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Déclaration faite par M. Félix Schnyder, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, devant le Conseil du Comité intergouvernemental pour les migrations européennes, à sa quinzième session, Genève, le 24 octobre 1961

Discours et déclarations

Déclaration faite par M. Félix Schnyder, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, devant le Conseil du Comité intergouvernemental pour les migrations européennes, à sa quinzième session, Genève, le 24 octobre 1961

24 Octobre 1961

Genève, le 24 octobre 1961

Monsieur le Présidente, Mesdames, Messieurs,

J'apprécie vivement l'occasion qui m'est offerte de prendre de nouveau la parole devant le Conseil du Comité intergouvernemental pour les migrations européennes qui, tout comme les autres organisations internationales, doit faire face, dans notre monde en évolution, à un nombre impressionnant de problèmes.

A la session de mai, j'ai souligné L'importance que présente pour le Haut Commissariat une collaboration étroite et constante avec le CIME, et je tiens à réaffirmer aujourd'hui notre volonté de maintenir à l'avenir le niveau élevé que la coopération entre nos deux organismes a atteint. J'aimerais aussi marquer ma sincère gratitude pour le rôle éminent que joue le CIME, en tant qu'instrument de la communauté internationale, dans le transport de réfugiés vers des pays de réinstallation permanente. Il est habituel, de nos jours, de citer des chiffres en témoignage des résultats atteints, et je ne me ferai pas faute de rappeler qu'à la fin de septembre de cette année, le CIME avait transporté depuis sa création 371.966 réfugiés relevant de mon mandat.

Si le Haut-Commissariat s'occupe essentiellement des réfugiés qui relèvent de mon mandat, je tiens à vous assurer que j'ai pleinement conscience du problèmes des réfugiés nationaux. Comme vous le savez, l'Assemblée générale des Nations Unies m'a autorisé 'a prêter mes bons offices aux gouvernements intéressés, sur leur demande, afin de les aide à trouver des solutions pour ces réfugiés. Comme dans le passé, je suis prêt à contribuer, dans les circonstances appropriées, à développer aussi à l'intention des réfugiés nationaux les possibilités de réinstallation.

Peut-être conviendrait-il que je mentionne maintenant, brièvement, certaines des activités du Haut Commissariat. Dans le cadre de l'opération qu'il mène conjointement avec le CIME, les mouvements de réfugiés européens au départ de la Chine continentale se poursuivent. Depuis le 1er février 1952, environ 16.500 réfugiés ont été réinstallés après un transit par Hong Kong. Depuis le début de cette année, 1.986 ont été transportés à partir de la colonie, contre 1.005 Pour toute l'année 1960. Cependant, il en reste encore en Chine continentale quelque 5.000, dont 4.000 ont reçu l'assurance d'un visa et n'ont plus désormais besoin que d'un permis de sortie pour gagner Hong Kong. Plusieurs gouvernements ont accepté d'accueillir un grand nombre de ces réfugiés, et je suis convaincu qu'ils continueront à se montrer aussi généreux.

Un projet collectif qui a pleinement réussi est la florissante colonie des « old believers », venus de Chine et maintenant établis au Brésil dans l'Etat de Parana. Je mentionnerai à cet égard, pour montrer qu'il est possible de réaliser moyennant une dépense raisonnable des plans de colonisation agricole qui s'avèrent efficaces, que le coût de ce projet per capita s'est élevé approximativement à 420 dollars.

Je me rends certes compte que dans bien des cas, la réinstallation des immigrants dans les pays latino-américain nécessitera des fonds beaucoup plus importants, et que les mesures prises doivent correspondre aux exigences particulières des problèmes traites. J'estime néanmoins qu'il est remarquable que l'entreprise dont s'est occupe le Haut Commissariat ait pu être menée à bien de façon aussi économique.

Monsieur le Président, lorsque j'ai pris la parole devant le Conseil en mai dernier, j'ai fait mention du fait que je collaborais avec le Comité en vue d'organiser un examen médical systématique de réfugiés gravement handicapés qui étaient toujours vivement désireux d'émigrer à partir de l'Italie et de l'Autriche.

Je suis heureux de vous faire savoir que le Gouvernement de l'Australie a généreusement consenti à mettre à notre disposition les services d'un fonctionnaire supérieur de ses services médicaux, qui procède actuellement à l'enquête nécessaire au camp de Capoue, en Italie. Une enquête analogue sera entreprise dans quelques jours en Autriche, avec le concours d'un médecin du CIME. Ces réfugiés ont à plusieurs reprises été refusés par des missions de sélection, souvent pour la seule raison qu'un membre de leur famille souffrait d'un handicap quelconque. Je veux espérer que les enquêtes feront apparaître sous son vrai jour la valeur de ces unités familiales en tant que groupes de colons éventuels.

Je me suis récemment rendu au Danemark, en Suède et en Norvège pour assister à la célébration du centième anniversaire de la naissance de Fridtjof Nansen, et j'ai eu l'honneur de remettre le Médaille Nansen à Sa Majesté le roi Olaf de Norvège. J'ai été grandement encouragé par la bonne volonté avec laquelle les gouvernements des pays scandinaves ont accepté d'examiner quelques-uns des dossiers de réfugiés handicapés qui seront constitués à la suite des enquêtes en question. J'espère vivement que d'autres pays suivront cet exemple et m'aideront à résoudre le problème tenace que pose la recherche de possibilités de réinstallation pour les réfugiés handicapés non installés qui se trouvent encore en Europe. Je me propose d'entrer prochainement en contact avec les gouvernements à ce sujet.

Je pense qu'il convient que je fasse mention de la loi des Etats-Unis No 86-648. Nous avons on effet maintenant une expérience suffisant de son application pour juger de l'importance de ses effets à l'égard des réfugiés qui relèvent de mon mandat. Au cours de la première année de sa mise en vigueur, 7.264 réfugiés en provenance d'Allemagne, d'Autriche, de Belgique, de France, de Grâce, d'Italie et du Liban ont été admis sous condition, et 2.600 d'entre eux ont été transportés aux Etats-Unis. On voit donc que cette loi m'a aidé dans une grande mesure à réduire le nombre des réfugiés non installés que l'Europe compte encore. Permettez-moi à cette occasion, Monsieur le Président, de rendre hommage à M. Walter, membre du Congrès américain, qui est parmi nous aujourd'hui, pour le rôle important qu'il a joué dans l'élaboration du programme spécial mis sur pied au titre de cette loi. Ce programme, non seulement donne à un certain nombre de réfugiés la possibilité de s'établir aux Etats-Unis, mais encore - et je pense que cola est tout aussi important - il offre à un nombre encore plus grand de réfugiés une nouvelle chance en leur laissant le soin de choisir la solution finale qu'ils préfèrent.

En même temps, la loi No 86-648 montre de façon frappante comment les gouvernements des pays d'immigration qui ont à l'égard des réfugiés une attitude généreuse peuvent contribuer à la solution de leurs problèmes.

Une autre catégorie de réfugiés en faveur desquels des solutions doivent être trouvées est celle des réfugiés quo l'on désigne, faute d'un meilleur terme, sous la nom de « réfugiés socialement handicapes ».

A la dernière session du Conseil, j'ai dit également que les réfugiés européens qui vivent dans les pays du Moyen-Orient pourraient poser des problèmes. Il est certain quo les anciens réfugiera d'origine européenne « établis » au Moyen-Orient et on Afrique du Nord se trouvent dans une situation de plus en plus difficile. D'après les enquêtes qui se poursuivant dans cette région avec, comme on d'autres occasions, le précieux concours des agences bénévoles, il est évident qu'un nombre considérable de ces personnes sont, soit en chômage, soit sur le point de perdre leur emploi et vivent dans des condition misérables. En raison des problèmes qui se posent sur le plan locale ces enquêtes prendront encore beaucoup de temps. Néanmoins, les agences bénévoles se chargent déjà, dans certains de ces pays, de la préparation des réfugiés a l'émigration, car on estime que la réinstallation des réfugiés ailleurs est pour la plupart d'entre eux la solution permanente appropriée.

A cet sujet, j'espère que le CIME, qui transporte déjà un nombre limite de réfugiés du Moyen-Orient au titre du Trust Fund de l'OIR, disposera des moyens nécessaires pour aider la Haut Commissariat en transportant un plus grand nombre de réfugiés si le besoin s'en fait sentir.

J'ai noté avec intérêt que la Conférence permanente des agences bénévoles qui travaillent pour les réfugiés vous a soumis une recommandation visant à un assouplissement des critères d'admissibilité appliqués dans le cadre des accords CTME/Sociétés bénévoles relatifs au Fonds de roulement, afin que ces accords s'étendent aux réfugiés d'origine européenne résidant en Afrique du Nord ou au Moyen-Orient. J'apure sans réserve cette recommandation, dont l'adoption faciliterait grandement ma recherche de possibilités de réinstallation pour ces personnes.

Comme je l'ai dit, nous vivons dans un monde en évolution. Depuis que j'ai assumé mes fonctions de Haut Commissaire, au mois de février de cette année, j'ai été frappé par le fait que le problème des réfugiés n'est jamais statique, et que chaque jour se posent de nouveaux problèmes qu'aucun d'entre nous ne pouvait prévoir. Tous ceux qui sont présents ici savent que, non seulement certains pays ont encore, à faire face à de graves problèmes démographiques, mais que - et cela est plus important - il reste au Haut Commissariat à trouver des solutions pour les réfugiés non réinstallés que compte encore l'Europe et dont beaucoup attendent qu'une occasion de s'établir sur des terres nouvelles leur soit offerte.

Pour conclure, Monsieur la Président, je voudrais vous parler de mes plans d'avenir on ce qui concerne le Haut-Commissariat. Comme vous le savez, la communauté internationale a fait un effort considérable, ces dix dernières années, pour la réinstallation des personnes déplacées à la suite de la deuxième guerre mondiale. Il est donc réconfortant de constater que nous approchons maintenant du règlement définitif de ce problème qui est resté aigu si longtemps. Le Haut Commissariat dispose des fonds et a élaboré les plans nécessaires pour évacuer des camps officiels tous les réfugiés d'Europe relevant de son mandat. Des milliers de personnes sont d'ores et déjà installées dans de nouveaux foyers et à cet égard les statistiques sont, je crois, assez impressionnantes. Au 1er janvier 1952, quelque 120.000 réfugiés se trouvaient dans : des camps ; leur nombre est tombé à 11.066, dont 287 en Grèce, 1.359 en Italie, 2.528 en Autriche et 6.892 en Allemagne. C'est en Allemagne que la problème sera résolu en dernier lieu mais nous sommes certains dès maintenant d'avoir les fonds nécessaires et de pouvoir bientôt achever ce programme.

Il reste cependant les réfugiés handicapés qui vivent en Europe en dehors des camps, dans des conditions qui sont loin d'être satisfaisantes ; j'ai l'intention de soumettre des plans au Comité exécutif de mon Programme avant sa prochaine session de printemps, espérant que ces plans nous permettront de mener à bien les principaux projets d'aide aux anciens réfugiés d'Europe. Après avoir déjà tant fait, je suis convaincu que les nations auront à coeur de faire un dernier effort pour régler définitivement ce problème qui nous préoccupe depuis si longtemps.

Monsieur le Président, je sais que le Conseil a fort à faire et je ne m'étendrai donc pas davantage. J'ai évite d'aborder les détails techniques. Je voudrais cependant adresser un appel au CIME pour qu'il continue de prêter son concours non seulement en contribuant comme par le passé à la réinstallation des réfugiés, mais aussi en continuant d'aider efficacement le Haut Commissariat à réinstaller ceux qui ont tout perdu, dans les pays disposés à leur donner la possibilité de se refaire une nouvelle vie.