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Donnez-nous des écoles, pas des secours, exhorte une directrice afghane

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Donnez-nous des écoles, pas des secours, exhorte une directrice afghane

Dans un pays où l'enseignement officiel est limité pour les filles réfugiées afghanes, une femme essaie de faire avancer les choses. Jamila Abbasi est directrice de trois écoles qui accueillent plus de 1 500 enfants afghans, dans la ville de Quetta, au sud du Pakistan.
28 Juin 2007
Jamila Abbasi est directrice de trois écoles accueillant plus de 1 500 enfants afghans dans la ville de Quetta au sud-ouest du Pakistan.

QUETTA, Pakistan, 29 juin (UNHCR) - Jamila Abbasi dirige le « mini-Afghanistan » au coeur de Quetta, élevant ainsi une génération de réfugiés - et tout particulièrement des filles - originaires de toutes les régions en Afghanistan.

« J'enseignerai aux enfants afghans jusqu'à mon dernier souffle », a annoncé cette femme de 35 ans, mère de trois enfants et directrice de trois écoles accueillant plus de 1 500 enfants afghans, dans la ville de Quetta au sud du Pakistan. « Même si je suis élue Présidente de l'Afghanistan, je passerai mon temps libre à enseigner dans une salle de classe. »

Son dévouement est grandement nécessaire. Selon un récent rapport sur l'enregistrement des Afghans au Pakistan, plus de 70 pour cent des 2,1 millions d'Afghans enregistrés dans ce pays ne sont jamais allées à l'école. Les femmes et les filles constituent moins du quart de la population Afghane ayant reçu une éducation primaire, et lorsqu'elles atteignent un niveau d'éducation plus élevé, elles sont cinq fois moins nombreuses que les étudiants masculins à pouvoir étudier.

Jamila aurait connaître le même destin. Ses parents ont arrangé son mariage à Kaboul alors qu'elle n'avait encore que 14 ans. Elle est devenue mère à l'âge de 16 ans, mais heureusement sa belle-famille l'a encouragée à poursuivre ses études. Elle a continué sa scolarité afin d'obtenir un diplôme dans l'éducation à Dar-ul-Mualimin, une institution d'enseignement religieux de la capitale afghane.

En 1992, quand les moudjahiddin ont pris Kaboul, elle a fui vers l'Iran avec sa famille, où ils sont restés pendant environ une année avant de partir en train pour le Pakistan. « Malheureusement, la seule personne que nous connaissions [à Quetta] était déjà retournée en Afghanistan. Nous avons passé la nuit à la gare », explique Jamila, revivant l'angoisse du déplacement. « Le matin, un homme afghan qui nous avait observés est venu nous offrir son aide, et nous avons dû lui faire confiance. »

Ce bon samaritain les a aidés à louer une maison de deux-pièces. Son mari a trouvé un travail de secrétaire à Quetta, et ses enfants ont commencé à aller à l'école. « Mais je n'étais pas satisfaite, je sentais qu'il y avait un vide dans ma vie. Cela me fendait le coeur de voir ces petits enfants afghans courir dans les rues, pieds nus et ramasser des ordures », dit-elle.

En 1999, elle a décidé de fonder une école primaire avec trois autres femmes afghanes. En un an, le nombre de garçons et de filles inscrits est passé de 25 à 400 étudiants. Jamila payait le loyer tandis que les étudiants payaient des frais d'inscription mensuels symboliques de 30 à 50 roupies (50 à 80 centimes de dollar) pour les livres. Cinquante étudiants méritants étaient exemptés de frais de scolarité.

« Le nombre des filles dans cette école était inférieur à celui des garçons, et c'est cela qui me gênait le plus », explique Jamila. « Je pensais : la vie des Afghans ne changera jamais tant que nos femmes n'auront pas les même chances d'éducation. Une femme a la responsabilité d'une génération entière, comment pouvons nous espérer avoir une génération instruite si nous ne donnons pas les mêmes opportunités d'éducation aux filles ? »

C'est ainsi qu'elle a décidé de fonder un collège libre réservé aux filles. En 2001, une journaliste britannique a été tellement impressionnée par le projet de Jamila qu'elle a promis d'envoyer des fonds pour soutenir l'éducation des femmes. La journaliste finance maintenant la scolarité de 200 jeunes filles et le salaire de six professeurs de l'école.

Aujourd'hui, Jamila dirige trois écoles, dont un lycée fondé en 2002 avec l'appui de Muslim Hands, une organisation internationale non gouvernementale. Toutes ses écoles sont agréées par le Ministère afghan de l'éducation. Elles suivent le cursus afghan de manière à ce que les étudiants une fois rapatriés n'aient pas à faire face à des problèmes de réajustement.

Jamila est également un membre actif de l'Association des enseignants afghans, qui met en place des directives académiques pour toutes les écoles afghanes dans les sites de réfugiés urbains au Pakistan. Jusqu'ici, 45 écoles afghanes comptant 25 000 étudiants à Quetta ont rejoint l'association.

L'agence des Nations Unies pour les réfugiés soutient l'éducation primaire seulement dans les camps du Pakistan. Comme les financements diminuent au fil des années, l'UNHCR encouragent les Afghans restant longtemps dans le pays à pourvoir à leurs besoins. L'effort de Jamila est une grande étape dans cette direction, mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour rendre l'éducation des filles moins taboue dans la société afghane.

Elle espère que l'éducation pourra apporter un avenir meilleur aux enfants afghans. « Nous n'avons plus besoin de rations, d'essence ou même de quelques centaines de dollars, parce que toutes ces choses finiront un jour. Que ferons-nous le jour suivant ? » demande-t-elle. « Si quelqu'un veut vraiment nous aider, s'il vous plaît instruisez notre peuple. Dépensez votre argent pour l'éducation ; achetez-nous des livres ; fournissez-nous des écoles et nous ne serons plus jamais un fardeau. »

Par Duniya Khan à Quetta, Pakistan