Un champion de lutte syrien aux prises avec un nouveau défi en Égypte
Amir Awad n'en est pas à son premier combat. Après un premier tournoi de lutte disputé à 11 ans dans sa Syrie natale, il s’est progressivement hissé jusqu’au sommet dans sa discipline et devenu champion syrien, arabe et panasiatique de lutte.
Lorsque le conflit a éclaté en Syrie en 2011, il a été confronté à des défis d’une tout autre nature. Son épouse Enas était enceinte et en 2012, elle a quitté leur maison, dans la ville syrienne d'Idlib, pour aller vivre avec des proches en Égypte, tandis qu'Amir et leur jeune fils Daniel restaient au pays.
Après l'explosion d'une roquette dans un quartier proche de leur maison, Amir et son fils ont quitté la Syrie et se sont installés en Égypte comme réfugiés. Amir, son épouse, leur fils et leur petite fille nouvelle-née vivaient dans la maison de son beau-père à Alexandrie ; mais Amir se demandait comment subvenir aux besoins de sa jeune famille et l'idée de rejoindre l’Europe par la mer a commencé à l'obséder.
« Je voulais aller en Europe et, une fois là-bas, faire venir ma famille. Je ne pensais plus qu’à ça », explique Amir. « Mais quand j’imaginais ce que serait d'abandonner mon épouse et mes enfants et être loin d'eux, ou de les emmener et de les mettre en danger, la peur était beaucoup plus forte que ma faim [de partir]. »
« En tant que champion, mon devoir maintenant c'est de former des futurs champions, de continuer ce que j'ai fait. »
Mais au lieu de ça, Amir a trouvé un emploi de caissier dans un restaurant local, avant de devenir cuisinier. Le hasard a fait que certains de ses collègues syriens étaient aussi des sportifs et tous ensemble ils ont eu l'idée de créer un centre sportif pour réfugiés syriens à Alexandrie.
En 2015, après avoir trouvé un local et organisé quelques manifestations sportives, Amir et ses amis ont pris contact avec le HCR, l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés, par le biais de Caritas, son ONG partenaire locale, pour demander de l'aide. Le HCR leur a fourni les fonds nécessaires pour équiper le centre et a offert une formation à Amir et à ses associés pour gérer le projet.
« Ce que le HCR essaie de faire pour nous, c'est qu'au lieu de nous donner un poisson chaque jour, il nous a appris à pêcher », explique-t-il. « Ils nous ont proposé d'entraîner certains groupes d'âge gratuitement pendant trois mois et ils nous ont financés pendant que nous nous faisions un nom et que nous attirions le public. »
Aujourd'hui, le centre est ouvert aux réfugiés syriens ainsi qu’à la population égyptienne locale et il offre des cours quotidiens de lutte, de kickboxing, de taekwondo, de karaté et de gymnastique, tandis que l’épouse d’Amir, Enas, ex-ballerine, anime des classes de zumba et d'aérobic destinées aux femmes.
Amir espère pouvoir continuer la lutte au plus haut niveau et il rêve encore de participer un jour aux Jeux olympiques. Mais l’académie lui a aussi apporté un autre rêve : former des futurs champions et utiliser le sport comme moyen pour dissuader les autres de risquer la traversée maritime périlleuse vers l'Europe.
« En tant que champion, mon devoir maintenant c'est de former des futurs champions, de continuer ce que j'ai fait », explique-t-il. « Pour leur montrer qu'il n’est pas nécessaire d’être en Allemagne ou en Angleterre pour réussir et pour que les gens voient ce qu'on sait faire. »
Contributions supplémentaires de Nora Ibrahim