L’asile et la migration sont des sujets qui suscitent de nombreux débats publics. Par conséquent, de nombreuses déclarations et beaucoup de chiffres circulent, surtout à l’approche des élections européennes, fédérales et régionales. Comment distinguer le vrai du faux ?
Le HCR déconstruit quelques mythes et les confronte aux faits.
À l’approche des élections européennes, fédérales et régionales de ce 9 juin, l’asile et la migration sont des sujets importants qui suscitent de nombreux débats, tant au niveau politique que dans les médias. En conséquence, toutes sortes de mythes et d’informations erronées circulent à propos des réfugiés et des demandeurs d’asile, comme l’idée que l’Europe est envahie par les réfugiés ou que le nombre de demandeurs d’asile en Belgique est en constante augmentation.
Ces informations imprécises sont sources de confusion, de polarisation et créent ou renforcent des préjugés à l’égard des demandeurs d’asile et des réfugiés. Des informations correctes et nuancées sont donc essentielles. C’est pourquoi le HCR déconstruit certains mythes populaires en vue des prochaines élections.
Pour garantir l’exactitude des chiffres et des faits, nous nous appuyons principalement sur des sources gouvernementales, telles que l’Office des Étrangers (l’OE), le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides (CGRA) et Fedasil, ainsi que sur les données d’Eurostat et du HCR.
La plupart des personnes déplacées de force viennent-elles dans l’Union européenne ?
Non, seulement 7,6 % (8,4 millions) des personnes déplacées de force dans le monde (110 millions) sont accueillies dans des pays membres de l’Union européenne.
L’immense majorité des personnes contraintes de fuir leur foyer, soit 62,5 millions de personnes, ne traversent pas les frontières et sont donc déplacées de force à l’intérieur de leur pays. Cela signifie que les personnes déplacées internes forment le plus grand groupe de personnes déplacées de force.
En outre, la plupart des réfugiés dans le monde (69%) qui franchissent une frontière en quête de sécurité se réfugient dans des pays voisins de leur pays d’origine afin de pouvoir rentrer chez eux dès que la situation le permettra, ou parce qu’ils n’ont pas d’autre choix. Fuir vers l’Europe coûte très cher et s’avère très dangereux.
Sur un total de 110 millions de personnes déplacées de force dans le monde (ce chiffre englobe les réfugiés, les demandeurs d’asile et les personnes déplacées internes), seules 8,4 millions de personnes ayant besoin d’une protection internationale sont accueillies dans les 27 États membres de l’UE. En termes de pourcentage, cela représente 7,6%, plus précisément 7,3 millions de réfugiés et 1,1 million de demandeurs d’asile.
Lorsque l’on compare la proportion de réfugiés en Europe à la population européenne totale, on constate qu’il ne s’agit que d’un pourcentage de 1,6%. De plus, le nombre de réfugiés en Europe a connu une forte augmentation en raison de l’escalade de la guerre en Ukraine suite à l’invasion par la Russie en février 2022.
La Belgique accueille-t-elle de plus en plus de demandeurs d’asile ?
Non, il n’y a pas d’augmentation constante du nombre de demandeurs d’asile.
Les chiffres des trente dernières années montrent que le nombre de demandes d’asile fluctue. Le nombre de demandes augmente au gré des conflits dans le monde, mais il diminue généralement par la suite.
Si l’on compare le nombre de demandeurs d’asile à la population totale de la Belgique, qui est de 11,7 millions d’habitants, on constate qu’il s’agit en fait d’un groupe très réduit. En 2023, 29,260 personnes ont présenté une première demande d’asile en Belgique, soit 0,3 % de la population totale du pays. A titre de comparaison, dans le Stade Roi Baudouin rempli, cela ne représente qu’une centaine de personnes sur un total de 50,000.
En 2023, les principaux pays d’origine étaient la Syrie, l’Afghanistan et les Territoires palestiniens occupés, ce qui montre que la plupart des demandeurs d’asile viennent de pays déchirés par les guerres et les violences depuis des années.
Il est important de savoir que depuis le début de l’escalade de la guerre en Ukraine en février 2022, plus de 75,000 réfugiés en provenance d’Ukraine ont bénéficié d’une protection temporaire en Belgique, en application de la directive européenne sur la protection temporaire*. Étant donné qu’ils n’entrent pas dans la procédure d’asile, les réfugiés ukrainiens ne sont pas comptabilisés dans le nombre de demandeurs d’asile en 2022 et 2023.
* La protection temporaire est une procédure exceptionnelle qui instaure un dispositif pour faire face à un afflux massif, dans l’Union européenne (UE), de ressortissants étrangers qui ne peuvent rentrer dans leur pays d’origine – notamment en raison d’une guerre, de violences ou de violations des droits de l’homme. Elle met en place dans les Etats membres de l’UE une protection immédiate et temporaire pour ces personnes déplacées.
La Belgique accueille-t-elle beaucoup plus de demandeurs d’asile que les autres pays de l’UE ?
Non, la Belgique ne reçoit que 3 % de l’ensemble des demandes d’asile dans l’UE, ce qui est proche de la moyenne de l’UE. En 2023, la Belgique a reçu 29,260 premières demandes d’asile.
C’est principalement l’Allemagne, mais aussi l’Espagne, la France et l’Italie qui reçoivent le plus grand nombre de premières demandes d’asile. La Grèce complète le top 5. Ensemble, ces cinq pays reçoivent plus de 75 % de toutes les demandes d’asile dans l’UE.
En 2023, la Belgique se situait à la 8e place en termes de nombre de premières demandes d’asile. Et si l’on compare le nombre de demandes d’asile à la population totale, la Belgique se situe à la 11e place. Chypre, l’Autriche, la Grèce, le Luxembourg et l’Allemagne occupent les cinq premières places.
Source : Eurostat
Est-il possible de garantir un accueil adéquat à tous les demandeurs d’asile ?
Oui, la Belgique a déjà fait face à des afflux de demandes d’asile plus importants par le passé et des solutions ont été trouvées pour les accueillir.
Le nombre de demandeurs d’asile en Belgique fluctue en fonction des conflits en cours. En 2015, quand un nombre record de demandes d’asile a été enregistré en Belgique comme dans l’ensemble de l’Union européenne, des efforts considérables ont été déployés pour renforcer la capacité d’accueil afin de faire face à cette augmentation. En effet, grâce notamment à la création d’initiatives d’accueil collectives et locales (LOI) supplémentaires, la mise à disposition de nombreuses places d’urgence ainsi qu’une collaboration entre de nombreux partenaires publics et privés, des solutions ont été trouvées pour accueillir les demandeurs d’asile.
Il est donc essentiel que le réseau d’accueil évolue vers une plus grande flexibilité, pour pouvoir répondre aux fluctuations normales de l’afflux de demandeurs d’asile.
En outre, la rapidité et la manière avec lesquelles la Belgique a fourni un abri à plus de 75,000 réfugiés ukrainiens depuis le début de l’escalade de la guerre en Ukraine montrent que des solutions peuvent être trouvées grâce à une action collective et coordonnée de tous les acteurs aux niveaux fédéral, régional et communal.
Source : CGRA
Les demandeurs d’asile ne veulent-ils pas travailler ?
En réalité, plus de la moitié des demandeurs d’asile en Belgique sont actifs sur le marché du travail. La plupart souhaitent travailler pendant la procédure d’asile afin de pouvoir gagner leur vie, être autonome et contribuer à la société.
En effet, sans travail, beaucoup de demandeurs d’asile ont le sentiment d’être inutiles parce qu’ils ne peuvent pas subvenir à leurs besoins et ont l’impression de ne pas prendre part à la société.
Cette volonté de travailler se reflète dans les chiffres. Selon Fedasil, en 2022, près de 10,000 résidents au sein de son réseau d’accueil ont travaillé. Cela représente 55 % de ceux qui étaient aptes et autorisés à travailler.
Il est important de souligner que les demandeurs d’asile sont principalement employés dans des secteurs en pénurie de main d’œuvre. Ils travaillent notamment dans les secteurs de l’agriculture, de la restauration, du nettoyage, ainsi que dans les garages et les stations de lavage. De nombreux demandeurs d’asile travaillent également via des d’agences d’intérim.
Source : Fedasil