Une dernière famille quitte le camp de Ruweished en Jordanie
Une dernière famille quitte le camp de Ruweished en Jordanie
AMMAN, Jordanie, 5 novembre (UNHCR) - Le camp de Ruweished, isolé dans le désert du nord de la Jordanie, s'est vidé lundi après le départ des neuf derniers réfugiés palestiniens, maintenant en route pour une nouvelle vie au Brésil. Le camp, qui a autrefois hébergé quelque 1 000 réfugiés, devrait désormais rester fermé.
Ruweished est situé à environ 70 kilomètres de la frontière avec l'Iraq. Ce camp a été créé en 2003 et a accueilli des Somaliens, des Kurdes iraniens, ainsi que des Palestiniens et des Iraquiens fuyant les violences en Iraq. La plupart de ces personnes ont été réinstallées dans des pays tiers, dont l'Australie, le Canada, le Danemark, la Nouvelle Zélande, la Suède et les Etats-Unis.
Les derniers réfugiés résidant dans le camp, un groupe de 108 Palestiniens, ont été acceptés pour réinstallation par le Brésil ; leur départ de Ruweished, qui a débuté fin septembre, s'est déroulé en trois étapes. Les neuf réfugiés qui ont quitté Ruweished lundi, tous membres de la même famille, sont les derniers à partir.
« Aujourd'hui, mon rêve est devenu réalité », dit Subieha, qui a fui Bagdad l'année dernière. « D'abord, j'ai pu retrouver ma mère, et maintenant nous allons partir dans un pays où je pense que nous serons en sécurité, loin du bruit des bombes et des roquettes, un endroit où j'espère nous dormirons tous mieux la nuit », ajoute cette mère de quatre enfants, qui a été transférée à Ruweished depuis un camp situé en Iraq, tout près de la frontière avec la Syrie.
Subieha, sa mère Rashida, âgée de 76 ans, et les sept autres membres de la famille ont passé leur dernière nuit à Ruweished, entassés dans une chambre au confort spartiate, leurs biens emballés dans trois sacs empilés dans un coin. Dehors, le vent soufflait secouant la tente isolée. Seuls des chats errants se promenaient dans le camp vide.
La famille est heureuse, mais épuisée. « Nous savons que beaucoup de personnes ont fait des efforts pour que tout cela soit possible, nous les remercions pour cette chance qui nous est donnée, pour leur persévérance et leur patience », dit Rashida, dont les histoires drôles ont contribué à maintenir le moral de toute la famille.
« Quand j'étais petit à Bagdad, notre soutien allait toujours à l'équipe de football du Brésil. Maintenant, ce sera notre équipe nationale », a noté son petit-fils, Hussam, avant le départ de la famille, à l'aurore, de Ruweished vers Amman, d'où ils ont pris l'avion pour São Paulo plus tard dans la journée.
Les Palestiniens vont bénéficier d'un logement dont la location est prise en charge et vont recevoir des meubles et une assistance matérielle pendant deux ans. Un réseau de volontaires et de communautés locales a été créé pour assurer un soutien moral aux Palestiniens, qui ont été installés dans les Etats de São Paulo et de Rio Grande do Sul, durant leur intégration.
Tous les enfants palestiniens pourront à leur arrivée suivre des cours de portugais, jusqu'au début de la prochaine année scolaire, en mars 2008, quand il leur sera alors possible de rejoindre le cursus scolaire normal.
L'UNHCR a accueilli favorablement la réinstallation des Palestiniens par le Brésil, ainsi que l'aide fournie par la Jordanie qui a accueilli le groupe et facilité son départ. « Nous espérons que la réussite de cette solution durable pour ce groupe, qui a été bloqué sans espoir pendant si longtemps, pourra se reproduire pour d'autres groupes identiques, dans le cadre de partenariats similaires », a expliqué Imran Riza, le délégué de l'UNHCR en Jordanie.
Les Palestiniens sont les premiers réfugiés, qui ne sont pas originaires de l'Amérique latine, à pouvoir bénéficier des programmes de réinstallation de solidarité, qui ont été proposé comme l'une des solutions durables pour les réfugiés, dans le cadre du Plan d'Action de Mexico de 2004, adopté par 20 pays d'Amérique latine.
Les Palestiniens ont eu une vie difficile à Ruweished. Ils ont dû faire face aux scorpions, aux tempêtes de sable et aux nuits sans sommeil durant les étés brûlants. Jour après jour, ils cédaient au désespoir et quelques-uns d'entre eux sont même rentrés en Iraq.
« Parfois, je pensais que je resterais à jamais dans ce lieu », a indiqué Rachida, tout en pliant une couverture pour le vol vers le Brésil. « Le jour est venu. Maintenant nous avons tous une seconde chance dans cette vie, dans un endroit où nous essaierons d'oublier le passé. »
Le conflit en Iraq a déraciné plus de quatre millions de personnes, notamment des milliers de Palestiniens. Plus de 1 750 Palestiniens d'Iraq restent bloqués, dans des conditions déplorables, le long de la frontière entre l'Iraq et la Syrie, sans pouvoir la traverser pour trouver la sécurité.
Par ailleurs, environ 13 000 Palestiniens continuent à être quotidiennement pris pour cible, harcelés, menacés et tués à Bagdad. « Quand nous étions à Bagdad, nous allions travailler le matin, sans savoir si nous pourrions rentrer le soir », a expliqué Hussam, un électricien.
Par Rana Sweis à Amman, Jordanie