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CONFERENCE DE PLENIPOTENTIAIRES SUR LE STATUT DES REFUGIES ET DES APATRIDES : COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA DIX-HUITIEME SEANCE

CONFERENCE DE PLENIPOTENTIAIRES SUR LE STATUT DES REFUGIES ET DES APATRIDES : COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA DIX-HUITIEME SEANCE
A/CONF.2/SR.18

23 Novembre 1951
Présents
Président :M. LARSEN
Membres
AustralieM. SHAW
AutricheM. FRITZER
BelgiqueM. HERMENT
BrésilM. OLLANTO de OLIVEIRA
CanadaM. CHANCE
ColombieM. GIRALDO-JARAMILLO
DanemarkM. HOEG
EgypteMUSTAPHA Bey
Etats-Unis d'AmériqueM. WARREN
FranceM. ROCHEFORT
GrèceM. PAPAYANNIS
IrakM. Al PACHACHI
IsraëlM. KAHANY
M. ROBINSON
ItalieM. THEODOLI
LuxembourgM. STURM
MonacoM. BICHERT
NorvègeM. ARFF
Pays-BasBaron van BOETZELAER
République fédérale allemandeM. von TRÜTZSCHLER
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du NordM. HOARE
Saint-SiègeMgr BERNARDINI, Archevêque d'Antioche de Pisidie
SuèdeM. PETREN
Suisse (et Liechtenstein)M. ZUTTER
M. SCHURCH
TurquieM. MIRAS
VenezuelaM. MONTOYA
YougoslavieM. MAKIEDO
Observateur
IranM. KAZEMI
Haut-Commissaire pour les réfugiésM. van HEUVEN GOEDHART
Représentants d'institutions spécialisées at d'autres organisations gouvernementales :
Caritas InternationalisM. WOLF
Organisation internationale pour les réfugiésM. STEPHENS
M. SCHNITZER
Représentants d'organisations non gouvernementales :
Caritas Internationalis
Caritas InternationalisM. BRAUN
M. METTERNICH
Comité de coordination d'organisations juivesM. WARBURG
Comité consultatif mondial de la Société des AmisM. BELL
Comité des églises pour les affaires internationalesM. REES
Comité permanent des agences bénévolesM. REES
Congrès juif mondialM. RIEGNER
Conseil international des femmesMme GIROD
Conseil consultatif d'organisations juivesM. MEYROWITZ
Ligue internationale des droits de l'hommeMme BAER
Ligue internationale des femmes pour la paix et la libertéMme BAER
Service social internationalMlle FERRIERE
Union catholique internationale de service socialMlle de ROMER
Secrétariat :
M, HumphreySecrétaire exécutif
Mlle KitchenSecrétaire exécutive adjointe

1. EXAMEN DU PROJET DE CONVENTION RELATIVE AU STATUT DES REFUGIES (Point 5 a) de l'ordre du jour) (A/CONF.2/1 et Corr.1, A/CONF.2/5) (suite)

i) Article 23 et Annexe - titres de voyage (A/CONF.2/31, A/CONF.2/59, A/CONF.2/64) (suite)

Le PRESIDENT invite la conférence à poursuivre l'examen de l'Annexe au projet de convention (titre de voyage) (A/CONF.2/1, pages 23-25).

Paragraphe 4

A l'unanimité, le paragraphe 4 est adopté sans observations.

Paragraphe 5

M. MAKIEDO (Yougoslavie) déclare que l'amendement au paragraphe 5 qu'il a proposé (A/CONF.2/31, page 3) est conforme à la pratique suivie en Yougoslavie et dans la plupart des autres pays. En règle générale, les titres de voyage ont une validité de six mois à deux ans.

M. HERMENT (Belgique) indique qu'il ne s'agit là que d'une pratique nationale. En Belgique, la durée de validité des passeports varie de trois mois à deux ans. L'intérêt des réfugiés est de pouvoir obtenir un passeport dont la validité est de trois mois, car le coût de ce passeport est moins élevé. C'est pourquoi la délégation de la Belgique présente à l'amendement yougoslave un sous-amendement qui tend à remplacer les mots « de six mois à deux ans » par les mots « de trois mois à deux ans ».

M. MAKIEDO (Yougoslavie) accepte l'amendement formulé par le représentant de la Belgique.

M. ZUTTER (Suisse) se demande s'il est bien nécessaire de réduire la durée minimum de validité du titre de voyage. Ne suffirait-il pas que dans des cas exceptionnels, les Etats soient libres en vertu du paragraphe 13 de l'annexe, de limiter la durée de la période pendant laquelle le réfugié peut rentrer sur le territoire du pays de délivrance, à trois mois au moins et conserver le texte original du paragraphe 5.

M. HERMENT (Belgique) estime que l'amendement belge sert l'intérêt des réfugiés. Selon le texte actuel du paragraphe 5, un réfugié ne voulant séjourner que deux ou trois mois hors du territoire du pays de délivrance devra néanmoins solliciter un passeport valable un ou deux ans, ce qui entraînera pour lui une plus grande dépense.

M. von TRÜTZSCHLER (République fédérale allemande) signale que l'amendement du représentant de la Belgique pourrait également aller à l'encontre des intérêts des réfugiés. En effet, s'il était adopté, les autorités compétentes pourraient délivrer un titre de voyage d'une validité de trois mois seulement, même si le réfugié en question préférait recevoir un document ayant une plus longue validité.

Il estime également que les titres de voyage émis conformément à l'Annexe devraient être du même genre que les titres établis en vertu d'accords antérieurs, si l'on veut que ces derniers titres gardent leur validité.

Le PRESIDENT fait observer que le droit de rentrer dans un pays peut être considéré sous deux aspects : d'une part, les relations entre le réfugié et le pays dans lequel il désire rentrer, et, d'autre part, les relations entre le réfugié et le pays qui l'a accueilli en supposant que son titre de voyage lui donne le droit de retourner dans le pays d'où il est venu. Si un Etat peut refuser de réadmettre sur son territoire le réfugié, même à la demande d'un autre Etat contractant, les consuls et autres autorités compétentes des autres Etats hésiteront certainement à accorder des visas de transit.

Par 15 voix contre 4, avec 6 abstentions, l'amendement de la Yougoslavie, modifié par le représentant de la Belgique, est rejeté.

A l'unanimité le paragraphe 5 est adopté.

Paragraphes 6, 7 et 8

A l'unanimité, les paragraphes 6, 7 et 8 sont adoptés sans observations.

Paragraphe 9

M. MAKIEDO (Yougoslavie), présentant son amendement (A/CONF.2/31, pages 3-4), indique que la pratique généralement suivie par tous les pays représentés à la conférence est de délivrer sans délai les visas de transit. D'autre part, les gouvernements ne sauraient assumer, à cet égard, une obligation inconditionnelle. Le Gouvernement yougoslave continuera, naturellement, à suivre la pratique générale et délivrera rapidement les visas, comme il l'a fait jusqu'ici, en ne les refusant que dans des cas exceptionnels.

M. Makiedo ajoute qu'il retire le deuxième membre de phrase de son amendement.

M. MONTOYA (Venezuela) fait remarquer que le paragraphe 9 de l'Annexe oblige les Etats contractants à délivrer des visas de transit aux réfugiés ayant obtenu le visa pour un territoire de destination finale. Or, il arrive souvent que, bien qu'un visa de destination finale ait été accordé à un réfugié, l'Etat où il réside exige que ce réfugié produise, comme preuve de sa bonne foi, un billet d'avion ou de bateau pour le pays de destination finale. Ne conviendrait-il pas de consacrer cette pratique et de préciser, au paragraphe 9, que les visas de transit seront délivrés aux réfugiés de bonne foi produisant un billet pour leur destination finale ?

M. KAHANY (Israël) se demande si, étant donné les dispositions de l'article 21 du projet de Convention, l'amendement de la Yougoslavie est vraiment nécessaire.

Le PRESIDENT doute que la question soit réglée par l'article 21 ; en effet, cet article vise les réfugiés qui se trouvent déjà régulièrement sur le territoire du pays de transit, tandis que la Conférence examine, en ce moment, la question de leur entrée dans ledit pays.

MUSTAPHA Bey (Egypte) signale que le texte actuel du paragraphe 9 pose un problème pour la délégation égyptienne en ce qui concerne l'immigration massive. Les pays de transit peuvent, en pareil cas, éprouver des difficultés pour appliquer les dispositions du paragraphe 9. Il conviendrait donc d'introduire, dans ce paragraphe, certaines réserves fondées sur des considérations de sécurité publique.

Il propose donc d'ajouter, à la fin du paragraphe 9, les mots « sous réserve des exigences de la sécurité nationale et de l'ordre public ».

M. HOEG (Danemark) indique que, lorsque le gouvernement danois délivre un visa de transit à un étranger, il le fait en général sous réserve que le visa valable pour le pays de destination finale ait une durée de validité supérieure de deux mois à celle du visa de transit. M. Hoeg se demande si une telle condition serait autorisée aux termes du paragraphe 9.

M. MONTOYA (Venezuela) attire l'attention de la Conférence sur la situation des pays d'immigration comme le Venezuela. Ces pays ne peuvent, en effet, délivrer des visas de transit qu'aux réfugiés qui sont en mesure de fournir la preuve qu'ils ont les moyens de se rendre dans le pays de destination.

M. GIRALDO-JARAMILLO (Colombie) comprend très bien les difficultés mentionnées par les représentants de l'Egypte et du Venezuela, mais il estime que l'amendement de la Yougoslavie, pour lequel il a l'intention de voter, permet de les surmonter.

M. MONTOYA (Venezuela) reconnaît le bien-fondé de l'observation du représentant de la Colombie et appuie l'amendement yougoslave.

Par 11 voix contre 6, avec 7 abstentions, l'amendement de la Yougoslavie au paragraphe 9 (A/CONF.2/31, pages 3-4), moins le deuxième membre de phrase, est adopté.

MUSTAPHA Bey (Egypte) n'est pas entièrement satisfait de l'amendement de la Yougoslavie, mais, puisque celui-ci a été adopté, il retire l'amendement qu'il avait présenté.

Par 22 voix contre zéro, avec 3 abstentions, le paragraphe 9, ainsi amendé, est adopté.

Paragraphes 10 et 11

A l'unanimité les paragraphes 10 et 11 sont adoptés sans observations.

Paragraphe 12

M. MAKIEDO (Yougoslavie), en présentant son amendement au paragraphe 12 (A/CONF.2/31, page 4), juge indispensable que le titre de voyage retiré à un réfugié soit retourné au pays qui l'a délivré. Lorsqu'une personne change de nationalité, son passeport, selon la pratique généralement admise, est renvoyé au pays de délivrance.

M. HERMENT (Belgique) estime que l'amendement yougoslave au paragraphe 12 de l'Annexe doit être examiné conjointement avec l'amendement italien (A/CONF.2/64) au paragraphe 3 du texte du modèle du titre de voyage joint à l'Annexe.

M. THEODOLI (Italie) partage ce point de vue. Il importe, toutefois, que l'obligation de retourner le document retiré soit mentionnée sur la pièce elle-même, de manière que les autorités intéressées soient au courant de la situation.

M. HERMENT (Belgique) estime qu'il conviendrait, pour assurer la concordance des deux textes, de modifier l'amendement yougoslave en remplaçant les mots « au pays qui l'a délivré » par les mots « à l'autorité qui l'a émis ».

M. HOARE (Royaume-Uni) n'élève pas d'objection fondamentale contre l'amendement de l'Italie, mais il ne comprend pas bien quel est son objet. Il est compréhensible qu'une personne qui a changé de nationalité doive retourner son passeport au pays de délivrance. Les titres de voyage du type prévu au paragraphe 12, en revanche, perdent leur validité dès qu'ils sont retirés, et le représentant du Royaume-Uni ne voit aucune raison de les retourner aux autorités qui les ont émis et dont la tâche est déjà suffisamment lourde.

M. THEODOLI (Italie) répond que l'expérience a prouvé que les réfugiés prétendaient très souvent avoir perdu certaines pièces, afin d'en recevoir des duplicata. Aucun pays ne désire voir un document qu'il a émis rester en circulation après expiration de sa validité. C'est pour cette raison que M. Theodoli a proposé que les titres de voyage retirés fussent retournés aux pays d'origine. Il est également souhaitable de savoir si un réfugié qui a quitté le pays de transit possède de nouveaux documents.

Le PRESIDENT déclare que certaines questions ayant trait au texte du paragraphe 12, y compris celles qui ont été soulevées par le représentant de la Belgique à propos de l'amendement présenté par la Yougoslavie, pourraient être traitées par le Comité de style.

Par 3 voix contre une, avec 20 abstentions, l'amendement de la Yougoslavie est adopté.

A l'unanimité, le paragraphe 12, ainsi amendé, est adopté.

Paragraphe 13

M. ROCHEFORT (France) expose les raisons qui ont inspiré l'amendement présenté par la France (A/CONF.2/59). En France, le règlement actuellement en vigueur pour la délivrance des visas aux réfugiés est le suivant : en application de l'article 2 de la Convention de 1933 et en vertu d'un décret du Gouvernement français, les réfugiés Nansen, les réfugiés en provenance d'Allemagne et d'Autriche ainsi que les réfugiés espagnols relevant du mandat de l'Organisation internationale pour les réfugiés bénéficient d'une dispense de visa. Pour les autres réfugiés, la France est libre de leur imposer l'obligation du visa ou de les en dispenser.

Si le texte actuel du paragraphe 13 de l'annexe est maintenu, le Gouvernement français se verra dans l'obligation de faire des réserves sur ce paragraphe ou reportera le problème sur la question de la délivrance du titre de voyage, ce qui risquera de placer les intéressés dans une situation moins avantageuse que celle dont ils bénéficient actuellement. On aboutira à refuser un titre de voyage, au lieu de refuser un visa.

M. GIRALDO-JARAMILLO (Colombie) déclare s'associer entièrement aux observations du représentant de la France, bien que la Colombie se trouve dans une situation différente. Il ne peut accepter le texte primitif du paragraphe 13, et, dans ces conditions, il donnera son appui à l'amendement du représentant de la France.

Le PRESIDENT estime que, dans ce cas, il devrait y avoir deux catégories de titres de voyage : un titre pour les pays qui sont disposés à permettre le retour des réfugiés sans le subordonner à des conditions ; un autre, pour les pays qui exigent un visa de retour.

M. ROCHEFORT (France) ne comprend pas comment les observations du Président pourraient se référer à l'amendement de la France, qui ne porte pas sur la question de l'entrée et de la sortie des titulaires de titres de voyage.

Le PRESIDENT cite le cas d'une personne qui est venue au Danemark avec un titre de voyage émis dans le cadre de l'Accord de Londres du 1946. Elle avait demandé au consul du Danemark dans son pays d'origine, un visa danois valable trois mois, mais, au bout de cette période, il lui a été impossible de rentrer dans son pays d'origine, les autorités de ce dernier pays ayant objecté qu'elle ne possédait pas le visa de retour nécessaire.

M. MONTOYA (Venezuela) partage le point de vue du représentant de la France. Si l'on n'accepte pas la modification proposée par la France, les pays refuseront de délivrer des titres de voyage à certains réfugiés, et ceux-ci ne pourront donc pas quitter leur pays de résidence. Le Venezuela ne peut accepter le texte actuel du paragraphe 13 de l'annexe, ni le libellé du titre de voyage qui, tous deux assurent aux réfugiés, d'une façon inconditionnelle, le droit de retour.

M. ROCHEFORT (France) indique que, si le réfugié est soumis au visa, ce visa comportera l'autorisation de retour. Mais la France veut pourvoir contrôler les allées et venues des réfugiés qui se trouvent sur son territoire et auxquels on ne peut pas toujours faire aveuglément confiance.

M. THEODOLI (Italie) est du même avis que le représentant du Venezuela.

M. HOARE (Royaume-Uni) fait observer que, si un titre de voyage confère automatiquement à son titulaire le droit de retourner dans le pays de délivrance, toute la question devient peut-être une affaire de formalités à observer. Dans l'hypothèse où un visa de retour sera normalement accordé au réfugié avant son départ, il n'y aura de difficulté que si un réfugié quittait un pays qui exige un visa de retour, sans avoir obtenu ce visa.

M. ROCHEFORT (France) estime que le texte de l'alinéa 1 du paragraphe 13 est parfaitement clair.

Le PRESIDENT, parlant en qualité de délégué du Danemark, expose que ce qui le préoccupe c'est qu'un pays pourrait permettre l'entrée d'un réfugié, les autorités étant convaincues que son titre de voyage, qui lui accorde le droit de retour, a reçu un visa en toute bonne foi du pays d'où il est venu. Quelle est la situation dans laquelle se trouvera le pays qui a admis ce réfugié, si ce réfugié ne s'est pas conformé aux prescriptions en vigueur dans le pays qui a délivré le titre ? Il est essentiel de créer un titre de voyage qui soit conforme aux prescriptions en vigueur dans les divers Etats et aux obligations internationales assumées par eux. Ce titre doit définir clairement les droits dont bénéficie son titulaire.

Au Danemark, un titre de voyage confère implicitement au détenteur le droit de retour. M. Larsen ne sait pas si tel est également le cas pour les pays qui exigent des visas d'entrée et de sortie.

M. ROCHEFORT (France) ne croit pas que les arguments présentés par le Président s'opposent à l'amendement de la France. Le paragraphe 13 ne soulèvera pas de difficultés. Le texte de ce paragraphe parle, en effet, de la sortie et de la rentrée du titulaire du titre de voyage. L'amendement français a seulement pour but de permettre de surveiller les allées et venues de certains réfugiés dont beaucoup sont entrés irrégulièrement sur le territoire français.

M. HERMENT (Belgique) fait observer que le spécimen de titre de voyage joint à l'Annexe ne mentionne pas la nécessité du visa. Les termes dans lesquels ce titre est établi comportent implicitement l'autorisation de retour. Il ne peut donc y avoir d'inconvénient à accepter l'amendement de la France.

M. MONTOYA (Venezuela) demande si les termes dans lesquels le titre de voyage est établi signifient que les Etats d'outre-mer auront la possibilité de renvoyer un réfugié dans un pays de transit en Europe. L'Etat qui a délivré le titre de voyage pourra-t-il s'opposer à la rentrée de ces réfugiés ?

Le PRESIDENT déclare que tout détenteur d'un titre de voyage danois a le droit de retourner au Danemark, pourvu que ce titre soit encore valable.

M. CHANCE (Canada) estime qu'on écarterait peut-être les difficultés soulevées au cours des débats si l'on ajoutait au paragraphe 2 du modèle du titre de voyage joint à l'annexe du projet de convention les mots « avec (sans) visa de retour », après les mots « le titulaire est autorisé à retourner en ... ».

M. WARREN (Etats-Unis d'Amérique) estime que les objections soulevées par le représentant de la France proviennent du fait qu'en vertu des dispositions de l'alinéa 1 du paragraphe 13, le gouvernement français serait obligé d'autoriser le titulaire d'un titre de voyage, établi par lui, à rentrer en France, même si ce titulaire n'avait jamais obtenu de visa pendant toute la période de validité de ce titre, période qui pourrait s'étendre jusqu'à deux ans. Si le gouvernement français tient particulièrement à stipuler qu'un réfugié doit retourner en France au bout d'une période de trois mois au maximum on pourrait peut-être tenir compte de ce désir en ajoutant audit alinéa après les mots « pendant la période de validité du titre », les termes « et pendant la période où le retour est autorisé ». Sans une clause de ce genre, le pays ayant émis le titre de voyage serait obligé de permettre l'entrée d'un réfugié qui revient sans visa après l'expiration de la période de trois mois. M. Warren craint, toutefois, que, si l'on adoptait l'amendement présenté par le représentant de la France qui prévoit la suppression des mots « sans visa des autorités de ce pays", à l'alinéa 1 du paragraphe 13, on susciterait des doutes sur le point de savoir si le titulaire d'un titre de voyage peut, en fait, retourner dans ce pays au cours de la période de trois mois.

M. ROCHEFORT (France) indique qu'il ne s'agit pas tant pour la France de contrôler la rentrée d'un réfugié sur le territoire français que de contrôler sa sortie. Il est évident que la sortie implique le retour. Dans l'état actuel des choses, un titre de voyage qui ne comporterait pas de clause de retour ne signifierait rien.

M. HERMENT (Belgique) demande au représentant de la France si un réfugié ayant obtenu un passeport visé lui donnant le droit de rentrer en France dans un délai de trois mois, devra encore solliciter un visa de retour au moment de sa rentrée.

M. ROCHEFORT (France) dit qu'il est évident que le visa accordé à un réfugié impliquera le droit de retour pour ce réfugié. Cela est dit explicitement au premier alinéa du paragraphe 13. Il ne comprend donc pas les difficultés soulevées à ce sujet.

Le PRESIDENT rappelle que l'alinéa 1 du paragraphe 13 a été discuté d'une manière approfondie au Comité spécial et que deux amendements présentés par le Danemark ont été repoussés. Finalement, le texte soumis par le représentant des Etats-Unis a réuni l'unanimité. Le Président est donc quelque peu surpris de constater que toute la question donne encore lieu à de si longs débats. Il croit cependant, que toutes les objections soulevées, dont il reconnaît pleinement qu'elles sont justifiées, seraient écartées si l'on adoptait l'amendement suggéré par le représentant du Canada, qui prévoit une modification au paragraphe 2 du modèle du titre de voyage joint à l'Annexe. De cette manière, les droits dont jouit le titulaire d'un titre de voyage serraient parfaitement précisés.

M. von TRÜTZSCHLER (République fédérale allemande) suppose qu'un réfugié, détenteur d'un titre de voyage émis par les autorités françaises, et qui aurait quitté la France sans visa, serait autorisé à retourner en France mais pourrait être poursuivi pour infraction à la législation en vigueur.

M. ROCHEFORT (France) dit que la rédaction actuelle du modèle de titre de voyage, amendé suivant la proposition du Canada, est acceptable. La mention suggérée par le représentant du Canada indiquera, en effet, clairement que l'autorisation de retour peut être ou non subordonnée à la délivrance d'un visa.

Le PRESIDENT, parlant en qualité de représentant du Danemark, déclare qu'il accepterait out à fait l'amendement présenté par le représentant de la France, sous réserve que la modification proposée par le représentant du Canada au paragraphe 2 du modèle de titre de voyage soit, elle aussi, adoptée.

M. MONTOYA (Venezuela) déclare qu'un étranger ne peut entrer au Venezuela ou sortir de ce pays sans être muni d'un visa. La délégation du Venezuela peut donc accepter l'amendement français aussi bien que l'amendement canadien.

M. GIRALDO-JARAMILLO (Colombie) avoue ne pas comprendre comment il est possible d'empêcher les Etats d'exercer une surveillance sur l'entrée et la sortie des réfugiés. A son avis, ce droit ne peut être soumis à restriction, et toute tentative dans ce sens pourrait rendre la ratification de la Convention difficile pour certains gouvernements.

M. HOARE (Royaume-Uni) déclare que la Conférence doit étudier de plus près les répercussions de l'amendement français. Le principe fondamental qui inspire des dispositions du paragraphe 13 est que les Etats qui délivrent des titres de voyage à des réfugiés résidant dans les limites de leur territoire s'obligent à leur permettre d'y rentrer, pendant la période de validité de ces titres. Le représentant du Royaume-Uni tient vivement à ce qu'aucune atteinte ne soit portée à ce principe.

Le représentant de la Colombie a soulevé une question importante ; il convient toutefois de distinguer nettement entre le droit d'exercer un contrôle et le droit pour un Etat de refuser l'entrée dans son pays. Il faut reconnaître que les gouvernements peuvent vouloir exercer un contrôle sur les déplacements des réfugiés. Ils peuvent le faire tout naturellement en rendant obligatoires les visas de sortie et d'entrée. Reste, toutefois, le cas des réfugiés qui négligent de se soumettre à ces formalités et qui réussissent néanmoins à quitter le pays sans avoir obtenu un visa de retour. Ces personnes doivent alors, dans le pays où elles se trouvent, faire une demande de visa et, pendant ce temps, la validité de leur titre de voyage peut venir à expiration. Quel est, en pareil cas, la situation du gouvernement du pays dans lequel ces réfugiés se trouvent temporairement ?

M. van HEUVEN GOEDHART (Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés) souligne la grande importance que revêtent les titres de voyage, tant pour les réfugiés que pour les Etats. Même les pays de rétablissement estiment que les titres de voyage devraient contenir une clause autorisant les réfugiés à rentrer dans le pays de délivrance ; et, de fait, l'Accord de Londres de 1946, relatif à la délivrance d'un titre de voyage aux réfugiés contient une clause à cet effet. Il serait déplorable qu'une modification quelconque fut opérée sur ce point.

Le Haut-Commissaire estime que, pour répondre aux préoccupations du représentant de la France qui souhaite que les gouvernements soient en mesure de contrôler les mouvements de certains réfugiés, il suffirait d'insérer, après les mots « dans des cas exceptionnels » au second alinéa du paragraphe 13, une formule telle que : « ... de soumettre le retour des réfugiés à la délivrance d'un visa de retour ». Le premier alinéa pourrait alors demeurer inchangé.

M. ROCHEFORT (France) comprend bien les intentions du Haut Commissaire pour les Réfugiés ; mais la proposition du Haut-Commissaire ne répond pas aux préoccupations du gouvernement français et elle a un caractère plus restrictif, car elle fait dépendre la rentrée du réfugié d'un visa de retour. Or, le titre de voyage donne le droit de sortie et de rentrée. Il s'agit uniquement, dans l'amendement français, d'un visa qui constate la sortie du réfugié.

M. GIRALDO-JARAMILLO (Colombie) estime l'amendement français préférable à la suggestion proposée par le Haut-Commissaire. Les formalités de visa qui existent dans certains Etats offrent une garantie supplémentaire de réadmission qui vient s'ajouter à celle fournie par le titre de voyage.

M. MIRAS (Turquie) indique que, si l'on adoptait l'amendement de la France, il conviendrait de supprimer la deuxième phrase de l'alinéa 1 du paragraphe 13, dont le texte a d'ailleurs été suggéré au comité spécial par la délégation turque.

M. MONTOYA (Venezuela) signale que les réfugiés se trouvant provisoirement dans un pays qui n'est pas celui de leur résidence, pourraient peut-être se livrer à certaines activités qui entraîneraient le retrait de leur titre de voyage. Ces personnes doivent-elles être assurées de leur réadmission par le pays qui a délivré le titre de voyage ?

Le PRESIDENT expose que cette question présente deux aspects : d'une part, les obligations respectives du pays de délivrance et celles du pays dans lequel les réfugiés sont admis à séjourner provisoirement ; et, de l'autre, les relations entre le pays de délivrance et le titulaire du titre de voyage. Les pays de délivrance peuvent imposer toute réglementation qu'il désirent appliquer à la sortie et à l'entrée des réfugiés ; néanmoins, ce qui préoccupe le Président, c'est d'obtenir que ces pays prennent l'engagement inconditionnel de réadmettre les titulaires de titres de voyage qu'ils ont eux-mêmes délivrés. Le Président n'estime pas qu'un tel principe soit incompatible avec un certain degré de surveillance, comme l'envisage le représentant de la France. Il convient, toutefois, de veiller à ce que les pays qui admettent les réfugiés pour de courtes périodes n'aient pas à en souffrir ou ne soient pas mis en difficulté par les règlements des Etats qui délivrent les titres de voyage.

M. ROCHEFORT (France) est d'accord avec le Président sur l'interprétation que celui-ci vient de donner de l'amendement français. Au fond, c'est la version anglaise, du paragraphe 13, qui est à l'origine de la confusion, car, dans cette version, la dispense de visa semble se rapporter au visa de retour, alors que, dans la version française, elle se rapporte évidemment aux visas de sortie et de retour.

M. HOARE (Royaume-Uni) signale que le premier alinéa du paragraphe 13 sous sa forme actuelle assimile les réfugiés sans visa aux étrangers munis d'un visa. Toutefois, au cas où l'amendement français serait adopté, il faudrait modifier la forme pour préciser que ces réfugiés ne sont pas assimilés à des étrangers résidents qui ont besoin d'un visa pour être ré-admis.

Le PRESIDENT fait observer que cette question est surtout une question de rédaction, et que les difficultés pourraient être plus aisément résolues par un groupe de travail restreint qui serait chargé de rédiger à nouveau le paragraphe 13. Il invite, en conséquence, les représentants du Canada, des Etats-Unis d'Amérique, de la France, du Royaume-Uni et du Venezuela, ainsi que le Haut-Commissaire pour les réfugiés à entreprendre ce travail.

M. ROCHEFORT (France) ne s'oppose pas à la suggestion du Président. Toutefois, il ne faut pas que ce Groupe de travail soit seulement chargé de questions de rédaction, ce doit être un Groupe de travail qui examinera le fond de la question. En effet, il n'y a pas qu'une différence d'ordre rédactionnel à résoudre si l'on considère que le texte du paragraphe 13 est le même que celui de l'article 15 de l'Accord de Londres de 1946, qui marque lui-même une différence considérable avec la Convention de 1933.

La proposition du Président tendant à la désignation d'un groupe de travail restreint, chargé d'étudier à nouveau le paragraphe 13, est adoptée.

Paragraphes 14, 15 et 16.

M. MONTOYA (Venezuela) propose que l'on s'abstienne de prendre une décision au sujet du paragraphe 14, étant donné que ce paragraphe se réfère au paragraphe 13, qui n'a pas encore été adopté sous sa forme définitive.

M. HOARE (Royaume-Uni) fait observer que le paragraphe 14 est destiné à garantir toutes les dispositions des lois et règlements en vigueur sous réserve des stipulations du paragraphe précédent ; il peut, en conséquence, être adopté indépendamment de ce dernier, et avant lui.

En l'absence d'observations, le PRESIDENT propose d'adopter les paragraphes 14, 15 et 16, étant entendu que toutes modifications importantes nécessitées par des amendements apportés à d'autres parties de la convention pourront être effectués lors de la seconde lecture.

A l'unanimité, les paragraphes 14, 15 et 16 de l'Annexe sont adoptés, avec la réserve qui vient d'être énoncée.

Complément de l'Annexe. Modèle de titre de voyage.

Le PRESIDENT attire l'attention des représentants sur le deuxième amendement italien (A/CONF.2/64) relatif au modèle de titre de voyage joint à l'Annexe ; la substance de cet amendement a déjà été incorporée à cette annexe elle-même.

M. HOARE (Royaume-Uni) indique que l'amendement italien lui paraît superflu. Les titulaires de titres de voyage anciens ne sauraient ignorer l'obligation qui leur incombe de les garder et de les présenter aux autorités, dans le cas où ils auraient élu résidence dans un autre pays et demandé un nouveau titre de voyage, puisque s'ils ne rendent pas l'ancien, ils pourraient avoir des difficultés pour obtenir le nouveau.

M. THEODOLI (Italie) signale que parfois des réfugiés ont vendu leurs anciens titres de voyage après en avoir obtenu de nouveaux. Le Gouvernement italien attache une grande importance à ce que les instructions énoncées dans l'amendement de l'Italie soient insérées dans le titre de voyage lui-même, car il importe d'éviter que des réfugiés ne soient en possession de deux titres de voyage délivrés par deux pays différents. Cependant, si l'on juge que des modifications rédactionnelles doivent être apportées à cet amendement, M. Theodoli n'a pas d'objections à ce que l'amendement soit soumis, pour examen, au Comité de style.

M. HOARE (Royaume-Uni) doute que le fait d'insérer dans le titre de voyage lui-même une indication sur ce que doivent en faire les autorités puisse effectivement empêcher les réfugiés de disposer illicitement de leur titre de voyage, si telle est leur intention. Une disposition de cette nature figure déjà au paragraphe 12 de l'Annexe.

M. ROCHEFORT (France) suggère que le représentant de l'Italie fasse partie du groupe de travail institué pour l'examen du paragraphe 13.

Le PRESIDENT invite le représentant de l'Italie à faire partie de ce Groupe de travail.

Il met alors aux voix la substance du second amendement de l'Italie (A/CONF.2/64), étant entendu que le groupe de travail sera chargé d'examiner non seulement le paragraphe 13 de l'Annexe, mais aussi le modèle de titre de voyage joint à cette dernière.

Par 12 voix contre zéro, avec 13 abstentions, l'amendement italien est adopté, compte tenu des indications ci-dessus.

ii) Article 3 - Non discrimination (A/CONF.2/72) (Reprise des délibérations de la sixième séance).

Le PRESIDENT invite la Conférence à reprendre l'examen de l'article 3 et attire l'attention des représentants sur le rapport (A/CONF.2/72) du Comité chargé d'étudier ledit article.

M. CHANCE (Canada) rend hommage au travail accompli par le Comité qui a consacré beaucoup de temps et de réflexion à l'étude d'un problème des plus litigieux. Il est disposé, pour sa part, à accepter le texte répondant à la sixième possibilité soumise à la Conférence.

M. ROCHEFORT (France) déclare que la délégation française tiendrait essentiellement à ce que le nouvel article envisagé fût examiné dans le cadre de l'article premier. Il propose donc d'ajourner la décision définitive sur l'article 3 jusqu'au moment où l'article 1 aura été examiné.

Il en est ainsi décidé.

2. Questions des langues dans lesquelles le projet de convention doit être rédigé

Le PRESIDENT attire l'attention de la Conférence sur la question des langues dans lesquelles sera établi le texte de la Convention. Il y a plusieurs possibilités. La Conférence peut se considérer comme un organisme convoqué par l'Organisation des Nations Unies et suivre des règles usuelles de cette Organisation en rédigeant ses documents définitifs dans les cinq langues officielles. Cette manière de faire aurait l'avantage d'éviter à la Conférence le souci d'entrer dans les détails techniques de la terminologie juridique, mais elle aurait l'inconvénient d'imposer au Secrétariat la charge d'établir les textes dans des langues dont il n'a pas été fait usage au cours des débats.

La conférence pourrait également considérer qu'elle constitue une assemblée diplomatique de plénipotentiaires et décider elle-même du choix des langues à utiliser pour l'établissement des documents définitifs ; elle pourrait, par exemple, se limiter à l'anglais et au français, ou y ajouter l'espagnol. La Conférence devrait aussi examiner si pour l'établissement de ces textes les langues des délégations représentées, autres que les cinq langues officielles des Nations Unies devraient être utilisées, mais, s'il en était ainsi décidé, le Secrétariat ne serait pas en mesure de collaborer à ces traductions. En conclusion, le Président prie les délégations de réfléchir à cette question qui devra être réglée d'ici peu.

3. Programme de travail

Après une brève discussion, à laquelle prennent part M. HOARE (Royaume-Uni), le PRESIDENT, M. PETREN (Suède) et M. ROCHEFORT (France), le Président propose que la conférence entreprenne, à sa prochaine séance, l'examen de l'article premier du projet de convention.

Il en est ainsi décidé.

La séance est levée à 18 heures.