Des milliers de réfugiés soudanais arrivés au centre de transit du HCR à Renk sont actuellement transférés vers des sites d’accueil dans le comté de Maban, dans l’État du Nil supérieur.
Par Melik Benkritly et Moulid Hujale à Renk, Soudan du Sud
Après trois jours passés dans un centre de transit dans le comté de Renk, dans l’État du Nil supérieur au Soudan du Sud, Ousman Abdallah et sa famille, ainsi que des réfugiés érythréens et d’autres demandeurs d’asile, montent enfin à bord d’un bus à destination du camp de réfugiés de Doro, dans le comté de Maban.
Ousman, 45 ans, a fui les hostilités dans la capitale soudanaise, Khartoum, avec ses quatre enfants et sa femme enceinte. Ils font partie des 6800 réfugiés soudanais qui ont franchi la frontière pour trouver refuge au Soudan du Sud depuis que les combats ont éclaté à la mi-avril. « Le trajet entre Khartoum et la frontière a été très difficile », raconte Ousman, qui travaillait comme électricien avant que le conflit n’éclate. « Cela nous a pris une semaine. Nous n’avions que des haricots à manger, et un peu d’eau potable. »
« Lorsque nous sommes arrivés à Joda [le poste frontière], il y avait un groupe de personnes qui forçaient les gens à leur donner ce qu’ils avaient sur eux. J’avais deux téléphones, dont l’un était défectueux. Ils ont pris celui qui fonctionnait bien et m’ont laissé celui-là. »
« Nous n’avions que des haricots à manger, et un peu d’eau potable. »
La majorité des personnes qui franchissent la frontière sont des Sud-Soudanais qui vivaient au Soudan en tant que réfugiés avant que le conflit n’éclate. À ce jour, plus de 117 000 d’entre eux sont retournés dans le pays qu’ils avaient fui. Ce dernier est pourtant toujours confronté à une grave insécurité alimentaire, à des conflits intercommunautaires et aux conséquences dévastatrices du changement climatique.
Le Soudan du Sud accueille également plus de 300 000 réfugiés et demandeurs d’asile, principalement originaires du Soudan, ainsi que plus de 2,2 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays.
Après sept heures de voyage sur des routes en mauvais état, le bus dépose Ousman et sa famille à Maban, où vivent plus de 168 000 réfugiés répartis dans quatre camps différents. La famille d’Ousman est installée à Doro, le plus grand des quatre camps. « Nous espérons pouvoir bénéficier de couvertures, d’eau et d’autres choses », explique-t-il.
La crise soudanaise entraîne une aggravation de la situation humanitaire déjà désastreuse à Maban. La plupart des réfugiés qui y vivent dépendent de l’aide humanitaire, mais le manque de fonds a contraint le Programme alimentaire mondial à réduire les rations alimentaires de 50% au cours des trois dernières années. Aujourd’hui, le ralentissement du commerce transfrontalier en raison des combats au Soudan fait flamber les prix des denrées alimentaires.
« Le prix des produits sur le marché ont augmenté… les gens ne mangent que du maïs, il n’y a pas d’autres aliments… les gens souffrent beaucoup », souligne Walid Hakim, réfugié soudanais de 48 ans et président du camp de réfugiés de Gandrassa à Maban.
En plus d’une grave détérioration de la situation économique dans le camp depuis le début du conflit au Soudan, d’autres produits tels que les médicaments manquent, alors même que de nombreux blessés comptent parmi les nouveaux arrivants dans le camp.
Alors que les combats entre les factions militaires rivales se poursuivent au Soudan, les agences humanitaires craignent que de plus en plus de personnes cherchent refuge au Soudan du Sud voisin. Le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, collabore étroitement avec le gouvernement pour assurer une aide d’urgence au centre de transit situé à proximité de la frontière. Il s’agit notamment de distribuer de l’eau et des repas chauds, de mettre à disposition des installations sanitaires et de dispenser des soins de santé primaires.
Outre le transfert des réfugiés soudanais et des autres réfugiés vers Maban, le HCR collabore également avec ses partenaires et les autorités locales pour aider les rapatriés sud-soudanais à rejoindre leurs régions d’origine.
Cependant, l’arrivée de la saison des pluies représente un défi important. Les routes risquent de devenir impraticables, ce qui compliquera encore la tâche des organisations humanitaires qui sont déjà sous financées et très sollicitées dans le pays.
« L’un des principaux défis est celui des inondations causées par le changement climatique», explique Jackline Alex Tillian, assistante chargée de la protection au HCR. « L’endroit où je me trouve en ce moment est une zone sujette aux inondations. Lorsque les crues surviennent, elles affectent toute la population, y compris la communauté d’accueil. »
Ousman affirme que sa principale priorité est d’avoir un endroit sûr où vivre avec sa famille. « Si la sécurité revient au Soudan, nous y retournerons. J’espère que les combats vont cesser. Les combats ne sont pas bons car ils sont destructeurs et entraînent la fuite des gens vers d’autres pays », ajoute-t-il.
Le HCR a récemment lancé un appel de fonds inter-agences de 470,4 millions de dollars pour venir en aide à plus d’un million de personnes, parmi lesquelles des réfugiés, des rapatriés et des ressortissants de pays tiers, tous affectés par la crise au Soudan.
« Nous avons urgemment besoin de plus de moyens et de fonds pour pouvoir répondre aux besoins des réfugiés et des membres de la communauté d’accueil », souligne Jackline Tillian. « Nous appelons tous les donateurs à apporter leur soutien à ces personnes. Elles ont besoin d’abris, de nourriture, d’eau et de services de santé. »
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