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Suivi de la résolution 1995/56 du Conseil Economique et Social : Activités du HCR en rapport avec la prévention

Réunions du Comité exécutif

Suivi de la résolution 1995/56 du Conseil Economique et Social : Activités du HCR en rapport avec la prévention
EC/46/SC/CRP.33

28 Mai 1996

SUIVI DE LA RESOLUTION 1995/56 DU CONSEIL ECONOMIQUE ET SOCIAL :
ACTIVITES DU HCR EN RAPPORT AVEC LA PREVENTION

I. LE PRINCIPE DE LA PREVENTION

1. Depuis la création du HCR en 1951 jusqu'au début des années 80, la communauté internationale s'accordait à penser que le Haut Commissariat ne pouvait respecter son statut humanitaire et apolitique qu'en circonscrivant ses activités aux pays d'asile et en répondant aux mouvements de réfugiés après leur déclenchement. Elle estimait que toute tentative d'agir sur les conditions provoquant les déplacements forcés de population à l'intérieur des pays d'origine aurait impliqué l'Office dans des fonctions qui dépassaient son Statut, et étaient donc inacceptables.

2. Ces dernières années, un certain nombre de facteurs différents se sont associés pour provoquer une réévaluation fondamentale de cette approche traditionnelle du problème des réfugiés. Il s'agit, par exemple, des tensions que la récente multiplication de guerres internes et de situations humanitaires d'urgence complexes font peser sur le système international d'assistance; la préoccupation croissante des pays hôtes et des pays donateurs face aux coûts financiers et autres engagés pour assurer aux réfugiés une protection et une assistance illimitées; la prise de conscience accrue de la grave menace que les mouvements de réfugiés peuvent représenter pour la sécurité nationale, régionale et même internationale, particulièrement quand ils concernent des pays d'asile aux économies faibles, aux écologies fragiles et où règne un équilibre délicat de groupes ethniques; et la structure modifiée des relations internationales et des intérêts après la fin de l'ancien ordre de la guerre froide. Ces événements ont donné naissance à un nouveau consensus international reconnaissant que le mandat du HCR, qui est de chercher des solutions permanentes au problème des réfugiés, donne à l'organisation un intérêt légitime dans la prévention des mouvements de réfugiés au moyen d'activités opérationnelles à l'intérieur des pays d'origine.

3. Telle qu'elle est employée et pratiquée par le HCR, il convient de souligner que la notion de prévention se rapporte strictement aux initiatives qui sont destinées à protéger la sécurité et le bien-être des populations dans leur patrie, éliminant ou atténuant ainsi les causes de fuite. Ces mesures ne doivent pas être considérées comme un substitut au droit de demander l'asile dans un autre pays.

4. Ainsi que les sections suivantes de ce document de séance l'indiquent, la contribution récente du HCR à la prévention des déplacements forcés a pris diverses formes et a exigé que l'Office établisse des relations de travail avec plusieurs partenaires aux niveaux international, régional et national. Compte tenu de la limitation du mandat, des compétences techniques et des ressources du HCR dans le domaine de la prévention, le Haut Commissariat s'attache tout particulièrement à renforcer ces relations, à clarifier le rôle respectif des éléments humanitaires, politiques, de développement et des droits de l'homme du système des Nations Unies et des organisations régionales, et à resserrer la coordination entre ces entités différentes.

II. LA PREVENTION DANS LA PRATIQUE

5. Les récents efforts du HCR pour prévenir les mouvements de réfugiés et pour éviter d'autres formes de déplacement forcé peuvent être groupés en sept catégories principales (et se chevauchant dans une certaine mesure) qui sont présentées ci-dessous.

i) Renforcer les capacités nationales de protection

6. L'Etat a le devoir de protéger ses citoyens et de s'assurer qu'ils ne seront pas forcés de quitter leur pays ou leur communauté. Un objectif fondamental des activités préventives du HCR a donc été de garantir que les autorités gouvernementales, aux niveaux national et local, pourront s'acquitter de cette responsabilité (voir Rôle de protection du HCR dans les pays d'origine (EC/46/SC/CRP.17)).

7. Dans de nombreuses régions du monde, le HCR a encouragé les pays d'origine à promulguer des amnisties et autres garanties de sécurité pour les réfugiés rapatriés, et à s'assurer que les anciens réfugiés et personnes déplacées reçoivent des documents d'identité. En surveillant l'application de ces amnisties, et en intervenant auprès des autorités compétentes quand elles ne sont pas respectées, le Haut Commissariat cherche à renforcer la sécurité des rapatriés et d'autres citoyens, réduisant ainsi le risque de nouveaux déplacements de population.

8. En même temps, le HCR a pris un certain nombre d'initiatives pour renforcer les capacités nationales de protection dans les pays où il existe un risque de conflit, de violence et de déplacement forcé de population. C'est ainsi qu'il dispense à des fonctionnaires de l'administration une formation aux droits de l'homme et aux principes humanitaires, il favorise le développement d'institutions civiles et non gouvernementales fortes, tout en encourageant les gouvernements à reconnaître les droits de l'homme et les droits des minorités dans leur système juridique et leurs dispositions constitutionnelles.

9. Avec l'accord des Etats concernés, le HCR s'est également attaché à compléter les capacités nationales de protection par le déploiement de personnel international dans les zones de tension. Reconnaissant le rôle important qu'une présence indépendante et humanitaire peut jouer dans la prévention des déplacements forcés, le Haut Commissariat a accueilli favorablement et a soutenu les efforts récents des Nations Unies pour établir une capacité opérationnelle plus efficace dans le domaine des droits de l'homme.

ii) Régler le problème de l'apatridie

10. Les apatrides et les personnes dont la citoyenneté fait l'objet d'un différend ont un statut de deuxième classe dans leur pays de résidence qui les rend vulnérables aux déplacements forcés, particulièrement dans les régions où de nouveaux Etats ont été créés (ou sont en cours de création). Les efforts déployés pour traiter et résoudre le problème de l'apatridie ont donc un rôle important à jouer dans la prévention des mouvements de réfugiés (voir Note sur le HCR et les apatrides (EC/1995/SCP.CRP.2)). La récente Conférence régionale sur les problèmes des réfugiés, des personnes déplacées, d'autres formes de déplacement involontaire et des rapatriés dans les pays de la Communauté des Etats indépendants et les pays voisins concernés a mis en lumière, parmi d'autres questions, l'importance du règlement des problèmes d'apatridie dans le cadre des stratégies de prévention.

11. Tout en s'efforçant de déterminer plus précisément l'ampleur, la nature et les conséquences de ce problème, le HCR joue un rôle accru pour conseiller les gouvernements sur leur législation actuelle et future en matière de nationalité, doter les fonctionnaires compétents d'une formation et de lignes directrices, et encourager les Etats à adhérer aux instruments tels que les conventions de 1954 et de 1961 sur l'apatridie.

iii) Protéger les personnes déplacées à l'intérieur du territoire

12. L'importance de s'attaquer aux problèmes des personnes déplacées à l'intérieur du territoire et des civils touchés par la guerre est devenue de plus en plus évidente dans le contexte des efforts que la communauté internationale réalise pour éviter les flux de réfugiés de grande ampleur. Puisque les mouvements de réfugiés et les déplacements intérieurs ont fréquemment les mêmes causes, il semble donc peu raisonnable de ne traiter que des aspects transfrontaliers du problème. Il est également clairement préférable d'éviter aux populations de fuir leur pays afin de trouver la sécurité et de satisfaire leurs besoins de base.

13. Les détails des efforts du HCR pour protéger la sécurité physique et matérielle des populations déplacées à l'intérieur du territoire et touchées par la guerre ont déjà été présentés au Comité exécutif (voir, par exemple, Aspects de protection des activités du HCR en faveur des personnes déplacées à l'intérieur du territoire (EC/1994/SCP/CRP.2) et Rôle de protection du HCR dans les pays d'origine (EC/46/SC/CRP.17)). Lors de sa quarante-cinquième session en 1994, le Comité exécutif a adopté une Conclusion sur les personnes déplacées à l'intérieur du territoire (A/AC.96/839, par. 20) qui établit le cadre de base pour l'action du HCR en faveur de ces populations.1 Comme ces documents l'ont souligné, la protection que le HCR et d'autres institutions peuvent octroyer aux personnes déplacées à l'intérieur du territoire et aux civils touchés par la guerre ne peut se substituer à la protection nationale.

14. Néanmoins, l'expérience a montré que le HCR et d'autres institutions compétentes, particulièrement le Comité international de la Croix-Rouge, peuvent, dans certaines circonstances, entreprendre des activités qui renforcent la sécurité des personnes à l'intérieur de leur pays d'origine, limitant ainsi l'envergure de tout déplacement interne ou transfrontalier. Ces activités comprennent, par exemple, la surveillance du sort fait aux groupes menacés, la notification des violations des droits de l'homme à la communauté internationale, l'intervention auprès des autorités gouvernementales et non gouvernementales responsables, ainsi que l'octroi de secours humanitaires dans les zones de déplacement réel ou potentiel de population.

15. Puisqu'aucune organisation humanitaire n'a de mandat global pour les personnes déplacées à l'intérieur du territoire et les civils touchés par la guerre, il est particulièrement nécessaire que la communauté internationale établisse une division appropriée et efficace des responsabilités dans les situations concernant de tels bénéficiaires. Pour faciliter cette tâche, le HCR continue de jouer un rôle actif dans l'Equipe spéciale interinstitutions sur les personnes déplacées à l'intérieur du territoire, convoquée par le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, et de se maintenir en étroite liaison avec le représentant du Secrétaire général pour les personnes déplacées à l'intérieur du territoire et le Comité international de la Croix-Rouge. On espère que les discussions intergouvernementales et interinstitutionnelles engagées en réponse à la résolution 1995/56 du Conseil économique et social contribueront à une plus grande clarté dans ce domaine majeur des préoccupations humanitaires.

iv) Consolider les solutions dans des sociétés déchirées par la guerre

16. Le HCR et le Comité exécutif du Programme du Haut Commissaire ont approuvé à plusieurs reprises le principe selon lequel le rapatriement librement consenti est la solution la plus souhaitable aux problèmes des réfugiés. Ces dernières années, néanmoins, il est devenu de plus en plus évident que les réfugiés rapatriés et les personnes déplacées pouvaient trouver très difficile de revenir et de demeurer dans un pays qui a été dévasté par des années de conflit armé et de paralysie du développement.

17. Dans une tentative pour ancrer les rapatriés dans leur communauté, minimiser les conséquences déstabilisatrices des afflux de rapatriés de grande envergure et éviter de nouveaux mouvements de réfugiés fuyant des sociétés ravagées par la guerre, le HCR s'est de plus en plus investi dans les programmes de réintégration et de relèvement de l'ensemble de la communauté à l'intérieur des pays d'origine (voir Suivi de la résolution 1995/56 de l'ECOSOC - Activités d'assistance du HCR dans les pays d'origine (EC/46/SC/CRP.16)). Du point de vue du HCR, la tâche de prévention est donc inextricablement liée à la recherche de solutions.

18. Le HCR reconnaît qu'il peut jouer un rôle limité dans les tâches de réintégration et de relèvement. Le Haut Commissariat a donc accordé une priorité élevée à l'établissement de liens opérationnels entre ses propres activités d'assistance à l'issue du rapatriement (particulièrement les projets à impact rapide) et les programmes de reconstruction à plus long terme des gouvernements, des organismes bilatéraux et multilatéraux de développement, des institutions financières internationales et des organisations non gouvernementales. Cette question a fait l'objet de consultations approfondies avec le Département des affaires humanitaires, le Programme des Nations Unies pour le développement et, plus récemment, la Banque mondiale. Les discussions relatives au suivi de la résolution 1995/56 du Conseil économique et social doivent, de l'avis du HCR, conduire à une liaison plus efficace entre les activités humanitaires et de développement.

v) Promouvoir des approches régionales globales face aux problèmes des réfugiés

19. L'action préventive est une caractéristique essentielle et intégrale des plans d'action globaux que le HCR a encouragé dans les régions de déplacement massif comme l'Asie du Sud-Est, l'Amérique centrale, l'ex-Yougoslavie et la Communauté des Etats indépendants (voir Approches régionales globales face aux problèmes des réfugiés (EC/1994/SCP/CRP.3)).

20. Ces plans d'action sont de nature globale à plusieurs titres. Premièrement, ils rassemblent tous les Etats qui sont touchés par une situation de réfugiés, notamment, et c'est capital, les pays d'origine, dans un cadre de coopération internationale. Deuxièmement, ils permettent à un vaste éventail d'acteurs différents - Etats, organes régionaux, organes politiques des Nations Unies, institutions de développement, organisations non gouvernementales, HCR et autres institutions humanitaires - de coordonner leurs efforts de prévention. Troisièmement, ces plans d'action facilitent une approche d'ensemble de la tâche de prévention, s'attaquant aux causes fondamentales comme les violations des droits de l'homme, les conflits politiques et sociaux, l'effondrement de l'économie et la détérioration de l'environnement.

21. Cette approche est illustrée par l'action actuellement entreprise pour traiter le problème du déplacement de masse dans la région de l'ancienne Union soviétique, connue officiellement sous le nom de Conférence régionale sur les problèmes des réfugiés, des personnes déplacées, d'autres formes de déplacement involontaire et des rapatriés dans les pays de la Communauté des Etats indépendants et les pays voisins concernés. Préparée conjointement par le HCR, l'Organisation internationale pour les migrations et le Bureau pour les institutions démocratiques et les droits de l'homme de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, la Conférence souhaite fournir un cadre d'action, particulièrement de nature préventive, dans la région qui sera appliqué par les pays de la CEI avec le soutien de la communauté internationale.

22. L'expérience a montré que ces plans d'action régionaux ne sauraient être limités à des accords officiels et à des déclarations d'intention, mais qu'ils devaient inclure des mécanismes clairement définis de mise en oeuvre et de suivi, notamment une répartition équilibrée des responsabilités. Le HCR peut jouer un rôle important pour guider ce processus jusqu'à une conclusion réussie, en parvenant au consensus et à la coordination requis pour que soient prises des initiatives efficaces de prévention.

vi) Organiser des campagnes d'information de masse pour traiter les problèmes plus vastes de la migration

23. Le HCR reconnaît que les flux de réfugiés se déroulent dans un contexte de mouvements migratoires plus larges qui, particulièrement dans leur forme illicite, ont exercé des pressions sur l'institution de l'asile dans différentes régions du monde. Le Haut Commissariat a donc lancé des campagnes d'information de masse dans un certain nombre de régions, notamment au Viet Nam, en Albanie et en Fédération de Russie, dans le but de fournir aux candidats à l'asile et à la migration des informations exactes sur les conséquences de leur départ. Dans des situations concrètes, l'information de masse s'est révélée un outil précieux pour aider à dissuader les gens de quitter leur pays pour des motifs autres que ceux qui leur permettraient de prétendre au statut de demandeurs d'asile de bonne foi.

vii) Alerter la communauté internationale sur les causes des déplacements forcés

24. L'information peut également agir comme un outil important pour prévenir les situations de réfugiés en tant que telles. En raison de sa présence élargie sur le terrain, le HCR est souvent en mesure de donner l'alarme quand un mouvement de réfugiés commence et d'attirer l'attention de la communauté internationale sur les circonstances qui forcent les populations à fuir, l'encourageant ainsi à prendre une action corrective. Le Haut Commissariat participe également à une initiative coordonnée par le Département des affaires humanitaires pour garantir que les institutions humanitaires aient rapidement accès aux informations sur les flux potentiels de réfugiés et de personnes déplacées.

25. L'intérêt nouveau du HCR pour les causes, et non plus seulement pour les conséquences, des mouvements de réfugiés s'est également manifesté dans un effort accru pour sensibiliser la communauté internationale aux causes à l'origine des déplacements forcés et pour encourager la mise en oeuvre de stratégies destinées à promouvoir le développement humain et protéger la sécurité des populations. C'est pour cette raison que le Haut Commissariat a joué un rôle actif dans les récentes conférences mondiales sur les questions telles que les droits de l'homme, la population et le développement, le développement social et les femmes.

26. Pendant la même période, les activités de plaidoyer et de promotion du HCR ont été réorientées, dans le but d'attirer davantage l'attention internationale sur les mesures qui sont requises pour éviter les mouvements de réfugiés. La plus récente édition des Réfugiés dans le monde, qui présente le point de vue du HCR sur la question des déplacements forcés aux décideurs et aux personnalités qui forgent l'opinion aux quatre coins du monde, demande une approche active, préventive et intégrée du problème, en incorporant la protection des droits de l'homme, le règlement des conflits, la promotion du développement économique et institutionnel ainsi que la protection de l'environnement naturel.


1 La conclusion établit un certain nombre de critères pour la participation du HCR dans des situations de déplacement interne. Elle « reconnaît que la résolution No. 48/116, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 20 décembre 1993, qui réaffirme son soutien aux efforts du Haut Commissaire, « à la demande expresse du Secrétaire général ou des principaux organes compétents des Nations Unies et avec l'accord de l'Etat intéressé, et compte tenu de la complémentarité des mandats et des responsabilités d'autres organismes compétents, [de s'efforcer] de fournir une assistance et une protection humanitaires aux personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays qui se trouvent dans des circonstances particulières, exigeant que l'on fasse appel aux compétences spéciales du Haut Commissariat, surtout lorsque ces efforts peuvent contribuer à prévenir ou à résoudre des problèmes de réfugiés », continue d'offrir un cadre approprié à l'intervention du Haut Commissaire dans les situations de déplacement intérieur; » (A/AC.96/839, par. 20(j))