Fuir à tout prix les gangs de rue meurtriers en Amérique centrale
Fuir à tout prix les gangs de rue meurtriers en Amérique centrale
MEXICO, (HCR) – Quand elle était officier de police au Salvador, Caroline* travaillait dans une unité de protection des victimes d'enlèvements et des témoins des meurtres, afin qu'ils puissent aider à traduire les auteurs des crimes en justice. Mais un jour les voyous se sont tournés contre elle.
Les membres d'un puissant gang de rue l’ont traqué vers son lieu de travail et chez elle puis ils ont menacé de la tuer. Poussé à déménager à plusieurs reprises, elle a vécu dans la peur constante qu'elle serait assassinée un jour en pleine rue.
« J'aimais mon travail car j'aimais protéger d'autres personnes », explique-t-elle. « Mais j’avais également peur à chaque fois que je me rendais à mon travail, je laissais mes enfants et je ne savais pas si je reviendrais. »
Du fait de son travail pour la police, elle savait comment les gangs enlèvent, menacent, extorquent et tuent les proches, et recrutent leurs enfants - souvent quand ils sont encore à l'école.
Lorsque les membres de gangs ont commencé à harceler son fils de 13 ans, Juan, * Carolina sentait qu’il n’y avait plus d’autre solution que de fuir. Sans documents de voyage, Caroline a rassemblé la somme de 2000 dollars pour payer des passeurs qui les emmèneraient au Mexique, où ils ont été détenus dans des centres de rétention de la migration durant l’examen de leur demande d'asile.
Elle se trouve désormais dans un centre d’hébergement pour des familles. Elle fait partie de dizaines de milliers d'hommes, femmes et enfants du Salvador, du Guatemala et du Honduras qui ont fui la flambée de violence aux mains des gangs de rue meurtriers, dans ce qui est devenu la plus importante crise des réfugiés en Amérique centrale depuis que plus d'un million de personnes y avaient fui les guerres civiles dans les années 1980.
Les activités criminelles de ces gangs comprennent également le trafic de drogue, la traite d’êtres humains et les vols. La portée de ces gangs s’étend désormais à travers les trois pays dits du Triangle du Nord de l'Amérique centrale et au-delà.
Parmi les personnes qui ont fui pour sauver leur vie, il y a des professionnels comme Caroline au Salvador ou des mères célibataires comme Rosario, qui a cinq enfants et qui est originaire du Honduras. Elle a fui avec ses enfants terrifiés vers le Mexique voisin après que des membres de gangs aient réduit en cendres leur maison.
« Nous avons pris plusieurs bus pour rejoindre la frontière, puis nous avons traversé la rivière - en nageant, en marchant et en portant les jeunes enfants - entre le Guatemala et le Mexique de nuit », se souvient-elle. « J’étais terrifiée à l'idée que les enfants soient emportés ou qu’ils se noient. »
Le HCR, l'Agence des réfugiés des Nations Unies, estime que davantage doit être fait au niveau régional pour protéger les personnes vulnérables comme Caroline, Rosario et leurs familles qui fuient les persécutions et l'aggravation de la violence depuis les trois pays du Triangle du Nord.
« Comme les voies de passage sûr pour demander l'asile diminuent dans cette région, ces personnes se retrouvent victimes de passeurs et de trafiquants. Elles sont exposées à des abus tout au long de leur voyage et leurs besoins sont souvent laissés sans réponse appropriée », a déclaré le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi.
Filippo Grandi rencontre cette semaine les partenaires régionaux à l’occasion d’une table ronde au Costa Rica pour forger une réponse concertée à la crise.
« C’est une crise de protection qui nécessite une coordination régionale plus large pour assurer des réponses rapides et axées sur des solutions durables », a-t-il ajouté.
La nécessité d'une réponse commune est également mise en lumière par l’ampleur des populations chassées de leurs foyers par la persécution des gangs, connus sous le nom « maras » en Amérique centrale. Alors que Caroline et Rosario ont fui le Salvador et le Honduras, les mêmes gangs de rue harcèlent également les habitants du Guatemala voisin – et, parmi eux, Karla, une femme transgenre dans la quarantaine.
Ayant déjà mal à s’acquitter chaque semaine d’une somme d’extorsion, ou « impôt de guerre » de 200 quetzales (26 dollars), Karla* a cherché refuge au-delà de la frontière au Mexique après que les « maras » aient doublé sa demande à 400 quetzales (52 dollars) par semaine - une somme qu’elle ne pouvait pas payer.
« Ici, au Mexique, je vis en sécurité, je me sens respectée et je suis reconnaissante du soutien du HCR », explique-t-elle.
* Nom fictif pour des raisons de protection.