd'hui, elle rêve de devenir médecin et de mettre sur pied un système de prise en charge des orphelins. Elle a exhorté les dirigeants mondiaux à soutenir l'éducation des filles. Elle qui adore jouer au football, elle a confié à Mohamed Salah qu'elle lui avait volé certains de ses déplacements avant et qu'elle porte le maillot 11 comme lui.
« Je suis d'accord avec elle », a déclaré Mohamed Salah. « Elle demande aux dirigeants de la planète que les filles puissent avoir une bonne éducation, comme tout le monde. »