Le HCR va ouvrir un nouveau camp pour accueillir des déplacés en Côte d'Ivoire
Le HCR va ouvrir un nouveau camp pour accueillir des déplacés en Côte d'Ivoire
DUÉKOUÉ, Côte d'Ivoire, 16 février (HCR) - Le HCR procède au défrichage d'un terrain pour y établir un nouveau camp et héberger des déplacés dans l'ouest de la Côte d'Ivoire, où le HCR a enregistré plus de 38 000 personnes déracinées par les tensions politiques dans le pays.
Les conditions humanitaires se sont détériorées du fait d'un manque d'abris et le HCR espère que le nouveau camp allègera le fardeau, surtout pour les personnes les plus vulnérables.
Le nouveau camp est situé près de la ville de Duékoué et aura une capacité d'hébergement de plus de 6 000 personnes, ce qui permettra de désengorger la mission catholique située à proximité où un grand nombre de déplacés ont trouvé refuge. Les pluies torrentielles de la semaine dernière ont détruit de nombreux abris de fortune dans l'enceinte de la mission, ce qui a conduit le HCR à fournir des tentes aux familles les plus affectées.
Un grand nombre des déplacés survit grâce à la générosité des familles locales et des organisations caritatives, surtout à Duékoué. Dans les districts de Danané, Binhouye et Zouan-Hounien, plus de 8 600 déplacés sont accueillis par des familles locales.
Certaines des familles d'accueil abritent jusqu'à 25 personnes et éprouvent des difficultés à joindre les deux bouts. Le HCR recherche des sites supplémentaires pour héberger un nombre accru de déplacés.
Léontine, une mère de huit enfants, est hébergée par sa cousine Adèle à Duékoué depuis qu'elle a fui son village lors d'une attaque menée par des hommes armés le 16 décembre dernier. Elle a été séparée de sa mère et de six de ses enfants durant leur fuite éperdue.
« J'ai retrouvé mes enfants dans un autre village quatre jours après », a-t-elle expliqué, ajoutant que sa mère avait fui dans une autre direction. « Depuis, je n'ai plus aucune nouvelle de ma mère », a-t-elle affirmé.
Sa cousine héberge 13 personnes. « C'est beaucoup pour moi », a expliqué Adèle, qui travaille en tant que cuisinière à la mission catholique de Duékoué. Elle reçoit des vivres de la mission, mais elle a dû récemment louer un autre logement et ses ressources s'épuisent. « Je ne veux pas mettre ces personnes dehors, mais je reconnais que je n'ai plus d'argent à force de m'occuper d'elles », a-t-elle encore ajouté.
Dans la ville de Danané à l'ouest de la Côte d'Ivoire, Kadija, âgée de 20 ans et ses trois enfants, sont hébergés dans une école avec près de 1 000 autres déplacés internes. Elle a fui début janvier depuis Kokoma, près de Duékoué.
« Un transport en voiture a été organisé pour évacuer la population de Kokoma. Nous sommes partis alors que des échanges de tirs nourris avaient lieu dans toute la ville. Nous ne savions pas où nous allions et on nous a finalement déposés ici à Danané », a indiqué Kadija, qui est enceinte. Son mari est resté sur place pour surveiller la maison et les biens de la famille.
La plupart des déplacés dans l'ouest de la Côte d'Ivoire ont fui leurs villages d'origine à la mi-décembre et début janvier, du fait de tensions ethniques et de la violence qui ont suivi les élections présidentielles de novembre dernier. Les deux candidats rivaux ont proclamé la victoire chacun de leur côté.
A Duékoué, les déplacés ont expliqué aux membres du personnel du HCR sur le terrain qu'ils ne pouvaient pas rentrer chez eux car leurs maisons avaient été réduites en cendres et leurs biens pillés. Certains déplacés dans l'ouest ont également fait état de violences physiques et sexuelles ainsi que de détention arbitraire par des groupes armés agissant en toute impunité.
La crainte de représailles, combinée avec l'absence ou la paralysie des institutions judiciaires, empêche une grande partie des déplacés de porter plainte contre ces abus. Le HCR reste préoccupé par l'impasse politique qui crée une psychose. Ce blocage politique, s'il n'est pas résolu, pourrait causer un déplacement à grande échelle.
Les civils restent traumatisés par les récents désordres, qui rappellent la guerre civile de 2002. De ce fait, un grand nombre de familles ont quitté leur maison par anticipation d'une possible attaque. Ils craignent d'être pris au piège en cas d'une reprise de la guerre. Ils n'envisagent le retour chez eux que lorsque l'impasse politique sera résolue et que leur sécurité sera garantie.
Parallèlement, les tensions continuent à pousser des familles vers la frontière avec le Libéria alors que d'autres continuent de la traverser. Le HCR a déjà enregistré 38 200 réfugiés au Libéria ces trois derniers mois.
Par Hélène Caux à Duékoué, Côte d'Ivoire