Afflux massif de réfugiés centrafricains au sud du Tchad
Afflux massif de réfugiés centrafricains au sud du Tchad
MAYA, Tchad, 13 mars (UNHCR) - Leur abri de fortune, fait de branchages et de feuillages, est situé à 800 mètres seulement de la frontière entre le Tchad et la République centrafricaine, mais pour Joséphine et Véronique cette distance équivaut à 800 kilomètres.
Les deux femmes se sentent enfin en sécurité de ce côté de la frontière, où elles ont rejoint environ 14 000 autres réfugiés, incluant quelque 3 000 d'entre eux qui sont arrivés ces deux dernières semaines. La plupart ont quitté la République centrafricaine (RCA) depuis mi-décembre, pour échapper aux attaques des combattants rebelles et des bandits menées sur leurs villages.
« Notre village a été détruit », a dit Véronique. « Maintenant je n'ai plus rien là-bas. » Sa compatriote Joséphine, qui a accouché dans la brousse durant la fuite, a ajouté : « C'était très difficile et je n'ai jamais eu aussi peur. »
L'arrivée de ces milliers de réfugiés a fait tripler la population de Maya, comptant habituellement 3 000 personnes, et elle a mis à rude épreuve les ressources et les familles d'accueil dans ce village frontalier.
L'agence des Nations Unies pour les réfugiés prévoit de commencer, vendredi, le transfert de ces nouveaux arrivants, dont Joséphine et Véronique ainsi que leurs nouveaux-nés, vers un site temporaire situé à 25 kilomètres plus à l'intérieur du pays près du village de Dembo, où ils recevront des tentes, des couvertures, des bâches en plastique, des jerricans et de la nourriture.
Des employés de l'UNHCR vont se rendre à Maya et à Dembo dans les prochains jours, pour aider à la procédure de détermination du statut de réfugié et à la distribution de biens de secours. L'agence pour les réfugiés travaille avec les représentants des communautés et les autorités locales, pour organiser les prochains transferts des réfugiés vers des sites près de Goré, à plusieurs centaines de kilomètres à l'est de Dembo.
Mais il y a un désaccord au sujet du transfert depuis la frontière parmi les représentants de réfugiés, dont beaucoup ont indiqué à Fatta Kourouma, le responsable du bureau de l'agence pour les réfugiés à Danamadji, en visite dernièrement à Maya, qu'ils voulaient rester près de leurs villages en République centrafricaine.
« Je sais que beaucoup parmi vous ressentez de l'attachement pour votre terre natale, même si vous vous trouvez ici au Tchad, mais nous ne pouvons accepter de vous laisser si près de la frontière », a indiqué Fatta Kourouma. « Quand la saison des pluies arrivera [en avril], nous ne pourrons plus vous apporter ni nourriture ni biens de secours car la route deviendra impraticable. »
D'autres facteurs ont contribué à cette situation que l'UNHCR considère comme urgente, notamment le temps perdu suite au conflit survenu au Tchad le mois dernier, lorsque des forces rebelles étaient brièvement entrées dans la capitale N'Djamena. Des milliers de Tchadiens ont fui vers le Cameroun voisin, alors que l'agence des Nations Unies pour les réfugiés avait évacué la plupart de ses employés se trouvant à N'Djamena.
« L'évacuation des employés des Nations Unies et des travailleurs humanitaires hors du Tchad a vraiment ralenti les choses. Le transport de nos articles humanitaires a été retardé à cause de l'insécurité dans la capitale et nous recherchons toujours des partenaires pour répondre aux besoins de ces réfugiés », a indiqué Fatta Kourouma.
Il a indiqué que le site de transit de Dembo, qui a été établi par l'UNHCR et African Concern, était seulement une solution temporaire, ajoutant que, « nous avons des problèmes pour trouver des sources d'eau suffisantes - nous avons besoin de partenaires pour réhabiliter les puits existants et en creuser de nouveaux. »
Cependant les réfugiés présents dans le village isolé de Maya considèrent que leur vie s'est déjà largement améliorée, même si la route vers le hameau n'est pas assez large pour qu'un véhicule puisse passer et qu'elle soit endommagée par endroits, suite à de précédentes inondations. Les réfugiés, ayant afflué en masse depuis la RCA ces trois derniers mois, n'ont cure de cet isolement.
Ils ont fui une vague récente d'attaques armées, durant lesquelles leurs maisons ont été pillées et brûlées. Leur région d'origine, dans le nord-est de la République centrafricaine, est en proie à l'anarchie. Les nouveaux arrivants attribuent la plupart des violences aux forces militaires rivales et aux zaraguinas, des bandits qui volent le bétail et kidnappent des enfants contre rançon.
Avant ce tout dernier afflux, le Tchad comptait quelque 45 000 réfugiés centrafricains hébergés dans quatre sites dans le sud du pays. Par ailleurs, 240 000 réfugiés soudanais sont accueillis dans 12 camps gérés par l'UNHCR dans l'est du Tchad et 180 000 Tchadiens sont déplacés dans le sud-est du pays.
Par Bryn Boyce à Maya, Tchad