L'espoir renaît parmi les réfugiés rescapés au sud du Tchad
L'espoir renaît parmi les réfugiés rescapés au sud du Tchad
CAMP D'AMBOKO, Tchad, 19 septembre (UNHCR) - Elisabeth Noudiguto, âgée de 22 ans, a donné naissance à une petite fille au camp de réfugiés d'Amboko vendredi dernier : un événement qui passerait inaperçu, s'il n'avait pas eu lieu juste une heure après son arrivée au camp à la suite d'un éprouvant voyage qui avait commencé par une marche de 17 km depuis le petit village de Bekan, à la frontière tchadienne, suivie par une traversée en canoë de la rivière Nya, et enfin d'un trajet épuisant de 2 heures et demi en camion sur une très mauvaise piste boueuse.
Avant ce terrible trajet, Elisabeth, prête à accoucher, et sa famille - avec quelques milliers d'autres réfugiés récemment arrivés de République centrafricaine - ont passé plus de trois semaines, vivant de racines et de fruits, lors de leur isolement de la région frontalière en raison de pluies torrentielles et d'inondations.
Auparavant, elle avait dû fuir son village et son pays, laissant derrière elle le père de ses enfants.
Elisabeth était membre du premier groupe des 141 réfugiés transférés au camp d'Amboko, situé près de Goré, la ville principale au sud du Tchad, alors que l'agence des Nations Unies pour les réfugiés et ses partenaires commençaient une opération d'évacuation d'urgence planifiée pour vendredi dernier.
Heureusement pour Elisabeth, elle est arrivée au centre médical du camp géré par COOPI, une ONG italienne, juste avant d'accoucher. Malgré le long voyage et les conditions de vie très difficiles qui l'ont précédé, le bébé et la mère sont en bonne santé.
« C'est une bonne nouvelle d'avoir une petite fille en bonne santé à notre arrivée dans le camp », a dit Suzanne, sa grand-mère fière et souriante, en faisant la toilette du bébé. Sa famille, comme beaucoup d'autres originaires de cette partie nord de la République centrafricaine, ont été frappés par une série de malheurs à chaque fois pires.
Forcés de fuir leur village au début du mois dernier, après des attaques d'hommes lourdement armés, ils se font ensuite fait voler la plupart de leurs possessions par des bergers nomades. A peine avaient-ils échappé à leurs persécuteurs en traversant la frontière, qu'ils ont été frappés cette fois par la nature, les inondations les ont isolés et forcés à fouiller pour trouver de la nourriture et survivre.
Vendredi, néanmoins, tout cela était oublié - au moins pour un court moment - avec l'arrivée d'un nouveau membre dans la famille. Voulant considérer la naissance de cette petite fille comme un bon présage, sa mère a décidé de l'appeler Tarasum - ce qui signifie « le problème est résolu » en langue sengo. C'est une référence, a-t-elle expliqué, au transfert des familles de la région inondée de Bekan vers le camp d'Amboko. « Nous sommes bien mieux ici dans le camp et il y a aussi un bon centre de santé », a dit Elisabeth, soulagée et reconnaissante.
En dehors des salles de classe dans le camp, où les nouveaux arrivants sont logés, les enfants jouent - ou mieux, les enfants assez robustes courent. Beaucoup d'autres souffrent de malnutrition, de malaria et d'infections pulmomaires.
A ce jour, 27 cas de malnutrition sévère ont été rapportés par COOPI, l'ONG qui gère la clinique du camp. Parmi eux, une grande majorité est composée de nouveaux arrivants de République centrafricaine. Les enfants souffrant de malnutrition sont pesés tous les matins pour mesurer leur prise d'aliments, on leur donne de la nourriture supplémentaire et ils sont gardés sous l'étroite surveillance des médecins et des infirmières. La longueur de leur séjour à la clinique dépendra du temps nécessaire pour rétablir leur santé : quelques jours pour certains, plusieurs semaines pour d'autres.
« Dans la forêt, nous avons été forcés de manger seulement ce que nous trouvions. Les enfants sont ceux qui ont le plus souffert », dit Dounia Nahel, un viel homme de 50 ans, ayant récemment fui la République centrafricaine.
L'évacuation en canoë de vendredi et les convois des berges de la rivière Nya vers le camp ont été organisés par l'UNHCR et ses agences partenaires - COOPI, le croissant rouge du Tchad, l'African Concern, Care International, et la Commission nationale d'assistance et de réinsertion des réfugiés (CNAR).
Une fois l'opération pilote achevée avec succès, un deuxième groupe de 163 réfugiés est arrivé au camp aux alentours de midi lundi, suivant le même itinéraire : la marche de 17 km, la traversée de la rivière en canoë et un voyage de 25 km en camion avant d'atteindre le camp. A partir de maintenant, l'UNHCR va mettre en place des convois journaliers jusqu'à ce que le transfert des réfugiés soit terminé, dans environ dix jours.
Afin de répondre à cette urgence, aussi bien que l'opération de rapatriement à venir pour les réfugiés du Tchad, actuellement en République centrafricaine, l'UNHCR a déployé quelque 30 employés supplémentaires, internationaux et locaux, à Goré ces deux dernières semaines, portant à 40 le personnel de l'agence dans la région.
Après avoir atteint le centre de transit dans le camp, les réfugiés sont pris en photo puis enregistrés par l'équipe de protection de l'UNHCR. Ils reçoivent ensuite des couvertures, de la nourriture, des matelas et des kits de cuisine. Plus tard cette semaine, ils déménageront de leur logement temporaire dans l'école du camp, vers des tentes affectées par famille à l'intérieur du camp. Plus de 10 000 réfugiés de République centrafricaine sont arrivés au sud du Tchad depuis juin, rejoignant 14 000 autres réfugiés qui vivent à Amboko depuis 2003.
Par Ginette Le Breton, Camp d'Amboko, Tchad